J'avais adoré "
Feu", je me suis donc précipité sur
Western dès sa sortie.
Comment dire... C'est une grosse déception.
Remarquablement écrit, tout de même, car l'autrice est une grande stylisticienne. Mais pour l'intrigue, j'ai été au mieux perplexe, au pire agacée.
Les personnages d'abord sont flottants. Beaucoup moins bien définis que dans
Feu. Ensuite, on a des parallèles qui sont tracés sans arrêt avec le
western et le Dom Juan (pièce dans laquelle était supposé jouer le héros). Si au début, on trouve ça très malin, au fil des pages, ça marche de moins en moins et finalement plus du tout. J'ai fini par trouver la corrélation inaboutie et artificielle. Mais à la limite, ce n'est pas le souci. Pourquoi pas. Licence poétique. Et puis l'autrice écrit sacrément bien, ça rattrape.
Ce qui m'a vraiment fait grincer des dents en revanche, c'est cet espèce de crachat à la figure de ceux qui exigent justice et qui passent pour de vains excités, amateurs de violence crue... J'y ai vu une volonté de mettre en valeur les "femmes clémentes" (aux agresseurs) en condamnant d'une drôle de façon les victimes qui exigent justice, et qui a priori se plaindraient pour pas grand chose...
Résumons l'affaire,
le héros est un coureur de jupon qui a eu le tort immense de froisser une femme du ministère (qui va orchestrer une vengeance médiatique dans la figure misogyne classique de la furie - mais ce personnage non plus n'est pas développé, hélas). Surtout, le héros a eu une aventure torride avec une jeune étudiante, dont il s'était fait lointainement le professeur. D'accord, il y a eu syndrome Pygmalion et manipulation, d'accord il s'est mal comporté, "comme un connard" dira-t-il lui même. Mais il n'y a pas eu violence physique, pas d'insulte, ni quelconque entorse au consentement. Son unique tort est donc d'avoir rompu, et mal, après une brève relation toxique où il a retourné le cerveau de sa jeune compagne par un assaut de déclarations amoureuses, avant de l'abandonner brutalement du jour au lendemain.
Oui, il y a eu abus. Clairement, d'ailleurs c'est dit et démontré. Jusque là tout est clair. de quoi condamner un tel comportement dans un cercle intime, voire de provoquer un peu de grogne dans les franges les plus évoluées du milieu professionnel, mais guère plus. Ce n'est même pas illégal.
De puis quand le pays entier se lève et exige un lynchage en règle pour si peu ? C'est quelle sorte de crédibilité ? J'ai été très surprise de voir que l'autrice était sociologue, tellement sa logique m'a paru fourvoyée.
A l'arrivée, elle parait condamner massivement ceux qui protestent contre la violence. Renversement des responsabilités et de la victimisation. Ceux qui s'offusquent sont pointés du doigts. Ils et surtout elles exagèrent, quand même ! Forcément, puisqu'ils s'énervent pour pas grand chose. Pour une affaire pareille, on ne comprend pas un instant qu'un pays entier se dresse sur ses ergots. Ça m'a complètement sortie de ma lecture, tant ça me semblait illogique. Des gens parlent carrément d'aller égorger le héros et organisent de véritables expéditions ! Pour une histoire d'amour qui a mal tourné ? Contre un homme chouchou des masses ? Sérieusement ?
Bizarre, sacrément bizarre...
S'il est vrai que tout bon livre s'inscrit dans son époque et l'observe sans complaisance, j'ai trouvé que ce regard-là était myope. Il m'a fait mal au coeur.