Payer la terre

Il n'y a rien à dire de plus quant aux horreurs qui ont été commises dès la découverte des Amériques jusqu'à notre époque contemporaine. Tout est si effroyablement horrible, si méthodiquement orchestré et savamment perpétué qu'il serait de bon ton de se demander si nous apprenons quelque chose de notre histoire ou si l'humanité, collectivement, se plait à n'en avoir cure.

Enquête journalistique en BD, Joe Sacco est proche de son sujet, évite le misérabilisme et sait mettre en valeur les contradictions et faiblesses de la nature humaine (quelles soient natives américaines ou occidentales). C'est édifiant et instructif, glaçant, souvent, comme désolant.

Là où le bat blesse, c'est dans la forme du récit. Je ne suis pas très client des enquêtes en BD, le média n'apporte pas grand chose d'autre que de proposer du visuel plus ou moins pertinent ou prétexte à l'exposition d'un sujet (telle que l'enfilade de visages qui posent "face caméra"). C'est une BD où il faut lire, beaucoup.

Aussi bavard que technique (l'homme blanc et le diable sont dans les détails d'un juridique désincarné) le propos peut-être assommant par son immorale justesse légaliste ou par l'extrême obséquiosité des manoeuvres politiques à enculer les mouches et créer du malheur.

Au moins cela permet de porter le sujet auprès de lecteurs (dont je fais honnêtement partie) qui n'ouvriraient en aucun cas un essai sur "Les conditions de colonisation et l'impossible décolonisation des natifs américains des territoires du Nord-Ouest Canadien". En cela, ce genre d'oeuvre est nécessaire, puissante et digne d'exposition.

Il n'est pas possible de sortir de cet ouvrage sans le sentiment nauséeux d'un immense gâchis et d'un mépris sans borne pour "le meilleur" de notre civilisation.

BD-reportage où sont partagés les récits de l'auteur et journaliste américain Joe Sacco qui est allé à la rencontre des Dene (signifiant "peuple") habitant un vaste territoire du nord-ouest du Canada, grand comme la France et l'Espagne, mais peuplée de seulement 45 mille personnes.

Ses propos sont intéressants, instructifs, parfois techniques, mais le rythme lent. Malgré les nombreuses tentatives, c'est avec regret que l'épilogue n'a pas été atteint.