Deuxième tome de la deuxième trilogie, si l'on peut dire, des enfants particuliers. N'y allons pas par quatre chemins : pour moi, c'est une déception. Oh, cela se lit toujours aussi bien et aussi vite, là n'est pas le problème. Mais dans la narration tous les choix effectués sont, en ce qui me concerne, précisément ceux que je ne voulais pas voir.
Tous les éléments qui renouvelaient l'histoire et l'univers sont évacués les uns après les autres. La remise en cause du pouvoir des Ombrines et de leur mainmise sur les instances politiques du monde des particuliers ? A la trappe. On n'en entendra plus parler. Mais surtout l'histoire stagne complètement, voir revient en arrière. On croyait les Creux et Caul définitivement vaincus, qu'une nouvelle apocalypse se profilait. Une mystérieuse société secrète de Normaux nourrissant de noirs dessins envers les Particuliers menaçait. Tout ça aussi, à la trappe. On revient aux méchants précédents. La société secrète ? Une ruse. L'apocalypse ? C'est Caul qui le fera.
Le plus décevant reste tout de même la fin de l'emblématique relation entre Jacob et Emma. On espérait qu'Emma, qui s'est remise à grandir rappelons-le, devienne adulte, fasse son deuil de son ancien amour (après cinquante ans, tout de même !) et se consacre au nouveau. Raté. A la place, Jacob s'amourache de la nouvelle venue, Nour. Cette dernière prend grosso modo la place d'Emma dans la narration – en moins bien. Visuellement, leurs pouvoirs sont très proches : l'une manipule le feu, l'autre la lumière. Bien que plus impressionnant sur le papier, celui de Nour s'avère beaucoup moins flamboyant (c'est le cas de le dire), et sans doute pour les démarquer, utilisé essentiellement de manière défensive. Trop ressemblante mais moins complexe, cette nouvelle relation est donc moins intéressante à tout point de vue. Il faut supposer que l'auteur n'était pas à l'aise avec cette histoire d'adolescente amoureuse du petit-fils après le grand-père.
Les limites et les incohérences deviennent aussi de plus en plus évidentes. Peu des nouveaux particuliers imaginés sur la base de vieilles photos (le dada de l'auteur) sont intéressants. Les enfants continuent joyeusement d'affronter des hommes faisant deux fois leur taille et dotés de pouvoirs et/ou d'armes beaucoup plus dangereuses que les leurs – et de s'en sortir haut la main. Et ils continuent de se jeter avec enthousiasme dans tous les pièges surtout les plus grossiers.Ransom Riggs semble donc avoir manqué de courage, fait machine arrière sur tout ce qu'il avait pu introduire de nouveau, et revenu sur la position de départ en expurgeant un peu l'histoire de ce qui le dérangeait. Malheureusement, c'était aussi le plus intéressant.