Citations sur Les belles âmes (14)
Enfant, il est pris, dit-il, entre une mère agenouillée et un père militant communiste. Il devient, pour venger sa mère, un militant agenouillé. Et entre au séminaire à dix-huit ans. Où il tourne à l'obsédé sexuel. Car tout, au séminaire, est conçu pour vous faire tourner à l'obsédé sexuel. Le silence et la solitude propices aux mirages charnels, l'absence cruelle de toute figure ayant forme de femme, les pénitences sadiques imposées par les pères préfets et les messes sempiternelles pendant lesquelles les imaginations salaces s'enflamment jusqu'au délire. Tout.
Ceci n’est une façon d’achever un roman, j’entends déjà les reproches. Le bus est en rade au beau milieu d’une aire d’autoroute. M. Boiffard avale un bâillement. Madame le houspille. Julien Flauchet est prostré. Lafeuillade, plus mort que vivre. Et tous les autres, complètement largués. Pour un happy end, c’est raté. Un dernier mot, Olympe avant de quitter. Tu vas me manquer. Tu me manques déjà. Tu manques
Olympe , en retour , lui donne du monsieur ou du monsieur Antoine . Mais déjà dans son cœur , elle appelle papa et se prépare à lui tailler des méga-pipes . Va-t-on assister à un inceste dans les pages à venir ? Pour l’instant ils se bornent à se caresser de paroles.
Madame Pite avise sur le sol un cadenas brisé. Oh ! Un cadenas ! s’exclame-t-elle en cueillant telle une fleur. Madame Pite ramène toujours des souvenirs de ces voyages qu’elle expose dans la vitrine de sa médiathèque. Mais au milieu de ces CD, livres d’art et autres bibelots , le cadenas brisé risque fort de déparer. C’est mon avis.
Le chauffeur Vulpius te demande, néanmoins, parce quel désir contre nature, par quelle insane perversion ces touristes aisés qui pourraient, s’ils le voulaient, visiter de belles et grandes choses comme le Taj Mahal, le krak des Chevaliers ou la pyramide de Khéops, le chauffeur Vulpius se demande par quel penchant morbide, par quelle aberration vicieuse ces touristes retors sont venus se paumer dans d’aussi mornes paysages. C’est louche.
Odile tomberait à coup sûr dans la mélancolie si elle n'avait sa réserve de requins, suborneurs voraces et abuseurs de bien qui lui sont, chaque jour, prétexte à trompettades. En l'absence de coupables officiels, lui reste le recours de s'indigner contre son propre époux. Mais avouons qu'il est moins sublime de s'indigner contre le propriétaire foncier de vos fesses que contre l'incommensurable et toujours recommencée ignominie du genre humain.
Jason est furieux. Et sa fureur s'étend, en bloc, à tout ce qui le blesse. Jason, en vérité, est aussi furieux qu'il est triste. Ou plutôt non, sa tristesse ne peut se vêtir autrement que de fureur, ne peut se dire autrement. Là sans doute est sa force.
La véritable misère a ceci de singulier qu'elle ne peut jamais sortir de la bouche de ceux qu'elle afflige.
Pour l'instant, Olympe exprime son amour à Jason en lui taillant des pipes. Certes la queue de Jason n'est pas son morceau préféré, mais puisque l'amour se trouve au bout du chemin, elle fait contre mauvaise fortune bon coeur.
Olympe aimerait dire sa gratitude à ces magnanimes personnes, mais elle ne sait lui donner la forme appropriée. Dans son travail avec M. Fausto comme dans son amour avec Jason, Olympe n'est pas amenée à user des mots de la langue. Aussi, quand il s'agit de nommer ses sentiments intimes, les mots ne viennent pas. A force de rester dans un coin, abandonnés, ils se sont tout engourdis.