Citations sur Les singuliers (91)
(...) mais que savent-ils réellement, les médecins, d'une maladie dont ils ignorent les causes et les effets ? Ils improvisent, voilà tout. Les médecins sont des artistes. ils inventent. Certes, ils ne créent pas la maladie, mais ils s'en emparent, lui donnent un nom, l'observent, la colorent, la polissent, la sculptent et puis la montrent au public, tout contents, en disant : "Voilà, c'est moi qui l'ai fait."
Les mouettes aussi font de bons sujets, elles sont plus petites que chez nous, mais elles crient d'autant plus fort (tu me diras sans doute que c'est parce qu'elles sont françaises ?)
Gauguin a refusé que je lui offre le portrait, (...) C'est ainsi que j'ai appris que Gauguin n'accepte jamais de cadeau : il préfère faire des dettes, ça lui parait plus noble. A chacun sa morale.
C'est justement parce que la solitude est la meilleure alliée de l'artiste que l'amitié doit lui être précieuse. Moi-même qui redoute tant le monde, je trouve que mes amis me font vivre davantage. Non pas plus longtemps, bien évidement, mais plus largement. Ils donnent de l'épaisseur à la vie. p.37
Je n'ai jamais dit que tu ne me manquais pas. T'ai-je seulement laissé le croire ? Je ne crois pas. J'ai le sentiment très peu bruyant. Je suis comme ça. Tout est à l'intérieur, je prends, je capte, j'absorbe et je restitue si peu - et en art, c'est pareil, je suis une créature totalement improductive. p.216
Car enfin, quand on cherche tout seul et qu'on ouvre des pistes en tâtonnant dans le noir, il est bon de croiser sur sa route quelqu'un qui tient une lampe allumée et vous encourage à creuser.............dans l'art, le difficile n'est pas seulement de creuser sans rien voir, c'est de tenir le plus longtemps possible et de ne pas céder, ni à la société qui a l'air de vouloir vous faire crever, ni a votre propre démon qui le veut tout autant.
Je vous souhaite de ne pas céder.
Tenez bon. Je vous serre bien cordialement la main.
Ce qu'on reproche souvent aux artistes, comme les musiciens que du croises chez Anna, c'est de se prendre trop au sérieux. Mais en disant cela, on oublie que tout art est tragique. Seul le pratique avec légèreté celui qui n 'est pas un artiste.
p.240
Il faut du courage pour accepter de se perdre.
e trouve curieux que la photographie m’ait mené là.
J’avais cru pourtant qu’elle me conduirait à sans cesse aller vers les autres, mais il n’en est rien. Ce que je sens en moi, c’est un recul, presqu’un refus. Je ne suis pas hostile – je crois que je ne le serai jamais, mais seulement indifférent à tout ce qui arrive aux autres et qui ne m’arrive pas, à moi. Gauguin était de venu comme ça avant qu’il parte. Il disait qu’il fallait se faire à l’idée de n’être pas aimé : c’est une habitude à prendre, pour ça, il faut cesser d’aimer aussi. Blinder son cœur. Se fermer. Il n’y a pas d’autre solution, sinon on devient fou.
Filiger m'a juré qu'à Pont-Aven, sur le seuil d'une maison de pêcheur, il a vu une toile de Gauguin en guise de paillasson! Il faut dire que, contrairement à Vincent, le bonhomme a abusé du système que tu décris, qui consiste à payer ses dettes avec des ébauches. Dans son dos, les gens s'en débarrassent plus ou moins discrètement... C'est même devenu une source de plaisanterie. Les Gauguin battent la campagne, colmatent les fissures dans les chambres de bonnes, cachent les passe-plats dans les auberges ou servent d'enseignes à deux sous. De Pont-Aven au Pouldu, il a semé à tous les vents ! Même la petite Mimi est à la tête d'une collection de figurine en bois signée PGo...