Citations sur L'Embellie (197)
la plupart des erreurs se font en un instant, se mesurent en secondes, mauvais virage, pied sur l'accélérateur au lieu du frein, ou l'inverse. les erreurs sont rarement le résultat d'un enchaînement de décisions logiques ; par exemple, une femme peut être à un cheveu d'aimer absolument, être même à l'extrême bord, sans y avoir réfléchi une seule minute.
on dit adieu pour toujours à son conjoint d'une franche poignée de main, et puis on tombe sur lui le lendemain matin à la boulangerie en train d'acheter des petits pains aux graines de bouleau, dans la queue à la banque le midi, à la piscine en fin de journée, au bureau de l'état civil plus tard dans la semaine, le week-end suivant au théâtre avec sa nouvelle, on est tout le temps inévitablement en train de se caramboler.
je ne prétends pas que j'aime faire la cuisine, mais qui sait lire peut cuisiner, un point c'est tout.
Certains de nos amis n'ont pas dormi une nuit entière depuis des années, ne font plus l'amour sinon à la va-vite une fois de temps en temps. Et quand l'un vient chercher l'autre en voiture au travail, ils ne s'embrassent plus, et se détournent pour regarder par la vitre. Ca je le sais, je l'ai vu. Il n'y a que très peu de couples qui résistent au fait d'avoir des enfants.
"Dans le coin des joujoux, je lui lance doucement le ballon, visant ses bras : il a préparé un creux pour la réception du ballon, les coudes contre le ventre et les avant-bras tendus vers l'avant. J'évalue la distance et quelle force je dois mettre en oeuvre pour qu'il arrive à l'attraper. J'envoie alors le ballon qui décrit un petit arc de cercle, comme dans un film au ralenti. Il rate le ballon qui s'en va rouler au rayon des sous-vêtements et chaussettes. Je m'appliquerai mieux la prochaine fois, je me mettrai à genoux. Je peux me débrouiller pour jouer avec un enfant, mais lui ne sait pas encore se débrouiller pour jouer avec un adulte".
Hakouna matata! ...C'est du swahili et ça veut dire: "T'en fais pas", ça vient du Roi Lion (p.116)
Par ailleurs, je n'emporte pas grand-chose avec moi, l'essentiel étant de ne pas s'encombrer de vieux trucs. Je n'ai pas le projet de fuir quoi que ce soit, je pars seulement en reconnaissance de mes territoires les plus intimes ainsi que de terres inconnues avec mon petit compagnon de voyage de quatre ans, malentendant et malvoyant, à la recherche de nouvelles sensations dans une résidence d'été fraîchement installée au flanc d'une ravine terreuse.
[Notre ado] a poussé de quatorze centimètres l'été dernier, dit la fermière, et il n'est pour ainsi dire pas sorti de son lit en juillet et en août ; il dormait dix-huit heures sur vingt-quatre et ne se réveillait que pour manger. C'était vraiment notre fils prodigue, il fallait presque abattre un agneau par repas. On n'a guère pu profiter de lui cet été-là, même pas sur la moissonneuse-batteuse qu'il sait pourtant manoeuvrer depuis l'âge de huit ans. Ses mouvements étaient si lents qu'on a bien cru qu'il n'arriverait jamais à aller du canapé à son lit, c'était comme s'il avait de l'eau jusque sous les bras. (p. 193)
Crois-moi, l'accouchement transforme les fantasmes en douleur.
Être assis dans un jacuzzi étroit, les genoux serrés contre la poitrine, et sentir la chaleur brûlante d'un corps inconnu dans la vapeur sulfureuse, c'est ainsi que je suis, quasiment telle que Dieu m'a créée il y a trente-trois ans avec, en valeur ajoutée, maillot de bain, pulsions sexuelles, expérience de vie et souvenirs obsédants.