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Après sa brillante trilogie (« La guerre est une ruse », « Prémices de la chute » et « La fabrique de la terreur ») consacrée à la genèse du djihadisme et à la diffusion du terrorisme islamiste en Occident, Frédéric Paulin se penche sur un épisode un peu oublié de l'histoire récente : le sommet du G8 à Gênes.
En cet été 2001, huit chefs d'Etat et de gouvernement représentant leurs pays respectifs sont attendus dans la capitale de la Ligurie.
L'objet de cette réunion : réduire la pauvreté dans le monde.
Des centaines de milliers de manifestants les attendent de pied ferme. Si l'opposition au capitalisme est le point commun à tous ces activistes, leurs objectifs et leurs méthodes d'action divergent. Aux côtés des altermondialistes d'ATTAC plutôt pacifistes, on trouve les trotskistes de la LCR mais aussi les Black Blocs aux méthodes violentes.
En face, des policiers et des carabiniers italiens, dont certains sont nostalgiques du fascisme, placés sous les ordres des sbires de Berlusconi qui aspirent, eux aussi, au retour à l'ordre mussolinien.
A la marge, les services secrets français, partisans de l'infiltration, qui surveillent avec effroi l'évolution des événements.
Pour incarner les forces en présence, Frédéric Paulin a mêlé personnages réels et de fiction.
Grâce au talent de conteur de l'auteur dont l'écriture journalistique est manifeste pour décrire avec précision le déroulement des faits, le lecteur a l'impression d'être « embedded » au coeur de Gênes et d'être spectateur de ces journées de juillet qui se soldèrent par l'assassinat de Carlo Giuliani à qui est dédié le livre, par des violences injustifiées et par des séances de torture pratiquées par les Italiens.
Eh oui, la torture a été pratiquée il y a un vingt dans un pays démocratique. Glaçant.




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En juillet 2001, à Gênes, lors du G8, la police a abattu un jeune manifestant d'une balle dans la tête. Dans ce roman noir Frédéric Paulin nous détaille les circonstances qui ont mené à des violences inouïes de la part des forces de l'ordre. le lecteur est immergé dans les événements qu'il suit au plus près avec les personnages. Wag et Nathalie sont deux jeunes Français militants d'extrême gauche. Lui ancien LCR et elle autonome, proche du black bloc. Derrière eux les policiers infiltrés Martinez et Cazalon ainsi que les journalistes Génovéfa Gicquel et Erwan Corbeil. Aucun d'entre eux n'imaginait ce dont ils ont été témoins à Gênes et qui les amène à reconsidérer leurs engagements et choix de vie. En face nous avons Laurent Lamar, conseiller en communication de Jacques Chirac et le fasciste Franco de Carli du ministère de l'intérieur italien. le contexte politique est présenté de façon claire et vivante.

L'auteur s'est manifestement bien documenté et nous montre comment, dès l'organisation du sommet, il y avait une volonté de casser du rouge de la part des néo-fasciste faisant partie du gouvernement de Berlusconi. Chauffés à blanc après plusieurs heures d'attentes sous le soleil dans leurs tenues anti-émeutes les forces de l'ordre italiennes ont rapidement perdu toute retenue dans leurs interventions. Manifestations autorisées ou interdites, pacifiques ou violentes, ont été dispersées avec la même brutalité, gazées, nassées. Les personnes arrêtées, emmenées dans un centre de détention créé pour l'occasion, ont été traitées au mépris de tous leurs droits : humiliées, menacées, tabassées. Pendant ce temps, dans la zone rouge où se déroule le G8, les dirigeants des grandes puissances, informés de ce qui se déroule à l'extérieur, continuent leurs réunions comme si de rien n'était.

Les faits sont choquants mais le roman est prenant et puissant, mené de main de maître. Les personnages sont nuancés et ambivalents, ce que j'apprécie. Ils sont amenés à s'interroger et le lecteur avec eux. L'auteur montre bien le piège de la violence: dans un camp comme dans l'autre, même les personnages qui hésitent sur son usage sont pris par une sorte d'ivresse dès qu'ils commencent à taper. J'ai beaucoup apprécié cet excellent roman d'un auteur que je ne connaissais pas et vers lequel je reviendrai, sans aucun doute.
Lien : http://monbiblioblog.revolub..
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L'auteur nous plonge dans l'avant, le pendant et l'après G8 à Gênes, Italie, en juillet 2001.

C'est la période où Chirac est aux commandes en France, Berlusconi en Italie. Avec une précision parfois chirurgicale, Frédéric Paulin fait revivre ce sommet qui a vu s'affronter les manifestants, pour la plupart activistes d'extrême gauche dont les fameux black bloc, et les services de sécurité plus particulièrement les carabiniers, sans oublier les victimes collatérales dont les journalistes, les photographes de presse ...

Dans son récit on suit plus particulièrement un couple de jeunes activistes, des fonctionnaires proches du pouvoir, une journaliste et un photographe ainsi que quelques policiers et carabiniers. Beaucoup d'anciens fachistes ont intégré les rangs des carabiniers et de la politique italienne. le sommet s'annonce musclé. Tous les groupes se préparent à l'affrontement et veulent en découdre, chacun prêt à tout pour défendre sa grille de lecture du monde.

J'ai eu du mal à me passionner pour ce récit, long à démarrer, plus de la moitié du livre. J'ai aussi trouvé que les personnages manquaient de profondeur, n'étaient pas assez fouillés, ce qui fait que je ne me suis attachée à aucun.
Sinon, l'auteur a mené un bon travail de reconstitution pour faire surgir une autre vérité, différente de ce qu'il en était sorti à l'époque. Une extrême violence allant jusqu'à la mort d'un jeune manifestant tué par un carabinier, l'information biaisée, manipulée, la grande comédie politicienne et au final les espoirs perdus pour tous.
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Le petit avis de Kris pour Collectif Polar
Militants d'extrême gauche français, Wag et Nathalie se rendent à Gênes en juin 2001. le G8 se tient dans la cité italienne et le mouvement altermondialiste entend bien contester cette incarnation de l'ordre mondial néolibéral. Mais la répression policière se déchaîne et entre les journalistes encombrants, les agents de la DST et les propres tiraillements des deux héros, l'histoire vacille.
Frédéric Paulin est un historien contemporain. Sous couvert de roman, il nous dévoile les coulisses de ce G8 qui laissa des cicatrices indélébiles. Après sa magnifique trilogie sur l'Algérie qui éclaire sur beaucoup de choses, ce nouvel opus ne dépare pas dans ces récits violents sur ce qui restera pour beaucoup une plaie qui ne guérira jamais.
Lien : https://collectifpolar.wordp..
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Un livre impressionnant relatant des faits de violences des équipes d'ordre (de désordre!) italienne lors de la rencontre du G8 à Gêne en juillet 2001. Evènements de l'histoire récente, hélas vite éclipsés par les évènements de septembre de l'autre côté de l'Atlantique. L'auteur nous fait participer aux préparations de ce sommet aussi bien du côté des organisateurs, de la police que des altermondialistes. Puis il nous fait participer aux manifestations et à la barbarie des forces de l'ordre. Il nous décrit le climat de haine et ça fait vraiment peur car c'est réel. Les puissants réunis dans une tour d'ivoire pour leurs affaires ont des chiens de garde enragés pour les protéger des concitoyens qui protestent contre les décisions et le système et pour la plupart de manière non violente. Mais en Italie - et aussi ailleurs, nous le voyons en France maintenant - au sommet de Gêne, ces citoyens vont récolter la mort, la torture, l'humiliation. Un livre témoignage fort raconté par les différents personnages : flics, journalistes, manifestants. On n'en a pas fini avec les clivages, on n'en n'a pas fini de se battre, la violence quel qu'elle soit a hélas de l'avenir.
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Qui se souvient de ce mois de juillet 2001 durant lequel se déroula la réunion du G8 à Gênes , alors que deux mois plus tard le Monde verra les deux tours du World Trade Center de New York s'écrouler en direct percutées plus tôt par deux avions kamikazes ?
Qui se souvient de cette manifestation massive de plusieurs centaines de milliers d'opposants à la mondialisation ? Une manifestation où l'ultra violence s'est déployée pendant ces quelques jours avec comme résultat de nombreux blessés, traumatisés à vie et surtout un mort.
Un affrontement que fait revivre pour nous Frédéric Paulin de l'intérieur. Il décortique ce face à face de l'intérieur grâce à des personnages clefs .
D'un côté les forces de police italiennes dirigées par une hiérarchie nostalgique du régime fasciste alors que les partis d'extrême-droite participent au conglomérat de la majorité piloté par Il Cavaliere Berlusconi. Des militaires qui rêvent de montrer au monde leur capacité à contenir coûte que coûte cette masse grouillante d'activistes de tout poil. Quitte à laisser leur conscience au vestiaire. Quitte à utiliser tous les arguments, même les plus fallacieux, pour stimuler leurs troupes à commettre les pires exactions sur ces jeunes manifestants .
De l'autre, des pacifistes d'extrême-gauche de tous pays et des anarchistes qui souhaitent semer le chaos . Les plus féroces sont les membres des black blocs qui ne connaissent qu'un mot d'ordre : la destruction systématique de tout ce qui passe à leur portée. Parmi eux , Nathalie et Yag , un jeune couple rennais , habitués de ces démonstrations de force et de ces confrontations mais qui vont vivre une expérience hors du commun qui signifiera peut être la fin prématurée de leur jeunesse et de leurs dernières utopies.

Frédéric Paulin était l'un d'entre eux . Un de ces jeunes manifestants présents parmi tant d'autres pour démontrer qu'il y avait une autre voie possible que cette mondialisation à tout crin. Que le destin du monde ne pouvait être régi par huit états , par huit dirigeants faisant l'apologie d'un capitalisme débridé.
Vingt ans après il témoigne , une sorte d'exutoire peut être …qui sait ?
Grâce à des va et vient incessants entre les différentes factions , à travers les discours va t-en guerre des autorités italiennes, on sent la tension monter d'un cran de pages en pages. Même si on est bien dans un roman, l'auteur s'en tient aux déroulés précis des faits , avec le moins de parti pris possible. Chaque personnage a son rôle à jouer pour nous éclairer au mieux sur la succession des événements. Un drame annoncé disséqué avec minutie par l'auteur. Des deux côtés, le parti de la violence et de la force fait la loi. L'extrémisme a vaincu. Même les services secrets infiltrés sont débordés pour ne pas dire impuissants devant ses actes d'une rare violence alors que les médias indépendants tentent de rendre compte du chaos ambiant et des répressions policières disproportionnées.
Une fois de plus , Frédéric Paulin se démarque et nous offre une leçon d'histoire. Un témoignage indispensable qui nous exhorte à la vigilance. Un rappel que le barbarisme ne doit pas passer. Que cet extrémisme qui affole les sondages aujourd'hui peut être combattu dans les urnes. Sans faute.


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« Les habitants de Gênes ont fui ou se terrent chez eux. La ville est déserte et l'état de siège a été proclamé. » Ainsi commence ce récit choral qui relate, durant le G8 à Gênes en 2001, l'affrontement des manifestants avec les forces de l'ordre. C'était il y a déjà 20 ans, j'étais trop jeune pour me rappeler les tenants et aboutissants de ces événements. Généralement, quand on se plaint que la police « ose » riposter contre les casseurs qui, eux, brisent tout et blessent tout le monde sans état d'âme, ça m'énerve profondément. Pourtant, lorsqu'elle n'est pas contrôlée, la violence d'où qu'elle vienne engendre la violence jusqu'à, parfois, ne plus pouvoir être maîtrisée. C'est ce qui s'est produit en ce juillet 2001 à Gênes, dans un climat que nous avons connu récemment avec les gilets jaunes. Sauf que j'ignorais que cela avait fini si mal, ainsi que le contexte particulier qui a conduit à cette issue.


Frédéric PAULIN nous fait assister à la montée en puissance des idéologies contestataires : les non-violents, puis ceux qui utilisent la violence symbolique (les tuniques blanches), et les véritables casseurs (le black bloc). Dans le même temps, on assiste aussi à la propagande de peur lancée par le gouvernement italien de Berlusconi pour, d'une part, justifier l'état de siège et l'interdiction de la zone politique aux manifestants (ce qui les motive encore plus car ils trouvent inadmissible d'être interdits de manifester à l'endroit où se déroule le sommet proprement dit) et, d'autre part, justifier l'utilisation de la force répressive pour endiguer la violence quand elle se déploiera. « Leur idée, c'est de pénétrer dans la zone rouge. Ca, le Gouvernement ne le permettra pas ». En effet, tout le monde est persuadé que les casseurs veulent mettre la ville à feu et à sang. Si l'instrumentalisation des médias fonctionne si bien, c'est que les manifestations du précédent sommet politique, à Göteborg, ont marqué les esprits :


« Des chevaux fous de peur lancés au galop sur une foule brandissant des drapeaux rouges et noirs. Des incendies, des commerces ravagés, des chaussées dépavées, une ville dans la chaos. Un vent de colère et le refus qui souffle depuis loin, très loin, remontant sans doute le fleuve Göta älv pour se déverser dans les rues. le Gouvernement a envoyé la police en armure et la gendarmerie montée. Des véhicules blindés foncent sur les avenues, écartant les émeutiers comme le patriarche ouvrit la mer. Mais cette mer d'hommes et de femmes vociférant, projetant des pavés et des bouteilles sur la soldatesque, se referme aussitôt après leur passage. »


Les manifestants ont dépassé les bornes de la violence au sommet précédent, l'Italie de Berlusconi compte s'en servir pour affirmer sa puissance. Frédéric PAULIN nous fait alors infiltrer les coulisses des manigances entre Conseillers politiques, les enquêtes journalistiques au coeur de l'action à la recherche du scoop, ou encore la vie paranoïaque des manifestant qui se savent infiltré par les flics, les balances et même deux agents de la DST qui n'ont rien à faire là et n'avaient pas du tout envie d'aller risquer leur vie pour satisfaire une demande politico-politique… Mais les manipulations sont telles que nous nous retrouvons bientôt tous pris au piège de l'Histoire. « La situation devient ubuesque : des flics, une journaliste, un traître et une pure et dure vont tranquillement se balader au milieu du black bloc ». Les forces de l'ordre ne veulent pas vraiment en venir aux mains, mais les discours alarmistes de la hiérarchie, qui leur a ordonné d'être prêtes à répliquer à mort si nécessaire, les échauffent « Si on essaye de vous tuer, je vous ordonne de répliquer oeil pour oeil, gronde le commandant ».


Les manifestants, quant à eux, n'ont pas toujours l'air d'avoir choisi la voie de la protestation par intime conviction mais plutôt par dépit, à force de ne pas réussir à percer les milieux intellectuels sans piston et se persuadant que tout cela est la faute des « petits bourgeois ». A les entendre, eux seraient des saints : « On veut qu'ils sachent que la violence, on ne fait que la retourner contre les flics et l'Etat qui l'utilisent bien avant nous ». Sauf que cette manif ne fait pas exception : ce sont d'abord les manifestants, qui se sentent si libres et si forts après avoir pété des pare-brises et des boutiques, qui agressent gravement les forces de l'ordre dans leurs véhicules. Celles-ci ne font que répliquer au départ - à la grande surprise des manifestants qui ne comprennent pas qu'on s'en prenne à eux en retour ! A ce moment de l'histoire, les écouter raisonner ne donne vraiment pas envie de les plaindre ni de les soutenir. J'ai apprécié ça : que l'auteur ne me force pas à me faire apprécier ou plaindre les manifestants plus que les autres parties en présence.
D'ailleurs les journalistes qui les suivent et les connaissent ne sont pas dupes : « Gênes pour eux, c'est un grand terrain de jeu où il faut casser le plus de vitrines, faire cramer le plus de bagnoles et, bien sûr, échapper à la police ; rien d'autre », « qu'importe la couleur du flacon pourvu qu'ils aient l'adrénaline » parce que (ça c'est moi qui le rajoute) c'est quand même plus facile de détruire ce que les autres sont parvenus à construire dans leur vie de de se construire une vie à soi. « Si j'appartiens au black bloc, c'est parce que le monde dans lequel je vis est monotone et effrayant. Essayer de le détruire est une jouissance ». Et c'est tellement facile, quand nos polices ont l'ordre de répliquer le moins possible.


Pourtant ici, plus le roman avance, plus on se rend compte que le climat délétère instauré par le gouvernement néo-fasciste, et notamment les ordres et discours aux polices ont portés leurs fruits : « ici, à Gênes, les flics n'ont pas l'air prêts à respecter les règles ». Car finalement c'est bien ce dont il est question : la facilité avec laquelle l'histoire peut se répéter et dégénérer si rapidement, avant que les garde-fous ne se mettent en action. Sur fond de fascisme et de guerre civile, Frédéric PAULIN fait monter la tension jusqu'au point de non-retour, jusqu'à ce que La Nuit tombe sur nos âmes… On regarde ces scènes de guerre où tout le monde a peur, et l'on voudrait que les casseurs en profitent quand même pour comprendre que : « cette terreur, c'est celle qui saisit lorsque l'Etat n'assure plus la sécurité de ses citoyens ». Mais le temps n'est pas encore à la réflexion : aux yeux du monde, et surtout des dirigeants italiens, la violence des manifestants vient simplement de donner une bonne raison aux autorités de se défendre, de riposter, et de frapper plus fort encore. Et une fois les chiens lâchés, qui peut les arrêter ? Quand l'ampleur du désastre apparaît enfin, il est trop tard ; il ne sera plus temps que des sanctions et des procès, des jugements européens.


Si, du fait de ce papillonnage d'un univers à l'autre, je ne suis pas parvenue sur le moment à entrer réellement dans l'un quelconque des personnages et à m'identifier ni à m'attacher à l'un d'eux, l'auteur parvient en 250 pages à reproduire une assez bonne vue d'ensemble de l'ambiance et de chaque partie en présence. On en retient que le danger vient de l'extrémisme en lui-même, de quel que bord qu'il soit (Etat ou citoyen). J'ai pensé au départ que nous faire entrer davantage dans les motivations et convictions profondes des uns et des autres aurait gagné en profondeur. Mais nul besoin en réalité : c'est la fin qui donne le dernier coup de massue, et m'a achevée. C'est encore elle qui donne sa profondeur et sa raison d'être au roman. Une oeuvre importante car réaliste et toujours d'actualité. Menée tambour battant, mais rondement menée.
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Inside the black bloc !

Juillet 2001, quatre jours qui ébranlèrent Gênes et l'Europe. Quatre jours qui ébranlèrent, un peu, le monde. Quatre jours et 1 mort. Un de trop. Il y avait eu les contre-sommets altermondialistes de Seattle en 1999, Prague et Nice en 2000 et aussi Göteborg quelques semaines avant. Autant de signes avant-coureurs d'une tension grandissante qui appelait nécessairement une réponse.

Cette réponse, elle advint à Gênes lors du G8 de cet été 2001. Et quelle réponse ! D'un côté, la bunkerisation des 8 plus grands dirigeants mondiaux et de leur cour dans une partie de la ville devenue camp retranché, inaccessible derrière les barrages et défenses policières, symbole éclatant du fossé les coupant toujours un peu plus du monde réel.

De l'autre, 400 000 contre-manifestants attendus de pied ferme par des policiers préparés et gonflés à bloc par leur hiérarchie, issue des partis nationalistes d'extrême droite opportunément alliés à Berlusconi. le piège est prêt. Et l'envie de violence des carabinieri est telle que le combat est forcément inégal.

Dans La nuit tombée sur nos âmes, Frédéric Paulin raconte ces journées à travers le prisme des différents protagonistes qui les ont suivies ou vécues : Nathalie la toto et son mec Chrétien « Wag », ex-LCR découvrant la mouvance anarchiste et le black bloc ; Génovefa et Erwan les journalistes français envoyés spéciaux ; Martinez et Cazalon, les flics français infiltrés chez les gauchos.

Mais il y a aussi – et surtout – tous les apprentis sorciers politiques, qui jouent à celui qui sera le plus grand manipulateur, de Lamar le chargé de com' de l'Élysée, à Carli et Calvini, boutefeux italiens dont les tambouilles et inconséquences aboutiront à la mort du jeune Carlo, 23 ans.

Si le livre de Paulin est à charge – et pourquoi pas ? – semblant parfois pousser à l'excès la violence aveugle des policiers italiens durant ces quatre journées, il suffit de se remémorer les images vues à l'époque (véritables scènes de guerre télévisées) ou les multiples jugements survenus par la suite en condamnations diplomatiques ou judiciaires de ces violences policières, pour prendre conscience a posteriori de l'effroyable réalisme de ce roman.

Parallèlement, la vision que Paulin livre sur les divergences et inimitiés profondes des différents groupuscules qui composent l'extrême gauche et la désillusion – le mot est faible - de Nath et Wag au fur et à mesure des événements, montre que la tendance qui conduit généralement à mettre tous les participants des contre-sommets dans le même sac de beatniks désoeuvrés est aussi stupide que contre-productive.

Côté politiques, les dirigeants de ce G8 ne sortent pas grandis du roman, au premier rang desquels Bush fils et Berlusconi, désespérément sourds et incompréhensifs face à ce qu'il se passe à quelques mètres d'eux. Avec néanmoins une exception faite pour Chirac sans que l'on n'arrive à savoir si son intérêt participe d'un véritable début de compassion ou du flair politique légendaire du baron corrézien.
Un dernier mot enfin : si les contre-sommets se sont apaisés, les mêmes enjeux se rejouent aujourd'hui autour des grands rassemblements liés au climat, avec la même impression d'incompréhension. Mais cela fait longtemps qu'on sait bien que l'histoire ne fait que se répéter. Alors rien que pour cela, la lecture de Paulin est importante !
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Il y a vingt ans à Gênes, se tenait un sommet du G8 ainsi qu'un contre sommet historique. Ce furent trois jours d'affrontements dans une ville en état de siège durant lesquels un jeune militant italien trouva la mort. La nuit tombée sur nos âmes nous plonge dans ces jours de tension extrême et de violence. L'auteur nous raconte ces journée si particulières qui posèrent les jalons des luttes sociales à venir. Je n'avais jamais rien lu de similaire et autant le dire tout de suite, j'ai été complètement emportée par ce roman.
Alors que le coeur du Gênes se referme pour accueillir les chefs d'état du G8, 500 000 personnes se préparent à manifester. Venant de toutes les mouvances de la gauche et de toute l'Europe en portant des revendications sociales et politiques. Tous refusent l'ordre mondiale. Parmi eux il y a Wag, un français habitué aux manifestations et Nat, une militante proche des Black Blocs. On rencontre aussi des journalistes, des policiers infiltrés et des conseillers politiques. Toutes les parties prenantes des événements qui vont agiter le sommets sont présentes. Des politiques italiens fascistes, aux militants de gauche les plus radicaux, l'auteur nous brosse un portrait exhaustif des mouvances en présence.
Très vite le lecteur est happé par l'action. Les événements s'enchaînent, les personnages doivent prendre des décisions rapidement et le rythme s'accélère à mesure que le roman avance. Nous sommes omniscient, à la fois dans les coulisses du pouvoir et au coeur des manifestations. La violence et la tension règne dans la rue mais aussi dans les salons dorés ou dans les casernes des carabiniers. L'inévitable arrive et un militant est tué. Carlos Giulina si prend une balle, c'est le déchaînement. Frédéric Paulin était présent au contre sommet et nous sentons dans son écriture une forme d'urgence, de révoltes. Même si ses affinités avec les militants altermondialiste sont claires, il reste lucide sur leurs dérives et leurs contradictions. En plongeant au coeur de la fougue de la manifestation, le lecteur est pris d'une forme de révolte face une répression disproportionné.
Alors que s'organise le contre sommet, les tensions au sein des opposants politiques sont vives. Entre les black blocs, les parties d'extrême gauche traditionnelles et les diverses mouvances alter-mondialistes, les divergences sont profondes malgré la présence d'un ennemi commun. Cette incapacité à réellement s'entendre et échanger gangrène la diffusion des idées de gauche. En parallèle des débats internes aux opposants d'autres discutions ont lieu entre les cercles du pouvoir. Un chargé de communication de Jacques Chirac affronte un fasciste du ministère de l'intérieur italien. Deux visions et des intérêts divergents se confrontent en entraînant compromissions et manipulations. Les journalistes ne sont pas en reste dans ce tableau tout en nuance. Nous suivons une jeune femme ambitieuse qui assiste impuissante à la violence policière. Elle comprend alors son incapacité à témoigner de ce qu'elle a vu et le peu d'intérêt que son journal porte à cela.
Frédéric Paulin s'attaque à un sujet rarement vu en littérature avec une force et un réalisme saisissant. Il raconte des journées qui ont changées le militantisme et le rapport avec la police. C'est un texte qui m'a passionné par son sujet mais aussi par la manière dont l'auteur brosse des personnages extrêmement justes. En racontant cet événement quelque peu oublié, Frédéric Paulin nous donne à reflechir sur nos luttes actuelles. Un coup de coeur !
Lien : https://lapagequimarque.word..
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Bonjour amis lecteurs,
Je remercie chaleureusement les éditions Agullo pour l'envoi du livre de Frédéric Paulin: « La nuit tombée sur nos âmes » Un roman noir très intéressant qui nous plonge dans le sommet du G8 à Gènes en 2001 . L'auteur nous raconte ces quatre journées dramatiques pendant lesquelles la violence s'est invitée dans les deux camps. L'auteur intègre des faits historiques à une intrigue captivante totalement maîtrisée grâce à son style enlevé.
Une belle découverte !
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