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sur 387 notes

Critiques filtrées sur 4 étoiles  
Les enfants adorent jouer à la guerre.
« Pan pan, j't'ai tué ! Raaaah, je joue plus avec toi, t'es jamais mort »
Seulement voilà, les gamins grandissent. Il arrive même parfois que certains, encore à peine sortis des jupons maternels, y soient envoyés au nom de la mère patrie. Et là, fini l'insouciance. Bonjour tristesse. Découvrir la solitude, dominer sa peur, gérer ce besoin de tout plaquer pour retrouver le giron familial mais surtout tuer, décimer, buter, exterminer sans aucun état d'âme. Jamais bon les remords sur le front.

Bartle et Murphy sont inséparables. Agés respectivement de 21 et 18 ans, ils sont soldats en Irak.
Bartle a fait une énorme connerie. Si s'engager semblait déjà ne pas être l'idée du siécle, promettre à la maman de Murphy de ramener son petit vivant lui collera douloureusement à la peau comme le fameux sparadrap du capitaine Haddock. Rien de pire qu'une promesse non tenue...Sinon deux, peut-être...

S'inscrivant dans la droite ligne d'un Full Metal Jacket, Powers le bien nommé vous flingue le moral à la vitesse d'une balle de M16.
La guerre, c'est moche. le retour à la vie civile guère mieux.
Sous les ordres de l'animal à sang-froid qu'est le sergent Sterling, le quotidien pue la charogne et la désolation.
Murphy y est resté. Bartle en est revenu mais à quel prix ?
Marqué au fer rouge par le conflit Irakien, hanté par la disparition de son frère d'arme, il n'est plus qu'une ombre au pays des vivants.

Un court récit maîtrisé de bout en bout qui fait la part belle à l'horreur des combats tout en insistant savamment sur les répercussions psychologiques de la chose. L'écriture touchante empreinte de douceur contraste avec la sécheresse du propos. Un bouquin exempt de tout espoir qui pourrait bien faire réfléchir, allez savoir, les va-t-en-guerre de tout poil...
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Bartle, après ses études a choisi de s'engager dans l'armée. C'est lors de la période de formation militaire qu'il rencontre Murphy de trois ans plus jeune, originaire lui aussi de Richmond en Virginie. Les deux jeunes, idéalistes sont pris en charge par Sterling, un instructeur particulièrement dur, mais juste, dont l,aspiration est de les préparer aux dangers et risques de la guerre. Les trois hommes sont envoyés en Irak et Bartle décide de prendre sous son aile Murphy, jusqu'à promettre à la mère de ce dernier, de le ramener en vie.

Yellow birds est un roman court mais prenant, alternant les périodes de formation, celle des combats et le retour du jeune Bartle, 21 ans. Une histoire de crédulité en le discours séduisant des recruteurs de l'armée, un destin qur l'on veut glorieux ou une envie de se réaliser dans une mission héroïque ou quelque fois, s'enrôler dans l'armée pour devenir ce que l'on pense être un homme responsable. Bartle lui, s'est pris d'amitié pour Murphy, encore gamin et cette responsabilité va le hanter plus qu'il ne le pensait. Dès l'arrivée en Irak, les deux jeunes sont confrontés à des actes violents, qu'ils doivent assumer ou couvrir et le déchaînement de cette violence fera perdre ses dernières illusions au jeune Bartle. Un retour difficile à la vie normale, pour un militaire qui a perdu plusieurs de ses amis, une réadaptation difficile à la vie civile et des comptes à régler avec soi-même.
Un roman très humain qui dépeint la guerre et ses horreurs mais surtout qui met l'accent sur le ressenti du jeune Bartle, bouleversant ses croyances...Kevin Powers livre un roman dans un style de toute beauté, de l'Amérique qui se veut gagnant mais au prix du sacrifice de ses enfants...les yellow birds, les moineaux jaunes sont les paroles d'un chant militaire américains.
Poignant et humain.
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Malheureusement pas autant emporté que ce à quoi je m'attendais avec Yellow Birds de Kevin Powers – traduit par Emmanuelle et Philippe Aronson – qui a peut-être souffert d'un trop plein d'enchaînement de livres de guerre ces derniers temps.

J'y ai cependant retrouvé avec plaisir ce que j'avais apprécié dans L'écho du temps : une grande habileté dans la construction du livre, fait d'allers-et-retours entre le service en Irak du soldat John Bartle à l'automne 2004 et son difficile retour au pays quelques mois plus tard ; la beauté du style de Powers, extrêmement travaillé, faisant de ce livre une lecture exigeante qu'on ne peut lire en dilettante ; et le grand travail sur les personnages, plongée introspective sans jugement dans la psychologie traumatisée de ces soldats décidément trop jeunes pour subir cette violence.

Mais au-delà de ces réussites, je suis resté assez loin de cette énième récit de l'impossible retour post-conflits, cherchant en vain l'originalité. le déficit de préparation, le trauma des combats à la déloyale, l'importance du frère d'armes, l'insupportable regard positif et enthousiaste des autres lors du retour, la difficile gestion solitaire de l'après, sont des thèmes ayant ici un air de déjà lu.

Il n'en reste pas moins que Yellow Birds est un livre marquant, témoignage précieux du théâtre opérationnel irakien et de la folie guerrière qui traverse les époques et meurtrit les jeunes hommes sans discontinuer.
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A vingt ans, Bartie est un jeune Américain comme un autre. A vingt-deux ans, c'est un homme détruit, menacé d'une peine de prison. Entre ces deux anniversaires, c'est la guerre en Irak qui a tout ratiboisé. Comment reprendre une vie normale après vingt mois d'enfer ? Comment retrouver le goût de vivre après avoir perdu des dizaines d'amis ? Comment revenir dans sa chambre d'enfant et faire comme si rien de s'était passé ?

Mais le passé n'oublie pas, et finit toujours pas nous rattraper …

"Lorsque j'essaie de m'en rappeler dans le détail, je n'y parviens pas. Lorsque j'essaie d'oublier, le souvenir revient d'autant plus vite et avec d'autant plus de force. Sans trêve."

Entre document et roman, Yellow Birds est le premier texte que je lis sur la guerre en Irak, du point de vue des Américains, et d'autant plus du point de vue d'un jeune soldat, de mon âge, dans un carnage du XXIe siècle.

C'est là-bas en effet que Bartie va laisser sa jeunesse, ses illusions, entre le moment de son engagement et la mort de son ami le plus cher, Murph. Tout le texte est tourné autour de ce dernier, dont on sait qu'il est mort à 18 ans, 10 mois après son engagement, dans des circonstances troubles. Des circonstances dans lesquelles le jeune Bartie ne semble pas être totalement innocent, ce qui le taraude depuis son retour, d'autant qu'il avait promis à sa mère de le ramener vivant.

"Dix mois, plus ou moins, depuis ce jour jusqu'à celui de sa mort. Cela peut sembler court mais toute mon existence n'a depuis été qu'une digression sur ces jours-là. Et cette période semble à présent suspendue au-dessus de ma tête telle une querelle qui jamais ne s'apaisera."

Pour comprendre, il reprend toute son histoire depuis le jour de son incorporation, son entraînement, leur arrivée en Irak, les opérations diverses et variées. Et puis le décompte des morts, qui les frappe de plein fouet à chaque fois.

"Il semble absurde à présent que nous ayons pu voir en chacune de ces morts une affirmation de nos propres vies. Que nous ayons pu croire que chaque mort appartenait à un temps donné et que par conséquent ce temps n'était pas le nôtre. Nous ne savions pas que la liste était infinie. Nous ne nous étions pas projeté au-delà de mille. Nous ne nous étions jamais dit que nous pourrions faire partie des morts vivants. "

Ce qu'il y a de grand dans ce roman c'est qu'il n'y a pas de jugement, de parti pris : le narrateur subit cette guerre, comme une fatalité. Et l'auteur ne fait passer aucun message. Car il ne s'agit pas seulement de cette guerre, mais de toutes les guerres de l'humanité qui ont rendu fou puis fauché des jeunes gens dans la fleur de l'âge, siècle après siècle. Et il n'existe toujours pas de remède pour rendre supportable cette horreur (heureusement …). La guerre, ce n'est donc pas seulement celle d'Irak, qui se vit sur le terrain, c'est aussi celle de ramène le narrateur dans sa tête : alors qu'il rentre chez lui et redécouvre les paysages familiers, il se surprend à entrevoir les terrains favorables à une attaque, une butte pour se cacher, un buisson pour se camoufler. Désormais, la guerre ne le quittera plus.

A yellow bird with a yellow bill
Was sittin' on my window sill
I lured him in with a piece of bread
And then I smashed his little head

Un roman puissant, intemporel, magnifique.
Lien : http://missbouquinaix.wordpr..
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À l'image de ses personnages John Bartle et Daniel Murphy, Kevin Powers, s'était engagé dans l'armée américaine et avait combattu en Irak entre février 2004 et mars 2005.
Pourquoi..? Et pourquoi Bartle, 21 ans, et Murph, 18 ans, eux, se font enrôler? Comme pour d'autres aspects de ce récit souvent économe en termes d'éléments purement contextuels ou psychologiques, l'auteur ne s'attardera pas trop sur les raisons qui les avaient conduits à rejoindre l'armée. On laisse plutôt au lecteur le soin d'imaginer, à partir de quelques indications en filigrane (le souvenir évoqué du travail à la mine, comme son père, par Murph ; le besoin de prouver «qu'il était un homme», pour Bartle..) les contours d'un arrière-fond social et familial ayant participé à cette décision : des jeunes paumés, un milieu socio-économique plutôt défavorisé, la rage d'en découdre face à l'absence de perspectives d'avenir, l'Amérique profonde... Allways the same old story..! À quoi bon insister, n'est-ce pas?
Si, toujours selon Kevin Powers, YELLOW BIRDS est né de son envie de témoigner de «ce qu'a représenté physiquement, émotionnellement et psychologiquement » pour les jeunes de sa génération engagés comme lui en Irak, c'est néanmoins sous les traits d'une oeuvre de fiction que l'auteur aura choisi d'en évoquer les ravages psychologiques subséquents, souvent sous-estimés et sommairement évalués par les services médicaux de l'armée lors du retour à vie civile («Question 2 : Vous avez tué ou vu quelqu'un se faire tuer. Evaluez votre état émotionnel en cochant l'une des deux cases suivantes : (A) Ravi / (B) Mal à l'aise » !), séquelles parfois conséquentes que les spécialistes assimilent aux «syndromes de stress post-traumatique». Aux États-Unis, le SSPT semble toucher un nombre important de vétérans, avec des conséquences quelquefois tragiques et irréversibles pour les sujets concernés (des statistiques indiquent un taux de suicide dans ce groupe plus de deux fois supérieur au reste de la population ; un nombre considérable de fusillades publiques dans le pays sont perpétrées par d'anciens combattants…).
En lisant le roman, on peut d'ailleurs légitimement se demander si l'écrivain n'en aurait personnellement fait l'expérience. le style brisé, emprunté par une plume qui paraît en état permanent d'hypervigilance, la structure éclatée de son récit, la puissance sensorielle et à fleur de mots qui imprègne son écriture sont des éléments qui pourraient sûrement y faire songer.

L'histoire imaginée par Kevin Powers paraît pourtant de prime abord assez attendue dans ce registre particulier. le thème de son roman, sans le talent indéniable dont l'auteur saura faire preuve, aurait pu aussi créer chez le lecteur une certaine sensation de déjà-lu et déjà-vu… Un thématique somme toute assez familière aux lecteurs actuels, tournant autour des traumatismes psychologiques des vétérans de guerre, de la difficulté à se réadapter et à se réinsérer dans la vie courante lors de leur retour à vie civile (à ce sujet, la guerre du Vietnam notamment, aura fourni matière à de nombreux récits et adaptations cinématographiques devenus depuis des incontournables du genre). Tous les éléments d'usage y pointent bien d'ailleurs, dans YELLOW BIRDS: le combat acharné contre la peur, les pactes imaginaires passés avec la mort, la volupté provoquée par la montée d'adrénaline, la haine et la «chosification» de l'ennemi, les exactions et les exécutions sommaires, les profils borderline en position de commandement, l'horreur innommable des corps mutilés, déchiquetés, la perte irréparable d'un camarade proche… Certes, dans un contexte revu ici à l'aune des conflits actuels et essentiellement non-territorialisés contre le terrorisme en Moyen-Orient, touchant de manière dramatique et indiscriminée combattants et populations civiles, se traduisant la plupart du temps par des opérations de terrain dépourvues d'une réelle stratégie militaire cohérente, et surtout de toute convention éthique de guerre, passée entre les belligérants, croisades modernes incapables de dresser de garde-fous solides contre la dissémination de la haine à l'état pur, s'enlisant en une sorte de guérilla brutale, sans issue, où les dérapages sont fréquents et les individus plongés dans une climat d'irréalité et d'absurdité aux conséquences psychologiques particulièrement délétères.
Ce sera cependant dans le traitement purement littéraire et très original de ce matériau brut que YELLOW BIRDS fera en fin de compte la différence par rapport à d'autres récits du genre. Par une construction essentiellement immersive, par une syntaxe en apparence simple mais très souvent au bord de la rupture de sens, par une imagerie incongrue et poétique qui envahit soudain des remémorations d'événements par ailleurs absolument terrifiants, leur conférant par la même occasion une beauté inusitée d'ode funèbre (personnellement, à la lecture de certains passages me seront revenus à l'esprit les vers sublimes du «Dormeur du Val»), par ses reconstitutions à l'aspect incomplet, par ses dialogues à moitié suspendus, par ses silences également, l'auteur forgera un langage original qui fait éprouver au lecteur, à lui aussi de manière plus intuitive que rationnelle, l'immense désarroi subjectif de son personnage narrateur, son incapacité à vivre dans le moment présent, le morcellement de ses pensées et de son sentiment d'identité propre.

Septembre 2004 : des obus de mortier traversent l'espace au-dessus des bâtiments poussiéreux d'Al-Tafar ; par une chaleur étouffante, Bartle se souvient pourtant «d'avoir eu l'impression de [se] retrouver dans une rivière glacée aux premiers beaux jours du printemps, trempé, terrifié et le souffle coupé». Un an après, en août 2005, de retour chez lui à Richmond, John Bartle rentrera effectivement, sans aucune préméditation, dans les eaux du James River et se laissera flotter à la dérive, frôlant encore une fois la mort, cette fois-ci dans l'espoir de pouvoir «dormir et oublier».
Mais depuis où se souvient-il exactement le narrateur quand il raconte les événements? Dans son errance sans but, la nature, les courants d'eau, ainsi que ses souvenirs en général, s'entremêlent, les images se superposent, les distances s'annulent. de retour d'Irak, Bartle ne se sent qu' «un intrus» dans le paysage qui lui était familier. La-bàs, à Ninawa, à la confluence du Tigre et de l'Euphrate, alors qu'il «faisait feu sur tout ce qui bougeait», il se rappelera avoir touché et vu s'écrouler un homme près de la rive. À cet instant-là, nous dit-il, «je reniai les eaux de mon enfance». Les souvenirs du Tigre ou de la baie de Chesapeake, du James ou du Chatt-el-Arab ne lui appartiennent plus, «mais à quelqu'un d'autre ; peut-être n'avaient-ils jamais vraiment été miens ».


Kevin Powers construit un récit qui s'ajuste au fur et à mesure à l'état de sidération de son personnage, psychiquement écorché, soumis à des aller-retour incessants entre passé et présent, à des flash-backs lui faisant revivre en boucle les visions, les sons et les odeurs qui continuent de squatter sa sensorialité, à une distorsion spatio-temporelle qui ne lui laisse d'autre alternative que de s'isoler et chercher une sédation dans l'alcool. Par une grande sobriété dans l'expression des sentiments, l'auteur évitera cependant le piège facile du pathos larmoyant et édifiant. Face aux images de cauchemar qui hantent l'esprit de Bartle, de morts-vivants retenant de leurs mains leurs viscères déchiquetées, de cadavres de civils, y compris de femmes et enfants, gisant dans les ruelles poussiéreuses d'Al-Tafar, ou encore de son compagnon et frère d'armes, capturé, torturé puis émasculé avant d'être décapité, les effets provoqués par cette économie de moyens en seront d'autant plus saisissants, troublants pour le lecteur, témoin ahuri, impuissant, aussi démuni que le personnage face à l'absurdité de cette boucherie inutile. «Oh Barbara, quelle connerie la guerre ! »

Cette écriture « stupéfiante » nous rappelle la puissance inouïe dont peuvent se parer des mots simples grâce à leurs résonances insoupçonnées, leurs assemblages intuitifs, leur poésie inusitée. Mots induits par une logique autre que celle d'une raison provisoirement hors service. Mots aussi aux vertus potentiellement cathartiques, comme dans les tragédies antiques. Si, comme l'on a souvent dit, «un mot peut tuer», des mots peuvent également être en mesure de ramener à la vie et parfois, comme ce fut visiblement le cas ici, de faire naître un jeune écrivain.

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Coup de poing du sergent Sterling! Rompez soldat!
Car jamais Bartle n'aurait du promettre à la mère de Murphy de prendre soin de son fils et de le ramener vivant.
Murphy ne reviendra pas...

Irak, 2004. Engagés dans une sale guerre, deux jeunes hommes perdent toute innocence dans les combats de rues éternellement recommencés, encadrés par des gradés désabusés et épuisés. Ils fonctionnent en mode automatique dans une nébuleuse de violence et de mort. Certains autour d'eux résistent avec rage et détermination, certains autres disjonctent peu à peu...

Quelque soit l'époque, la raison du conflit et les motivations des combattants, la guerre fracasse les hommes, et, si elle les laisse vivants, elle les rend infirmes dans leur corps et dans leur tête.
Au retour au pays, être vétéran entraine toujours les mêmes effets : décalage total avec la brutalité des combats. Il ne reste que honte, culpabilité et parfois déchéance, avec l'absurdité de cette période de vie perdue, qui change un homme définitivement.
Comment peut on être l'assassin qu'on fête?
Comment Bartle peut-il vivre avec cela, en ayant raté la seule chose sur laquelle il s'était engagé: sauver son copain?

Très belle lecture.
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-"Ce peut-il que l'on doive mourir à 18 ans ? Ne doit-on pas vieillir avant de mourir ?"
Avant de partir pour al Tafar, en Irak, Bartle fait une promesse qui le poursuivra toute sa vie.
Etait-ce des paroles en l'air ? Comme peut-on promettre alors que l'on s'apprête à partir pour l'inconnu ? La bas, l'ennemi est invisible, le stress permanent, les nerfs sont mis à rude épreuves. Les hommes sont transformé en morts-vivants, la vie est en sursis. Et pour ceux qui en sortiront, il y aura le retour au pays, le choc d'un retour à une vie « normale ». L'expérience de Bartle aussi terrible soit-elle, est certainement commune à de nombreux soldats. Un témoignage réaliste sur le destin de ces jeunes gens que l'on fait vieillir trop vite.
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Bartle a fait la guerre en Irak. Une guerre aussi dure à vivre qu'à revivre. La mort semble proche ; avec son ami Murphy, ils essaient de l'exorciser en comptant les hommes tombés. Mais l'horreur est constamment présente et il est compliqué de ne pas ressortir marqué par ce déchainement de haine.
Il faut être fort pour rentrer dans cette lecture, les abominations sont présentes tout le long du roman, l'amitié entre Bartle et Murphy aide à contrebalancer ces horreurs. Les allers-retours entre la guerre et le retour à sa maison aident à comprendre son enfermement sur lui-même. J'ai halluciné que les tests sur le mental du soldat à son retour ne soient pas plus qu'un banal formulaire QCM, l'homme n'est-il pas plus important que ça ? Ne sert-il que de chair à canon ?
Un roman écrit avec sensibilité sur la guerre, j'ai été touché par sa poésie qui reflète parfaitement la culpabilité de Bartle. Kevin Powers, comme son narrateur, a vécu la guerre en Irak. Cette expérience lui a permis de faire un livre remarquable (à l'image d'A l'ouest, rien de nouveau) et de montrer l'absurdité des guerres.
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Ils ont 18 et 21 ans et se sont engagés simplement pour échapper à la routine de leur vie. Rien ne les prédisposait à aller combattre en Irak. Mais une fois incorporés, l'engrenage s'est mis en place et les a dépassé. L'un est mort, l'autre ne s'en est pas remis. On a tous entendu parler des ravages psychologiques de la guerre et du difficile retour des combattants à une vie normale. C'est le sujet de ce roman traité ici avec une sobriété implacable et puissante à laquelle on ne peut échapper, pris au piège de la guerre comme Bartle et ses frères d'armes. Un beau livre sur l'absurdité de la guerre.
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« Je vous promets, […], je vous promets que je vous le ramènerais. » Une promesse que Bartle n'aurait jamais dû faire. Une promesse intenable à laquelle la mère de Murph va croire dur comme fer. Mais la réalité sera tout autre. Une fois arrivés en Irak, les frères d'armes Murph (18 ans) et Bartle (21 ans), ne pourront affronter l'horreur en restant soudés. Rendu fou par l'insoutenable violence quotidienne, Murph va disparaître. Bartle ne le ramènera pas sain et sauf à sa mère. Il ne le ramènera pas tout court… Pour le jeune soldat, le constat est amer : « Je ne veux pas être responsable. […] En fait je ne suis pas un héros, pas un garçon exemplaire, j'ai eu de la chance de m'en sortir vivant en un seul morceau. J'étais prêt à échanger n'importe quoi contre ça, telle était ma lâcheté. »

Kevin Powers a combattu en Irak. Au réalisme documentaire il a préféré le prisme d'une fiction empreinte d'un certain lyrisme. La vision qu'il donne de la guerre a un coté hallucinatoire, porté par des couleurs où dominent le jaune poussiéreux et le rouge sang. La toile qu'il peint au fil de ces 250 pages est souvent trouble et possède une évidente teinte surréaliste. Son narrateur alterne entre l'impuissance et la culpabilité. La perte des repères est pour lui terrible : « Nous n'avions même plus conscience de notre propre violence : les passages à tabac, les coups de pied décochés aux chiens, les fouilles, la parfaite brutalité de notre présence. Chacun de nos actes correspondait à une page de notre manuel que l'on appliquait sans réfléchir. Je m'en moquais. »

La construction du roman, sans être follement originale, est très efficace : les chapitres alternent entre la guerre et l'après guerre et la structure, tout en flash-back, entretient la tension pour ne révéler le plus monstrueux que dans les dernières pages. Si je devais comparer Yellow birds avec Fin de mi-temps pour le soldat Billy Lynn, je dirais que seul le thème de la guerre en Irak rapproche les deux textes. Pour le reste, à l'esprit picaresque, grotesque et violemment comique de Ben Fountain, Powers oppose une vision poétique beaucoup plus introspective. Une « beauté triste » où l'on découvre la lente décomposition d'un engagé volontaire et son impossible retour à la vie civile. Une étude menée sur les vétérans revenus du front irakien a montré qu'au cours de l'année 2007, en moyenne, dix-sept d'entre eux se seraient suicidés chaque jour. A travers la figure de Bartle, Powers relate la violence de l'expérience intérieure engendrée par la guerre. Il décrit l'écho d'un ébranlement intime qui transforme ces hommes rentrés au pays en morts-vivants.

Un premier roman que j'ai trouvé en tout point sublime.

Lien : http://litterature-a-blog.bl..
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