-L’art est nécessaire aux hommes, vois-tu. Sans l’art, un homme ne verrait pas la beauté du monde. Nos malheurs viennent du fait que nous ne sommes plus en phase avec l’art.
Si tu veux connaître le pays dans lequel tu te trouves, il te suffit d’écouter les chants traditionnels ou de regarder les peintures (….) Peindre et chanter, c’est continuer à faire vivre son territoire, c’est le lier à ce qu’ont vécu les ancêtres. En quelque sorte, la répétition entretient la vie.
Bien que je ne comprenne pas pourquoi ses parents persistent à cacher leurs racines juives, je souris. Ils prennent conscience qu’il y a des souffrances difficiles à partager. Et ça, c’est énorme. Tout d’un coup, l’évidence me saute aux yeux.
Au fond, on est tous l’Aborigène de quelqu’un ! On éclate de rire tous les deux, un rire nerveux qui nous prend aux côtes et pourrait ne jamais s’arrête.
Les Blancs mettent des barrières et des clôtures autour de ce qu’ils ont acheté. Ils n’ont rien compris. Nous pensons, nous, que la terre appartient collectivement aux gens. Chacun a des droits et des obligations à son égard. Nous faisons tous partie du même monde. L’argent et la force ne vont pas dans le même sens. Nous refusons que les dollars et les armes soient les plus puissants.
La mémoire n’oublie pas, elle ne se souvient plus des mots, mais il reste les odeurs, les émotions, les couleurs.
En quoi un peuple qui exploite un autre peut- il prétendre être plus civilisé ?
La prison, elle était partout. Dès qu’on avait un quart d’heure de retard aux repas, on était punis. Enfermés dans une cellule et obligés d’y rester deux ou trois jours, seuls. Et je ne te parle pas de la manière dont les religieux nous traitaient. Des bêtes auraient été mieux considérées. Tout ça en vénérant le merveilleux Seigneur Dieu grâce auquel on était nés. Le dimanche, ils prient ; le lundi, ils te volent ; le reste de la semaine, ils te battent et te font la morale.
…je prendrai le risque de découvrir des trucs qui ne me plaisent pas. La vérité est préférable à l’inconnu.
Le terme de ‘vraie famille' me gêne, d’ailleurs. Les vrais parents, c’est qui exactement ? Ceux qui mettent au monde ou ceux qui entourent ?
C’est drôle, hein, on vit avec quelqu’un, on partage sa vie, et on ne se rend pas compte de ce qu’il ressent vraiment. On calque ses propres sentiments sur l’autre, on se projette et on imagine.