Elle avait eu des ambitions, des aspirations, des rêves. Elle voulait devenir chanteuse, une star. La nature l’avait dotée d’une belle voix, qu’elle avait travaillée et exploitée avec succès.
L’expérience lui avait appris à aller droit au but, au lieu de tourner maladroitement autour du pot : elle avait trouvé une clé, ignorait ce qu’elle ouvrait – il n’y avait aucune honte à dire la vérité.
Ils filaient alors le parfait amour. Oui, il fallait s’en souvenir, chérir la mémoire de ces bons moments. Les souvenirs étaient précieux lorsqu’on se retrouvait veuve à vingt-quatre ans. Et, de surcroît, criblée de dettes. Elle avait été victime d’une terrible tromperie.
Les notaires, les avocats, les comptables et les agents du fisc lui avaient tout expliqué : fonds spéculatifs, hypothèques, emprunts toxiques. Ils s’exprimaient dans un jargon qu’elle ne comprenait pas davantage que le chinois.
L’homme rencontré cinq ans plus tôt par une belle soirée d’été l’avait arrachée à son monde et transportée dans un univers de rêve. Il l’avait traitée comme une princesse, emmenée dans des lieux qu’elle pensait ne jamais connaître autrement que par les romans ou le cinéma. Et il l’avait aimée. S’en souvenir était important. Il l’avait aimée, désirée, et lui avait offert tout ce qu’une femme pouvait souhaiter.
L’argent ne faisait pas le bonheur, se rappela-t-elle en feuilletant une liasse de factures : costumes, chaussures, restaurants, chambres d’hôtel… jets privés. Le luxe n’était qu’un plaisir factice.