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Citations sur Les mouchoirs rouges de Cholet (12)

On n'utilisait jamais de sucre dans le quotidien mais un peu de miel du rucher familial. Le sucre des villes valait au kilogramme le prix du beurre, soit l'équivalent d'une journée de travail.

page 281
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Année 1818

La surprise fut générale lorsqu'à la messe du dimanche, la femme et la fille du maire-meunier apparurent avec, sur la tête, une espèce d'énorme papillon blanc. Elle éclipsa du même coup la cérémonie religieuse. Pour la première fois, la paroisse voyait de ces coiffes blanches qui, d'abord portées par la bourgeoisie rurale, comme un signe de différenciation, allaient en un demi-siècle envahir les campagnes et rivaliser de formes les plus cocasses, la Vendée comptant à elle seule vingt-cinq coiffes différentes.
Depuis cent ans, le port du bonnet de toile blanche, enserrant les cheveux, restait immuable. La coiffe empesée, ornée de tulle brodé, de dentelles et de rubans, ne sera à la mode que pendant un siècle mais elle marquera à tel point le costume paysan qu'on la croira vêtement traditionnel millénaire.

Ndl : Je dirais plus d'un siècle, nous sommes en 1818 et dans les années 1960/70, je voyais encore des femmes en coiffe qui entretenaient, munie d'une longue perche, les murs des bourrines ou des chaumières vendéennes à la chaux.
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- Village vendéen en 1796 après le passage des "Colonnes Infernales"

Maintenant que les grands incendies s'éteignaient, dans chaque village, les hommes veillaient à ne pas perdre les parcelles du feu. Un village sans feu signifiait un village mort. On ne recensait pas les individus mais les feux. Le feu était à la maison ce que l'âme était au corps. Longtemps resteront chevillés dans le souvenir de Dochâgne et de ses compagnons l'époque maudite où, dans la forêt, ils durent survivre sans feu, dans leurs bauges, et l'effroi à leur retour dans des villages aux cheminées muettes.
Il leur fallut réinventer le feu en faisant jaillir des étincelles avec des pierres dures. Et depuis, ce feu, ils le cultivaient, le dorlotaient. Ils se le passaient comme le Saint-Sacrement. Les braises étaient conservées sous la cendre, données, communiquées, emportées dans le creux de la main des hommes qui les passaient vivement d'une paume à l'autre pour ne pas se brûler. Il se faisait de perpétuels échanges, de maison à maison. Les femmes qui ne pouvaient entretenir un feu toute la journée venaient quémander chez leur voisine une pelletée de braise ou bien en replissaient l'écuelle de leur chauffe-pieds. L'hiver, on voyait partir de bon matin les bergères vêtues de leur cape de droguet, quenouille au côté, tenant d'une main un bâton, de l'autre la chaufferette en terre où les braises jetaient de petites lueurs rouges.
Une pièce sans cheminée s'appelait une chambre aveugle. Et dans les rares maisons qui disposaient de plusieurs pièces, une seule, la salle commune, ouvrait ses deux yeux, c'es-à-dire la chaleur et la lumière qui se perpétuaient dans la cheminée devant laquelle la maisonnée s'entassait pour la veillée.

Pages 47 - 48 (nous avons conservé le terme "foyer" comme par exemple "foyer fiscal")
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L'année qui suivit la visite de Napoléon en Vendée, au village deux appelés refusèrent de partir. On vit revenir les gendarmes et l'on crut d'abord qu'ils ramenaient Jacques-le-Tisserand. Mais non. Ils attachèrent les poignets des deux recrues par une corde fixée à la selle de leurs chevaux et s'en allèrent au pas avec leurs prisonniers.
Le lendemain, les deux conscrits revenaient très exaltés, racontant qu'en chemin, les trois gendarmes avaient été abattus à coups de fusil par des cavaliers portant un cœur rouge cousu sur leurs vestes. Il ne leur restait plus qu'à courir rejoindre le vieux curé dans la forêt. Ce qu'ils firent.
Le maire-meunier se mit dans tous ses états :

- Crétins que vous êtes! Vous ne savez pas que les parents des réfractaires doivent payer une amende plus grosse que vos terres qui ne sont même pas à vous. Qui paiera ?
La réponse fut bientôt apportée par les gendarmes tout neufs qui vinrent, cette fois-ci, en force : dix qu'ils étaient sur des chevaux gris. Et cette réponse frappa le maire-meunier de stupeur, d'indignation et de douleur : puisque les parents des réfractaires étaient insolvables, la commune paierait l'amende pour eux. Le seul contribuable de la commune étant le meunier-maire, c'est donc lui qui devrait régler la note. Le brigadier de gendarmerie trouvait d'ailleurs la plaisanterie amusante. Il disait en lissant sa grosse moustache rousse :
- Ca vous apprendra, monsieur le Maire, à faire observer la loi.

page 111
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Les deux Louise jetèrent tous les seaux qui se trouvaient remplis, afin que l'âme de Léonie ne risque pas de s'y noyer. Puis elles ouvrirent la fenêtre de la chambre pour que son âme puisse sortir.

On enveloppa la morte dans ce linge qui lui servait de linceul et, avant de lui recouvrir le visage, Dochâgne lui glissa dans la bouche une pièce de cuivre d'un liard pour qu'elle puisse payer à saint Pierre sa place au paradis.
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Jacques resta plusieurs années à Fontenay où il tissait ces mouchoirs de fil jadis achetés par les Espagnols pour les Amériques.
Le plus merveilleux de son récit ne tenait pas dans toutes ces aventures mais dans sa description de la plaine qui s'étend de Fontenay à Luçon avec ses champs de blé si grands qu'il faut appeler des moissonneurs de très loin pour les métives, formant comme une armée avec leurs faux sur l'épaule ; avec une récolte de grains si énorme que cinq cents moulins à vent tournent sans cesse leurs grandes ailes de bois dans l'arrondissement de Fontenay. Cette plaine sans arbres, plate, sans eau sinon au plus profond de la terre d'où on doit la puiser avec des seaux suspendus à des cordages ; cette plaine où le blé ondule comme les vagues de la mer que l'on devine au loin, derrière ses dunes de sable ; cette plaine opulente aux grandes maisons couvertes de tuiles romaines rouges ; cette plaine si différente, si contraire au bocage qu'elle paraissait en un pays très lointain, faisait rêver les villageois. Ils avaient du mal à comprendre qu'en descendant seulement pendant deux jours de marche vers le sud, ils arriveraient à ce pays de cocagne. Seuls les vétérans de 93, qui avaient participé à la prise et au pillage de Fontenay se souvenaient. Mais ils disaient que l'on ne pouvait vivre dans un pays sans arbres qu'en y perdant son âme ; la preuve : tous les plainauds étaient des patauds (républicains).

page 186
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(Après la signature de la paix entre le général en chef des Chouans, le comte d'Autichamp, "et le nouveau maître de la France, un certain Buonaparté") :

Maintenant que les grands incendies s'éteignaient, dans chaque village les hommes veillaient à ne pas perdre les parcelles du feu. Un village sans feu signifiait un village mort. On ne recensait pas les individus, mais les feux. Le feu était à la maison ce que l'âme était au corps. (...)
Il leur fallut réinventer le feu, en faisant jaillir des étincelles avec des pierres dures. Et depuis, ce feu, ils le cultivaient, le dorlotaient. Ils se le passaient comme le Saint-Sacrement. Les braises étaient conservées sous la cendre, communiquées, emportées dans le creux de la main des hommes qui les passaient vivement d'une paume à l'autre pour ne pas se brûler. Il se faisait de perpétuels échanges, de maison en maison. Les femmes qui ne pouvaient entretenir un feu toute la journée venaient quémander chez leur voisine une pelletée de braise ou bien en remplissaient l'écuelle de leur chauffe-pieds. L'hiver, on voyait partir de bon matin les bergères vêtues de leur cape de droguet, quenouille au côté, tenant d'une main un bâton, de l'autre la chaufferette en verre où les braises jetaient de petites lueurs rouges.
Une pièce sans cheminée s'appelait une chambre aveugle. Et dans les rares maisons qui disposaient de plusieurs pièces, une seule, la salle commune, ouvrait ses deux yeux, c'est-à dire la chaleur et la lumière qui se perpétuaient dans la cheminée devant laquelle la maisonnée s'entassait pour la veillée.
Avant la guerre, chaque foyer possédait un buffou, longue tige creuse en fer forgé terminée par une petite fourche servant de tisonnier. Le buffou servait de soufflet. On s'agenouillait devant l'âtre et on buffait le feu en soufflant dans la tige de fer. Depuis la fin des combats, des canons de vieux fusils servaient de buffou ou, à défaut, des tiges de sureau.
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Dans toutes les provinces, la Restauration encourageait la grande propriété qui permettait une modernisation des méthodes de culture et de l'outillage immuables depuis le moyen-âge. Expulser de leurs borderies des paysans qui ne travaillaient que pour leur auto-subsistance ou des métayers trop peu productifs, permettait de plus de récupérer pour les nouvelles usines urbaines une main d'oeuvre docile et bon marché. Tout un transfert de population s'opérait ainsi, les pauvreté des campagnes se déversant dans la misère du prolétariat urbain.
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Un village sans feu signifiait un village mort. On ne recensait pas les individus, mais les feux. Le feu était à la maison ce que l'âme était au corps.
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La maie fut renverse et la farine répandue sur la terre battue. Un gendarme se glissa sous le manteau de la cheminée aux caches maintenant bien connues et, furieux de ne rien trouver, décrocha d'un coup d'épaule la crémaillère forgée par Chante-en-hiver, faisant tomber du même coup la lourde marmite de fonte qui écrasa le pot en terre à trois pattes, où bouillottaient les mojettes.
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