Citations sur À la croisée des mondes, tome 2 : La tour des anges (84)
Mais ce que je veux savoir, c'est pourquoi les habitants de mon monde détestent la Poussière. Les Ombres, si vous préférez. La matière sombre. Ils cherchent à la détruire. Ils pensent qu'elle est maléfique. Moi, je crois plutôt que ce sont eux font des choses maléfiques. Je les ai vus à l’œuvre. Alors, les Ombres représentent-elles le bien ou le mal ?
Elle lut :
- "... capable d'être dans l'incertitude, le mystère et la doute, en oubliant l'exaspérante quête de la vérité et de la raison." Voilà l'était d'esprit qui convient. C'est une citation du poète Keats, au fait.
Will tira sa mère par la main, en lui disant :
- Allez, viens. Viens...
Mais sa mère traînait les pieds. Sa peur ne s'était pas dissipée. Will balaya du regard la rue étroite, baignée de la lumière du crépuscule et bordée de petites maisons toutes semblables, chacune derrière son jardinet et sa haie de buis. Les derniers rayons du soleil se reflétaient sur les fenêtres d'un côté de la rue et laissaient l'autre côté dans l'ombre. Le temps était compté. Les gens devaient être à table à cette heure et, bientôt, des enfants envahiraient les parages, des enfants curieux et bavards à qui rien n'échapperait. Il était dangereux d'attendre, mais Will ne pouvait rien faire d'autre que de convaincre sa mère, comme toujours.
Il y avait quand même quelque chose d'étrange dans cette situation : discuter avec une souris ! Mais pas plus étrange que de parler dans un téléphone, en fin de compte, car en vérité, il s'adressait à Lyra. Certes, la souris était un être indépendant ; toutefois, on retrouvait un peu de Lyra dans ses expressions, avec quelque chose de plus.
Les sorcières aidèrent à transporter les charrettes un peu plus loin sur la route, de l'autre côté du petit pont de pierre, loin du bosquet d'où avaient jailli les Spectres. Il fallut abandonner les adultes pétrifiés à l'endroit même où ils s'étaient figés, si douloureux que fût le spectacle de ces jeunes enfants s'accrochant à une mère qui ne réagissait plus à leurs sollicitations ou tirant la manche d'un père qui restait muet, le regard vide. Les plus petits ne comprenaient pas pourquoi ils devaient quitter leurs parents. Les plus âgés, dont certains avaient déjà perdu un parent ou assisté à pareille scène, affichaient un air lugubre et ne disaient mot. Serafina prit dans ses bras le petit garçon qui était tombé dans la rivière. Il réclamait son père en hurlant, les bras tendus par-dessus l'épaule de la sorcière vers cet homme silencieux, toujours planté au milieu de l'eau, indifférent.
N’existait-il qu’un seul monde finalement, qui passait son temps à rêver à d’autres mondes ?
- […] Pourtant, j’ai rencontré la folie, mais parsemée de grains de sagesse. Sans doute y avait-il beaucoup plus de sagesse que je ne pouvais m’en apercevoir. La vie est dure, monsieur Scoresby, et pourtant, tout le monde s’y accroche. p365
Les Spectres sont apparus par notre faute, notre seule faute. A cause de mes prédécesseurs: des alchimistes, des philosophes, des hommes de savoir qui effectuaient des recherches sur la nature la plus profonde des choses. Ils ont fini par s'intéresser aux liens qui unissent les plus petites particules de matière.
C'était une ville mercantile et riche, une ville de marchands et de banquiers. Nous pensions tout savoir, tout connaître. Alors, nous avons défait ces liens, et nous avons laissé entrer les Spectres.
Leur perception des choses s'étendait bien au-delà d'elle, tels des tentacules filamenteux, jusque dans les recoins les plus éloignés d'univers dont elle n'avait même jamais rêvé; et si ces anges lui apparaissaient sous une forme humaine, c'était parce que ses yeux s'attendaient à les voir ainsi. Eût-elle perçu leur véritable apparence, elle aurait découvert des architectures plus que des organismes, des sortes de structures gigantesques constituées d'intelligence et de sensations.
De minuscules parcelles de presque rien. Elles savaient ce qu'étaient ces objets. Tout ce qui était associé au travail humain et à la pensée humaine était entouré d'Ombres...