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Critiques filtrées sur 5 étoiles  
On entend beaucoup parler de Corto Maltese ces temps-ci. J'en vois même — les plus jeunes d'entre-nous — qui, ayant certes déjà entendu prononcer le nom du personnage mais n'ayant jamais franchi le pas de la lecture d'un album, le découvrent avec le faux Corto qui vient de sortir. C'est un comble, non ?

Je ne vous cache pas que quand j'entends tous ces jeunes et moins jeunes parler du faux Corto, je me dis, pour ceux qui ne connaissent pas, que cela pourrait être le bon moment pour découvrir les vrais, au premier rang desquels j'aurais tendance à conseiller celui-ci.

Ce n'est pas évident d'en conseiller un en particulier car la série de BD de Corto Maltese est à l'interface, au confluent de sources très diverses qui la nourrissent et même, qui la caractérisent. Histoire, voyages, sorcellerie et ésotérisme, aventures, géopolitique, croyances et légendes, culture, romantisme, poésie, etc.

Si bien qu'en raison même de son statut d'œuvre à la croisée des chemins de disciplines aussi différentes voire contradictoires (la précision documentaire et historique qui copine avec les croyances et les légendes les plus farfelues, par exemple) que les gens qui aiment les BD de Corto Maltese peuvent les aimer pour des raisons, elles aussi, très diverses et contradictoires.

De sorte que, selon l'angle d'attaque où vous vous reconnaissez le plus, vous aimerez plus ou moins tel ou tel titre, selon qu'il fait la part belle ou non à votre point de vue favori.

En ce qui me concerne, plus Hugo Pratt attire mon attention sur des événements historiques réels et peu connus, survenus à l'autre bout de la planète, il y a près d'un siècle voire davantage, plus je prends de plaisir. Plus il y a de légendes et de croyances, plus je m'y ennuie.

Selon cette définition typologique, les deux meilleurs albums selon moi sont ce Corto Maltese En Sibérie et La Maison Dorée De Samarkand, les deux suivis de près par Tango puis, un peu plus loin, les Éthiopiques. La Fable de Venise, les Helvétiques ou Mû arrivant bonnes dernières, également en raison du relâchement du dessin mais surtout car il n'y est question quasiment que de légendes ou de croyances.

Avant de vous parler un peu du synopsis de cet album, je tiens à préciser que c'est probablement celui que je trouve le plus parfait quant au trait du dessin, ex-æquo avec les Celtiques et les Éthiopiques. Une grand finesse, une grande beauté plastique, vraiment de la belle ouvrage.

Ensuite, vient le contexte historique et géographique. Nous sommes au fin fond de la Russie en 1919. La Révolution communiste a posé ses bases partout à l'ouest, il ne reste que quelques poches de résistance de l'armée blanche à l'est, c'est-à-dire ce qui reste de l'aristocratie militaire russe.

Un train chargé de l'or du tsar déchu fait route vers l'est par l'axe trans-sibérien. L'or doit servir à financer l'armée de reconquête visant à écraser la Révolution communiste. C'est le baron von Ungern-Sternberg qui commande cette armée quelque part entre Sibérie et Mongolie. Cet homme a réellement existé et, de façon générale, je suis toujours admirative de la culture et de la qualité des recherches et des connexions que réalisait l'auteur Hugo Pratt, à une époque où l'internet n'existait pas et où il était bien plus difficile et fastidieux de trouver de l'information qu'aujourd'hui.

Mais le contexte géopolitique local est loin d'être aussi simple. Depuis la chute de la dynastie Mandchoue en 1911, la Chine est dans un chaos politique indescriptible. Différents chefs de guerre locaux s'adonnent à des atrocités dans le but d'accroître ou de récupérer leur pouvoir. Les vautours japonais, américains et anglais tournent autour de la proie chinoise moribonde...

Des sociétés secrètes chinoises sèment la terreur et aimeraient bien mettre la main sur le train d'or russe pour financer leur propre révolution. Corto Maltese arrive donc avec son vieil " ami " Raspoutine au beau milieu de ce guêpier où chacun tire les ficelles pour son propre compte. Corto n'étant pas le dernier à briller dans cet exercice.

Voilà, vous en savez suffisamment pour savoir si vous vous sentez mûrs pour monter dans ce train dont le terminus est à Vladivostok. Deux mots encore sur cet énigmatique personnage qu'est Corto Maltese. Un taiseux, gentilhomme de fortune, façon fort délicate d'appeler un malfrat toujours prêt à mettre la main sur un magot, quel que soit son origine ou son odeur.

Il semble mu par quelques vagues valeurs morales mais sujettes à une géométrie variable. Il n'hésite pas, si le besoin s'en fait sentir, à trucider deux ou trois bonshommes. Il est comme ça, Corto. Il sait parfois être grand seigneur ou délicat avec les femmes, mais il sait aussi être un vrai con antipathique. Je ne suis d'ailleurs pas certaine que je l'apprécierais plus que ça s'il se présentait sur mon palier...

C'est sans doute ce qui me surprend le plus du point de vue de la cohérence générale de la série. Comment quelqu'un d'aussi antipathique, douteux et pince-sans-rire, peut-il compter autant d'amis et de gens prêts à le recevoir ou à l'introduire dans ce que leur société à de plus secret et stratégique ? C'est ce dernier mystère que je vous laisse le soin de chercher à résoudre par vous-même car, vous l'avez deviné, ceci n'est qu'un avis, c'est-à-dire, bien peu de chose.

P. S. : Corto Maltese, le seul gars non vivant qui a réussi à coller sa gueule sur un flacon d'Eau Sauvage, aux côtés de Delon, Zidane et Johnny. Si c'est pas de la notoriété, ça ? Et le pire, c'est que le malheureux Corto n'a même pas touché le chèque du contrat publicitaire, lui qui ne crache pourtant jamais sur un petit paquet de pognon. Mais, à la vérité, peut-être n'aurait-il jamais accepté de voir sa tête placardée sur les arrêts de bus, c'est tellement loin de sa philosophie, tellement loin de Rimbaud et des légendes... Eau Sauvage ! Ha ! Ha ! Rien que le nom est risible. Comme si les sauvages se parfumaient !

Corto est évidemment tout le contraire de ça, tout le contraire de l'homme civilisé moderne, tout le contraire des bonus et des stock-options. Il doit sentir la sueur et la crasse. C'est un despérado, il ne tire pas de plans sur l'avenir (et encore moins de business plans), il vit l'instant présent. Il est comme Omar dans The Wire et c'est justement parce qu'il est tellement différent de l'homme moderne qu'il est si séduisant. Les hommes soumis qui sont des agneaux aimeraient tellement lui ressembler, mais ils n'ont pas les couilles pour ça. Ceci pouvant expliquer la renaissance du héros... avec de beaux petits dividendes à la clef !
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Inoubliable voyage de Corto en steppe sibérienne et rencontres fondatrices dans une Russie pré-révolutionnaire à feu et à sang .

Celle de Raspoutine, bien sûr, méchant comme la gale, attachant comme le lierre, surprenant comme le feu, perfide comme l'eau...Celle de Séménov, commandant les derniers russes Blancs sur le transsibérien avec sa légion d'ultras, celle de la belle duchesse Marina Séminova, sous sa chapka nuageuse d' ours blanc...

Corto trace son étrange route sans prendre parti: communistes engagés et enragés, triades chinoises opaques et au courant de tout,..et toujours, et partout les vers de Rimbaud, -cet alter ego maltesien- ceux de "Sensation" que le beau marin à la boucle d'oreille récite comme un mantra au milieu des tempêtes et des violences de l'Histoire..

Magique noir et blanc de gravure , d'eau--forte ou d'ombres chinoises...
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Corto Maltese et Raspoutine se lancent à la poursuite d'un train blindé rempli d'or. Mais ce trésor suscite bien des convoitises et les embuches ne manquent pas ! Corto avec son flegme coutumier enchaîne les aventures dans un superbe album haut en couleur !
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Corto Maltese en Sibérie... Tout est dit dans le titre : aventures, combats, machines folles, généraux fous, sociétés secrètes, trésor de guerre, romance... le sixième volume du marin maltais est un des plus fous au sens de péripéties et de retournements dans le scénario.

Hugo Pratt fait de notre marin un héros de western dans les neiges de la Russie éternelle au croisement de la Chine et de la Mongolie dans cette période d'avènement du bolchévisme. C'est intense, on ne s'ennuie pas (qui s'ennuie d'ailleurs à la lecture d'un Corto Maltese ?).

Une figure assez incroyable, chevaleresque (et assez folle) est le baron Roman von Ungern-Sternberg : Russe blanc, descendant des chevaliers teutoniques selon la belle Duchesse Seminova, ce général veut renverser les Bolchéviques et surtout créer son empire en Asie centrale. le lecteur se dira qu'Hugo Pratt a encore trouvé un personnage génial, sauf qu'il a réellement existé !

Les femmes sont aussi très présentes et pilotent encore ces hommes qui se courent après les uns les autres comme la Duchesse Seminova et Changhaï Li. On découvre encore un Corto fleur bleue pour cette "Lanterne rouge" qui aurait pu incarner la conclusion romantique de notre marin (n'en dévoilons pas plus).

L'oeuvre de Pratt fait de cette époque une (énième) ode à la liberté mais dans un monde où les frontières n'avaient finalement pas de signification. Les protagonistes passent d'un pays à un autre avec une telle facilité qu'on regrette ce monde perdu. Un monde qui ne ressemble en rien à celui que nous connaissons, si cadenassé derrière les frontières matérielles et technologiques qui contrôlent les mouvements des individus. Bien évidemment, Hugo Pratt ne connaîtra pas ce monde post-11 Septembre... (hormis dans la suite imaginée dans Océan noir par Bastien Vivès et Martin Quenehen).

Une note enfin d'humour surgit avec l'apparition de Raspoutine qui fait réagir Corto de manière très amusante. le duo légendaire se recompose pour ces aventures enneigées qui annoncent aussi La Maison dorée de Samarkand.
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» Corto est en Asie pour cette histoire en six chapitres : Les Lanternes rouges – le Prisonnier de Tchang – La Duchesse romantique – La Division sauvage – Ungern de Mongolie – La Fin du Dragon noir. le fond historique est celui de la guerre civile russe en Extrême orient où s'affrontent les rouges , les blancs (Semenov, von Ungern ..) , les Triades , les communistes… Un train d'or, de belles dames et le retour de ce cher Raspoutine , comme un poisson dans l'eau dans ces cercles de l'enfer . Peu d'ésotérisme et beaucoup d'aventure .Et toujours un dessin sublime .
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J'aime étaler dans le temps mes lectures de Corto Maltese, pas plus d'un ou deux albums par an, et c'est avec un réel plaisir que je retrouve à chaque fois notre aventurier.
On ne comprend pas tout dans celui-ci, la géographie de la région nous reste floue et mystérieuse, et les enjeux politiques et les imbrications entre toutes les factions sont parfois difficiles à saisir, du moins pour le novice en histoire asiatique du début du XXe siècle que je suis. Il est vrai qu'on a vite fait de se perdre entre les Rouges, les Blancs, les révolutionnaires mongols, la triade chinoise, les sociétés secrètes plus ou moins indépendantes, les seigneurs de la guerre, les Japonais, les Américains, etc. Mais c'est l'occasion d'apprendre des choses, comme toujours avec Corto, et j'adore ça ! Et puis certes, on se perd un peu, mais, comme dit l'autre, là n'est pas la question ! Une aventure de Corto Maltese se doit d'être un brin insaisissable ! J'ai savouré chaque planche.
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Il existe quelques génies de la bande dessinée et Hugo Pratt en fait indéniablement partie.
Raconter une aventure de Corto Maltese n'a pas grand sens car ce qui en fait l'intérêt c'est l'atmosphère qui règne dans ces pages de dessins, dans l'histoire évanescente mais tellement prenante.
Corto a un destin, mais il ne le maîtrisera jamais, à moins qu'il ne veuille pas le maîtriser. Parce que le voyage est tellement plus beau quand on se laisse balloter par les vagues et les courants.
Amis lecteurs de Corto, ne cherchez pas à comprendre les histoires, laissez vous porter, comme ce héros atypique, par le destin et ses méandres. La BD peut être une poésie.
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Magnifique.
le plus abouti des Corto ! le rendez vous avec L Histoire est magique, on y découvre toute cette période si complexe...
quelle époque formidable et surtout tellement centrale à toute l'histoire du XXeme sièce !!!
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Magnifique.
le plus abouti des Corto ! le rendez vous avec L Histoire est magique, on y découvre toute cette période si complexe...
quelle époque formidable et surtout tellement centrale à toute l'histoire du XXeme sièce !!!
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