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Citations sur Derborence (0)

"Une voix d'homme, une voix de femme.
Et c'était elle et c'était lui; maintenant on voyait que l'homme aidait la femme dans les passages difficiles; là où la roche faisait mur, il sautait en bas le premier, il la prenait dans ses bras.
Et, au fin sommet de la paroi, la tranche du glacier ruisselait de lumière comme un rayon de miel; mais derrière ceux qui venaient et à mesure qu'ils venaient, tout le fond de la combe entrait définitivement dans la nuit et dans le silence, dans le froid et dans la mort."
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Tout à coup, la ligne du pâturage, qui s’affaisse dans son milieu, se met à tracer dans rien du tout sa courbe creuse. Et on voit qu’on est arrivé parce qu’un immense trou s’ouvre brusquement devant vous, étant de forme ovale, étant comme une vaste corbeille aux parois verticales, sur laquelle il faut se pencher, parce qu’on est soi-même à près de deux mille mètres et c’est cinq ou six cents mètres plus bas qu’est son fond.
On se penche, on avance un peu la tête.
Un peu de froid vous est soufflé à la figure.
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Derborence, le mot chante doux ; il vous chante doux et un peu triste dans la tête. Il commence assez dur et marqué, puis hésite et retombe, pendant qu'on se le chante encore, Derborence, et finit à vide, comme s'il voulait signifier par là la ruine, l'isolement, l'oubli.
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Et quelque chose, là, éclairait doucement : une frange lumineuse, vaguement transparente, avec des reflets verts et bleus et une lueur comme le phosphore : c'était la cassure là-haut de la glace, mais elle était à cette heure, elle aussi, pleine d'un grand silence et d'une grande paix. Rien ne bougeait plus nulle part sous une cendre impalpable qui était la lumière de la lune ; on la voyait flotter mollement dans les airs ou être déposée en mince couche sur les choses, partout où elle avait trouvé à s'accrocher.
-- Là-haut...
Séraphin tenait toujours le bras levé. Il a dit :
-- Oui, là où ça surplombe. Mais il semble bien que, pour ce soir, ça soit fini.
Il avait une grande voix dans le silence.
-- Oh ! a-t-il repris, c'est que ça est toujours tombé, d'aussi loin qu'on se souvienne.
Il avait rabaissé le bras :
-- Les vieux chez nous en parlaient de leur temps. Et ils étaient tout petits encore qu'ils entendaient déjà les vieux en parler... Seulement, voilà, c'est capricieux... Dommage...
On entendait de temps en temps le tintement d'une clochette au cou d'une chèvre quelque part dans les environs. Les chalets étaient de-ci de là répandus. C'est des cabanes en pierre sèche. Une des pentes de leur toit était tout enneigée de lune (...)

C.-F. RAMUZ, "Derborence", 1934 : chapitre I (pages 23-24 de l'édition de poche -- coll. "Les Cahiers Rouges", Grasset, 1936)
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Un pâtre, qui avait disparu et qu’on croyait mort, avait passé plusieurs mois enseveli dans un chalet, se nourrissant de pain et de fromage…
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Le petit berger des chèvres soufflait dans sa corne.
Ils allumaient le feu dans les chalets, partout en haut des cheminées ou par les trous des portes, un joli petit plumet bleu balançait doucement dans l'absence de tout courant d'air.
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La mousse, d'un pinceau lent et minutieux, a peint en jaune vif, en gris sur gris,
en toutes sorte de verts, les plus gros des quartiers de roc, ils nourrissent dans leurs fissures plusieurs espèces de plantes et de buissons,airelle,myrtille, épine- vinette, aux feuilles dures, aux fruits ligneux, qui tintent dans le vent doucement comme des clochettes.
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Ces fonds, en ce temps-là, étaient dès le mois de mai tout peints d'une belle couleur verte, car là-haut, c'est le mois de mai qui tient le pinceau.
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Ce fut tout; il s'était tu. Et, à ce moment-là, Séraphin s'étant tu également, on avait senti grandir autour de soi une chose tout à fait inhumaine et à la longue insupportable: le silence. Le silence de la haute montagne, le silence de ces déserts d'hommes, où l'homme n'apparaît que temporairement : alors, pour peu que par hasard il soit silencieux lui-même, on a beau prêter l'oreille, on entend seulement qu'on n'entend rien. C'était comme si aucune chose n'existait plus nulle part, de nous à l'autre bout du monde, de nous jusqu'au fond du ciel. Rien, le néant, le vide, la perfection du vide; une cessation totale de l'être, comme si le monde n'était pas créé encore, ou ne l'était plus, comme si on était avant le commencement du monde ou bien après la fin du monde. Et l'angoisse se loge dans votre poitrine où il y a comme une main qui se referme autour du cœur.

[...]

S'étant habitués maintenant à peu près au manque d'air, bien que toussant encore part moments, ils se tenaient là, ayant commencé une conversation à voix basse; et ça grondait sourdement sous eux pendant ce temps; et, comme ils avaient le ventre appliqué contre la montagne, ils entendaient avec le ventre les bruits de la montagne qui montaient à travers leur corps jusqu'à leur entendement.
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Et l'angoisse se loge dans votre poitrine où il y a comme une main qui se referme autour du coeur.
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