Attention, ENORME coup de coeur !!!
J'explique l'envoutement ressenti pour ce triptyque Young adult (qui appartient réellement à ce registre, contrairement au cycle « Un palais d'épines et de roses » de Sarah J.
Maas).
L'intrigue gravite autour des deux personnages principaux : Kestrel, jeune valorienne de 18 ans, et de Arin, jeune herrani de 19 ans… Un vrai Roméo et Juliette à la sauce fantasy, l'une appartient au peuple des oppresseurs, des occupants tandis que l'autre est devenu esclave sous le joug des valoriens. La romance est sublime, naissante, mais jamais l'auteure ne rentre dans des détails citronnés.
D'un côté, nous avons donc Kestrel, beauté blonde valorienne, aux yeux brun clair et à la peau pâle. Les Valoriens sont de ceux qui conquièrent, vivent dans la fierté de leurs victoires, et de celles à venir, forment leurs jeunesses au combat dans une soif de conquête dictée par un empereur machiavélique, égocentrique se plaisant à manipuler ses sujets. Leur honneur, leur parole est de fer, et cette société, carcan rigide, laisse peu de libre-arbitre : à 20 ans, il faut soit s'engager dans l'armée, soit se marier.
Kestrel a toujours été conditionnée par les pratiques de son peuple, sans vraiment chercher à les remettre en question, même si elles ne lui conviennent pas. Elle voue, en effet, une admiration sans bornes à son père, le général Trajan, bras droit de l'empereur et grand stratège, toujours en quête de sa reconnaissance, de son approbation. Or, elle ne parvient pas à coller parfaitement à l'image valorienne d'excellence que souhaiterait ce dernier. Il nourrit beaucoup d'espoirs envers sa fille unique, ambitionne le meilleur pour elle. Il aimerait tant faire d'elle une guerrière hors pair… Malheureusement, Kestrel s'avère être une piètre combattante malgré des heures d'entraînement… Non, le domaine dans lequel elle excelle, c'est la stratégie militaire : son intelligence, sa finesse et ses capacités d'observation la servent sans pareil. Tout n'est donc pas perdu.
Oui mais… elle excelle aussi dans un autre registre : le piano… Or, la pratique des arts est l'apanage des oisifs, des esclaves car considérée sans valeur dans la culture guerrière valorienne. Elle joue donc en secret, quand son père est sur le front ou la nuit… Mais son père n'est pas dupe. Il sait, tolère mais n'approuve pas.
Le jeu sous toutes ses formes connait aussi les faveurs de Kestrel : mettant en pratique ses talents de stratège, c'est une joueuse exceptionnelle, adepte du jeu de plateau très en vogue « Crocs et Venins ». Elle se plait à défier et battre les personnes qu'elle méprise.
Arin, jeune esclave brun aux yeux gris, la peau bronzée à force de travaux de plein air, appartient au peuple herrani : autrefois les siens étaient de fins navigateurs, marchands, appréciant l'art sous toutes ses formes.
Il excelle dans le chant mais tait ce don depuis bien longtemps. Il incarne, selon moi, le héros chevaleresque. Son code d'honneur est indéfectible, il est courageux, très intelligent et fin. Je n'en dis pas plus car le récit lève peu à peu le voile sur les différences facettes de cette personnalité hors du commun et si touchante.
L'action se déroule dix ans après la conquête de la Herranie par les valoriens. Ses habitants sont donc réduits en esclavage sur leurs propres terres. Arin n'a pas oublié le jour où il a tout perdu. Il nourrit une haine sans bornes aux Valoriens et à tout ce qu'ils représentent : la soif de pouvoir, la brutalité, l'humiliation perpétuelle de son peuple depuis. C'est donc de la défiance qu'il éprouve lorsqu'il rencontre Kestrel la première fois. Elle incarne le mal valorien à elle seule : l'arrogance, tout ce à quoi il a injustement renoncé alors qu'il n'était qu'un enfant. Leur première rencontre les place dans une position diamétralement opposée sur l'échiquier social : Kestrel, accompagnée de son amie de toujours, Jess, se ballade en ville quand elle tombe sur le marché aux esclaves. Animée par une curiosité inhabituelle, elle jette un oeil à l'esplanade sur laquelle va se dérouler la vente d'Arin. Mue par une envie qui la dépasse, elle enchérit sur lui et finit par emporter la mise à un prix indécent…
Je m'arrête là car j'en dévoilerais trop si je m'attardais davantage sur le déroulé de l'histoire.
Tout m'a charmé : l'histoire de leur rencontre d'abord… Deux univers opposent nos deux héros. On se doute qu'un lien fort finira pas les unir car ils se retrouvent par l'esprit tout d'abord et, même si le texte le suggère par petites touches, on se doute qu'ils s'attirent aussi physiquement…
Jamais l'auteur ne nous prend pour des imbéciles, rien n'est facile pour Arin et Kestrel. Tout les sépare. Les jalons de l'intrigue sont mis progressivement en place. On sait qu'Arin est plus qu'un simple esclave. On sait que Kestrel a une personnalité forte, transcendant les codes valoriens, qu'elle détonne par certains côtés et que peu à peu elle doute… Ce qui n'échappe pas à l'oeil observateur d'Arin… On espère tellement que ces deux là se rapprochent… Ils sont tellement différents et semblables à la fois !
J'ai adoré leurs parties de crocs et venins et leurs enjeux… C'était très subtile et tellement jubilatoire !
Les émotions des deux héros bouillonnent, le trouble respectif qu'ils ressentent l'un envers l'autre subtilement traduit : ils sont si fiers qu'ils ne laissent affleurer qu'une infime part de l'agitation intérieure qui les bouleverse, agite, détruit, ronge… Car ils savent que le jeu auquel ils se prêtent n'est pas anodin… Tout passe par le regard, les joutes verbales. Il y a un respect mutuel naissant entre ces deux-là dans le premier tome. Jamais il cela n'est abordé frontalement, en cela, nous sommes dans de le registre young adult. L'auteur nous fait confiance pour deviner, par nous même, leur émoi.
Les personnages secondaires assaisonnent ce plat déjà fortement épicé grâce à la présence magnétique d'Arin et Kestrel. L'ombre menaçante du général plane au-dessus du jeu auquel se livre nos deux jeunes gens. On se doute que le rôle de ce personnage prendra de l'ampleur dans les tomes suivants… Jess, l'amie de Kestrel m'a paru superficielle, égocentrée, sans jamais remettre en question les méfaits de son peuple, je ne m'y suis pas attachée. La personnalité enjôleuse et enjouée de Ronan, son frère m'a plu.
Enfin, l'auteure est documentée, et pour cause, quand on se penche sur sa biographie, on apprend qu'elle a été professeur de littérature et d'histoire, elle nous révèle qu'elle a su s'entourer pour nous décrire les différentes tactiques et manoeuvres décrites dans ce roman et dans les suivants.
Bref, j'ai complétement adhéré ! Je suis passée au second tome illico presto !
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