Le Journal intime de Georgia Nicolson, tome 1 : Mon nez, mon chat, l'amour... et moi

On part faire la fête en bande. Mon père tient absolument à venir me chercher à minuit. Inutile de discuter, tout ce que j’obtiens de lui, c’est : « Tu as bien de la chance. De mon temps… bla bla bla. » Et là, on est reparti pour le Moyen Âge qui d’après lui s’appelle les années soixante-dix.

Au moment où j’entrais dans la cuisine, papa et maman ont brusquement cessé de parler avec un air atrocement sournois. Je vous rassure tout de suite, j’adore qu’ils arrêtent de parler quand j’entre dans une pièce. En fait, j’adorerais ça si le cas s’était déjà présenté.
— Dis-moi, Gee, ça te dirait de découvrir le monde ? me demande maman.
Et moi :
— Si tu crois que tu vas réussir à me convaincre d’aller voir tante Kath à Blackpool pour Noël, tu te fourres le doigt dans l’œil.

Plus tard, je pense que je serai journaliste à Cosmo. C’est clair que pour ce boulot, un QI négatif est chaudement recommandé. Note que pour être mec c’est pareil. J’ai le choix, donc.

19h. Papa me tape sur les nerfs grave. Ça fait des heures qu’il fait le même manège. Il se pointe à ma porte, il me regarde, il se marre comme un fou et il disparaît… pas pour longtemps. Il a même fait monter oncle Eddie. Non mais, je suis quoi au juste ? Sa fille ou une attraction foraine ?

22h30. Peut-être qu’ils repousseront cette nuit. En combien de temps ça repousse des sourcils ?
Vendredi 28 août.
11h. Ils n’ont pas repoussé.

— Si je dois marcher, pourquoi est-ce qu’on n’y va pas à pied avec Jas et qu’on oublie l’auto ?
Il a pris cet air pincé que prennent les pères quand ils se croient intelligents.
— Parce que je veux être sûr que vous êtes bien arrivées. Et qu’en plus je ne veux pas que tu traînes le soir dans la rue.
J’y crois pas !
— Qu’est-ce que je pourrais bien faire le soir dans la rue, déguisée en olive fourrée… taper l’incruste dans une soirée mondaine ?

Peter a ouvert la porte. Dix-sept ans, blond. Le genre léthargique, pas moche mais catégorie Boyzone. Il mâche du chewing-gum. J'espère qu'il l'enlève quand il exerce ses talents sinon je risque de m'étouffer. Il y a des petits rires crétins du côté de la haie. Peter les a entendus mais il n'a pas l'air perturbé outre mesure.

Dimanche 30 août.
11h. Merci mon Dieu, ils sont partis. Enfin ! C’est quoi toutes ces foutaises de famille heureuse ? Tous ces « On devrait faire des choses ensemble » ?
Comme je l’ai fait remarquer à papa :
— On a déjà pas de bol de se retrouver coincés tous les quatre dans la même baraque, alors pourquoi faudrait-il se pourrir la vie encore plus en allant traîner tous ensemble dans une jardinerie ?

Plus tard, je pense que je serai journaliste à Cosmo. C’est clair que pour ce boulot, un QI négatif est chaudement recommandé. Note que pour être mec c’est pareil. J’ai le choix, donc.

Maman refuse que papa ait une cabane de jardin depuis qu’il a transformé la sienne en QG pour mouches bleues en oubliant ses asticots pour la pêche dedans.
L’autre jour quand l’électricien est venu réparer le frigo qui avait explosé, il a demandé à maman :
— Vous pouvez me dire quel est le dingue qui a branché ce frigo ? Y a quelqu’un qui vous en veut dans votre entourage ?
Et bien sûr, celui qui avait fait le branchement, c’était papa.