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Critiques filtrées sur 5 étoiles  
Je me regarde dans le miroir qui reflète les nuages gris planant dans la pièce. Il y a quinze ans, j'étais beau. J'avais des femmes. Je me pavanais avec arrogance dans le monde. Aujourd'hui… aujourd'hui…

Regardez-moi… Je vis dans un 'Boarding Home' qui put la pisse et la merde au milieu des fous. Moi qui à quinze ans avait lu le grand Proust, Hesse, Joyce, Miller et Mann. Et Hemingway. Sacré auteur cet Hemingway. Un jour, je serais comme lui. Mais maintenant, voilà où j'en suis. Dans une maison de fous. A Miami. Cuba, ce n'était plus possible. Ici, c'est pire. Mais au moins ici, je suis libre. Libre de vivre au milieu de débris humains, libre de lire mon recueil de poètes anglais, libre d'aller pisser au milieu du réfectoire, libre de prendre Hilda par derrière, même si cela lui fait mal à cette vieille suintant la pisse. Miami, le 'Boarding Home', cette maison qui abrite les fous et les gars comme moi, des réfugiés de Cuba. Un jour, je partirai. Il le faut, si je veux retrouver le chemin de l'écriture, la voie de l'espoir et celle de l'amour. Un jour… Pour le moment, laissez-moi vous présentez mes compagnons de mauvaises fortunes, tous déchus dans cet hospice puant et répugnant. Laissez-moi vous ouvrir la porte, il y a René et Pepe, les deux débiles mentaux ; Hilda, la vieille décatie qui urine continuellement dans ses robes ; Pino, un homme gris et silencieux qui fixe l'horizon ; Reyes, un vieux borgne dont l'oeil de verre suppure sans cesse un liquide jaunâtre ; Ida, la grande dame déchue ; Louie, un yankee vigoureux au teint olivâtre qui hurle sans arrêt comme un loup pris dans la folie ; Pedro, un vieil indien, peut-être péruvien, témoin silencieux de la méchanceté du monde ; Tato, l'homosexuel ; Napoléon, le nain ; et Castano, un vieillard de quatre-vingt-dix ans qui sait seulement crier : « Je veux mourir ! Je veux mourir ! Je veux mourir ! » Cela fait du beau monde n'est-ce pas… dans ce 'Boarding Home'.

Si vous voulez comprendre les fous, lisez ce roman de Guillermo Rosales.

Si vous voulez comprendre les réfugiés, lisez ce roman.

Si vous voulez comprendre les cubains, lisez ce roman.

Si vous voulez juste prendre un bon coup de poing dans l'estomac, là où ça fait mal, là où ça déchire votre âme et pompe votre énergie, précipitez-vous sur ce petit roman (116 petites pages qui font mal) « Mon Ange » du cubain Guillermo Rosales. Une vraie réussite, un immense coup de coeur, surtout si voir des fous déféquer au milieu de la salle, uriner sur eux ou sortir leur pénis pendant le petit-déjeuner (à chaque page – ou presque) ne vous rebutent pas.

Sur ce, je vais allez pisser en méditant sur cette pensée : [...]
Lien : http://leranchsansnom.free.f..
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Je dis que ce livre est sauvagement torturé, culotté et brutal, courageux, sordide, amoral et détraqué. Je dis qu'il a l'odeur fauve de cuir crasseux d'un ring des quartiers portuaires de Valpo, le goût aigre et dépravé du vomi dont la gueule béante des exilés de tout recouvre les détenus. Je dis qu'il frappe d'humanité, de vide, de soumission, d'absence, de folie, de survie à tout prix comme les bastons scélérats à creux de dix mètres au large d'Unimak Island, je dis que ce livre arbore cette tignasse pouilleuse de petit saligaud qui casse les vitres de nos évidences en disant : c'est pas moi, qu'il purge les entrailles de nos vies et prend salement nos apparences à la gorge, tel un agressif souteneur à chaussures bicolores guetterait son prostitué cheptel en arpentant les artères nicaraguayennes de Belo Horizonte, je dis que ce livre n'arrondit jamais les angles de ses méfaits littéraires, qu'il éructe une envie d'échappée belle aussi vaine que la menace d'un poing rongé d'arthrose, qu'il pue l'urgence angoissée d'un mauvais matelas maculé du foutre de tous les autres avant moi. Je dis que ce livre crache l'existence par tous les orifices de ses infamies et de ses espoirs mutilés de guerre perdue d'avance. Je dis que ce livre est épouvantable, au sens carnassier du terme, qu'il se trémousse de perversion, d'enfermement et de vitalité à la façon d'une douteuse entrecuisse trop chère payée, qu'il saoule d'humanité raturée aussi frelatée qu'un rhum des bas-fonds de Las Reglas, je dis que ce livre n'a pas la grâce aristocratique d'une grand voile mais l'épaisse vaillance de la plus rageuse des voiles d'avant : ses mots claquent aussi fort qu'un brave Tourmentin dans la bave écumante du gros temps. Je dis que ce livre bande comme el hijo de la Gran Puta, qu'il est aussi suicidé que le fantôme noyé de la petite nonne dominicaine au ventre gonflé de promesse de l'île de Chacachacare, qu'il arnaque comme on quitte furtivement dans la moiteur profanée du matin un lit qu'on ne voulait pas défaire, qu'il est de l'infecte et noble race des mafieux qui refusent tout repentir, que sa lucidité fait battre nos tempes migraineuses d'une cuite trop longtemps solitaire, qu'il brûle sans sommation comme l'or impur d'un soleil achève les imprudentes coques éventrées des traîtres chenaux de Hog Island.
Je dis enfin que ce petit diamant brut violemment acéré est de la trempe de ceux qui ne se laissent jamais polir, carajo.
Lien : https://tandisquemoiquatrenu..
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Je ne connaissais pas l'histoire des "boarding rooms" à Miami, ces "asiles" où étaient enfermés les exilés cubains qui devenaient, à leur arrivée aux Etats-Unis dans les années 70-80, des sortes de parias placés par leurs familles dans ces institutions, à défaut de pouvoir (et de vouloir) les aider à s'intégrer dans la société américaine. Ce court roman (120 pages environ) relate donc l'histoire d'un jeune homme, William (l'alter-égo de Guillermo Rosales), qui va passer des années dans un de ces "boarding rooms". Ce dernier y raconte son quotidien, mais aussi et surtout les magouilles du propriétaire des lieux (qui vole les pensions des locataires), son manque d'humanité et la descente aux enfers de certains exilés cubains qui ont quitté la dictature castriste et échappé à la misère, mais qui doivent faire face à présent à l'incompréhension, voire à l'abandon de ceux qui les ont précédés. Pas étonnant que ce roman ait longtemps été "échangé sous le manteau". Avec force et violence, "Mon Ange" dénonce le désoeuvrement et le désespoir de l'exilé.
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Une fois n'est pas coutume je commencerai par vous parlez de l'auteur car il le faut pour comprendre au mieux cette oeuvre terrible.

Guillermo Rosales est un écrivain cubain né en 1949. A l'instar de son personnage, William Figueras, il a fuit Cuba pour trouver refuge comme beaucoup de compatriotes à Miami et porte sur "ces triomphateurs" un regard qui n'a rien de tendre. Considéré comme schizophrène dès son plus jeune âge, il va errer d'hôpitaux en foyers et finira par mettre un terme à sa vie après avoir détruit presque la totalité de son oeuvre. Il ne reste que deux romans et quelques nouvelles.

Il y a dans Mon ange une forte teneur autobiographique. William Figueras, arrive la fleur au fusil à Miami pour ne rencontrer qu'une seule fois les membres de sa famille exilées qui ne veulent pas de ce canard boiteux qui entend des voix. Seule sa tante, l'hébergera durant trois mois avant de céder à la pression et de l'envoyer dans un "boarding home", sorte d'asile pour les reclus de la société. On sent pourtant bien qu'il n'y a pas sa place ce jeune homme intelligent, féru de littérature qui se promène avec son recueil de poésies anglaises mais rien ne peut arrêter la machine à broyer de cet univers hallucinant ...

C'est un roman bouleversant dont on ne se remet pas facilement et qui me hantera longtemps. Prendre conscience du sort de ces laissés pour compte et les voir se heurter à ses murs d'injustice et d'incompréhension les entraînant dans une spirale de folie et de violence sans aucun espoir d'en sortir ... C'est dur, révoltant, ça interroge ... Il fallait le vivre de l'intérieur, il fallait l'écrire !
Lien : http://depuislecadredemafene..
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Il y a du Kafka dans ce roman court et dense où se mêlent des prédispositions à la folie et les bouleversements mentaux induits par la dictature castriste dans l'île de Cuba. Extrêmement bien écrit, cet ouvrage reste modéré dans le ton.
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C'est en lisant Arenas que j'ai découvert Rosales. de la même génération que le précédent, Guillermo Rosales s'est nourri du même climat dictatorial, et tout cela se ressent dans les thèmes de son ouvrage : la violence, l'exil, la souffrance, la déchéance.
Dans ce court roman, l'action ne se passe pas à Cuba, mais à Miami, lieu naturel d'arrivée des milliers de Cubains qui ont pu échapper au régime de Fidel Castro.
Avec une écriture incisive, sans décorations inutiles, brute, en peu de pages, Rosales réussi à montrer la misère humaine ; une misère physique, et intellectuelle.
Mais tout cela se fait sans pathos, et c'est la force de cet ouvrage.
Il m'est difficile d'en dire plus sans tout dévoiler, et sans raconter. J'ai découvert une écriture puissante, par hasard.
Osez l'aventure , cela en vaut la peine. Vraiment !
Lien : http://leblogdemimipinson.bl..
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William Figueras, alter ego de Guillermo Rosales, a fui les geôles du régime cubain dont il rejette tout. Arrivé à Miami, il est accueilli par sa famille "américaine". Mais il vomit ces "triomphateurs". D'emblée, il est interné dans un asile psychiatrique. La dernière de ses tantes à le soutenir par solidarité familiale finira par le laisser dans un "boarding home, une maison des déchets humains selon lui. Maison que n'importe qui peut ouvrir à condition d'obtenir la licence de l'état et de suivre un stage paramédical : autant dire une affaire comme une autre où des personnes sans scrupules, sans morale, sadiques "font du fric" sur le dos de personnes abandonnées et vulnérables. C'est l'antichambre de l'enfer, où on souffre et où on fait souffrir, où quand on voit une lumière, un espoir, la société dans son ensemble, fait tout pour étouffer les velléités de normalité, où la seule issue semble être la mort.
Un récit court sans concession, dans un style simple qui donne plus de force aux mots.
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