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Un petit tour chez les pauvres...
Visiter les quartiers les plus pauvres de l'Europe, voilà le programme de ce tour-operator un peu spécial qu'est Real Voyage. Un roman d'une ironie mordante, au discours souvent décousu afin de saisir le côté grotesque de ce projet. On y reconnaît le style truculent de Lydie Salvayre, et il est irrésistible !

26/02/2015
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Le bus touristique s'est arrêté.
Les voyageurs sont descendus.
Je suis restée à bord. J'attends la suite...

L'idée de ce roman m'a emballée : embarquer pour une visite commentée des endroits les plus pauvres d'Europe. J'attendais de voir ce que Lydie Salvayre pouvait en faire.

Début du voyage en France.
Les voyageurs font connaissance et laissent tomber rapidement les masques, révélant toutes leurs contradictions. Normal, quand on vit en vase clos !
On pouvait s'attendre à de belles rencontres et de vives entremises.
Il y en a eues. Mais elles n'étaient pas très convaincantes.
Et hélas, tout s'est emballé. Trop vite. Trop loin. Trop fort.
Il n'y a pas eu de crescendo et de diminuendo.
Il n'y a pas eu d'émotions.
Il y a eu une brève mais intense tension qui m'a laissée suspendue dans l'attente d'un atterrissage qui n'a pas eu lieu.
J'ai voyagé de Paris à Berlin, de Ratisbonne à Milan en un clin d'oeil, sans décalage horaire, sans temps de pause, sans surprise.
Ce livre aura eu le mérite de m'apprendre de nouveaux mots et de me faire apprécier les tournures de phrases piquantes de l'auteure. Un bon moment de lecture qui ne me laissera pas de souvenir impérissable.
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La société de tourisme Real Voyages organise un « road trip » particulier pour les bourgeois en quête de sensations fortes. À la recherche d'un autre monde. Un ailleurs qui leur apporterait des sueurs froides. Qui les bousculerait dans leur quotidien confortable. Et c'est de Paris à Turin qu'ils trouveront cette dimension glauque à chaque halte dans une grande ville européenne contenant sa cité de la peur, son quartier des pauvres. La fracture sociale génère des conflits d'idéaux. Elle est la source des tensions dans ce petit groupe peu commun. Un parcours qui révèle des personnalités aussi laides qu'attirantes.

Ce livre est une satire. Une blague amère. La caricature d'un discours humanitaire.
L'ironie dessine la carte des mépris et des incompréhensions entre les différents protagonistes. Les clichés du riche et du pauvre, et donc des idéaux qui les séparent.

Il raisonne. L'écho. de toute part.

Conscient de l'ampleur européenne de l'inégalité dévoilée dans le livre, je m'en suis tenu à des images spontanées qui me sont apparues furtivement dans les médias français — sur la toile internet et à la télévision pour être précis. Cela était d'autant plus étonnant que je n'avais pas pour habitude de suivre scrupuleusement les sorties acclamée des érudits. Au fil de la lecture, ce sont les échos des mots d'Éric Zemmour le « Porte-voix des classes populaires » (Figaro15/11/14) ; de Laurent Obertone (écrivain) qui tire la sonnette d'alarme en livrant son « Orange mécanique » (Ring édition 2013) ; du récent retour du feu Étienne de la Boétie discourant sur la servitude volontaire (dans l'hebdomadaire « 1 » de cette semaine) ; de Natacha Polony à propos de son recueil de chroniques « Ce pays qu'on abat » (Plon 2014) ; qui apparaissaient en toile de fond.
Tous les débats, les critiques, les chroniques, les livres, les émissions télévisées, les « j'accuse » et les « indignez-vous » sont pour moi des entreprises extrêmement intelligibles, médiatisées et impulsives. Des idées mises aux enchères telle la légendaire bourse à la criée au sein des différentes bourses du monde entier. Je perçois des enjeux énormes dans un langage codé qui m'est étranger. Je vois juste des égos gonflés à bloc. Des marchands me vendant du slogan « Arrêtons-la misère, que diable ! ». Ils sont comme Odile B, tous « torturés par l'idéal social ».

Je me suis retrouvé dans « Les belles âmes ». Non pas que je considère mon âme comme immaculée mais parce qu'une grosse partie de ma vie est celle qui rejoint la catégorie des cas sociaux. J'ai habité dans un appartement social à Molenbeek-St-Jean (Bruxelles) pendant un peu plus de dix ans et j'ai retrouvé tous les clichés. Madame Guitou, la concierge, les miséreux, les volontaires, les démissionnaires, les délinquants, etc. La simplicité de la politique du quartier : « soutenons-nous et ailleurs démerdez-vous », ou encore « chacun ses problèmes ».

C'est vrai. Il existait aussi des rêveurs incontestés ou mieux des jeunes étudiants d'une volonté inébranlable qui réussirent dans la plus prestigieuse école de commerce de Bruxelles — des exceptions, mais des exemples intéressants. Pour le plaisir de l'accompagnateur qui est « convaincu qu'on peut faire évoluer les esprits grâce au savoir et à la culture ». Comme quoi. Certains trouvent la force d'opérer des choix constructifs. Tout le monde n'était pas à plaindre. Il n'y avait pas de cars de touristes riches à souhait venus pour s'extasier devant l'inconnu. Il y avait plutôt des visites de groupe d'étudiants, d'architectes, d'ingénieurs et de la police bien sûr. Certains ne souhaitaient rien, d'autres espéraient quelque chose.

Le relief de l'histoire, c'est une vérité. le constat de l'ignorance généralisée. le déni de l'écart qui existe entre un Jason (banlieusard je-m'en-foutiste) et madame Odile B (oratrice caractérielle) par exemple. Une condition humaine malade dans un monde au bord de la surchauffe, presque hystérique tellement tout va si vite. Prenez l'exemple du temps du récit qui s'étale sur cinq jours. Jours durant lesquels les acteurs connaissent quatre phases comportementales. J'y reviendrais juste après ceci : cette période est similaire à celle qui considère une information dépassée après un « buzz » phénoménal. Environ une bonne semaine. Ensuite, le sujet se consume. le temps passe. La cacophonie diminue. le tempo ralentit. L'écho est devenu un souvenir vague. Jusqu'à la prochaine fois.

La fin du roman. La simulation d'un essoufflement. Il n'y a pas de final succulent, pugilat à la clé malgré les confrontations verbales musclées. L'enthousiasme a juste disparu. Fin des quatre phases, jouissance de l'accompagnateur – encore : « Il sait que se succèdent quatre phases chacune marquée d'un pic : une phase d'enthousiasme humanitaire, une autre de dépression cyclonique de la conscience, suivie de près d'une phase purement catastrophique, qui précède, à l'arrivée, une phase de lâche soulagement. La séquence est algébrique ».

Entre temps, les intéressés s'éloignent, embrouillés par les concepts. D'ailleurs se sentent-ils concernés ? Est-ce leurs fautes ? Dirait le dramaturge (prêtre défroqué). Un brouhaha sur lequel tout le monde n'est pas d'accord.

Voilà ce que représentent pour moi les touristes, les jeunes, le chauffeur, les bas quartiers, le car roulant à travers l'Europe. Un mouvement, du bruit, puis du silence.

J'ai été impressionné par le jeu de langage. Une navigation entre le registre soutenu (pour l'accompagnateur, l'écrivain, pour la narratrice elle-même) au familier (liaison entre le parler écrit et l'oral ; pour tous. Un langage moins raffiné pour Jason, le chauffeur, Olympe ou madame Guitou et la concierge ; afin de mieux différencier la classe sociale) avec aisance. Une figure de style qui revient souvent – parmi la multitude : l'anaphore, la répétition qui marque l'attachement de l'auteur envers le personnage « Olympe ». de plus, Lydie Salvayre participe au récit puisqu'elle intervient avec le pronom personnel « je » et donne ses impressions sur les personnages (la nostalgie qu'elle aura à l'égard d'Olympe) et sur la trame de l'histoire. le tout dans un genre complexe, l'ironie. Cela dénote une impressionnante maitrise des techniques d'écriture et un talent pour captiver l'attention du lecteur. Cette façon de procéder lui permet d'insister sur le poids de la dénonciation. Ce partage sonne comme une confidence à propos de l'hypocrisie humaine, des impressions qu'ont tout un chacun sur la condition de la population en difficulté. L'auteure donne une voix à ceux qui n'en ont pas ou plus.

C'était, à mon sens, marcher sur une crête au bord d'un gouffre que de proposer une telle histoire. Ce n'est pas le genre de récit que j'affectionne et pourtant, je n'ai pas eu la nausée. Ce fut un « réel voyage ». Un pont entre le fossé qui sépare les exclus des privilégiés. Une surprise et une découverte très intéressante.
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Voilà un roman qui n'est pas pour moi. Je n'en comprends pas du tout l'intérêt, un mouvement d'humeur, sans doute, de cette auteure devant les gens vivant dans un confort certain, partir visiter des pays pauvres et se pâmer devant les gens « authentiques » qu'ils y rencontrent. L'auteure imagine alors un « Tour-opérator » qui aurait l'idée originale de faire le tour de la pauvreté en Europe. Notre bibliothécaire qui devait mettre des livres autour du thème « tourisme » a donc pensé que ce roman avait sa place.

Mais une bonne idée ne fait pas un bon roman. L'auteure s'ennuie à l'écrire et passe beaucoup de temps à nous expliquer son plaisir ou son déplaisir à inventer des personnages. Elle passe aussi beaucoup de temps à nous décrire la grossièreté de Jason qui est lui, un authentique habitant des banlieues, donc chômeur, fumant du « H », et se faisant tailler des pipes par Olympe une jeune métisse qui sera aussi du voyage. C'est une jeune femme soumise et stupide mais gentille. Les autres « touristes » sont très riches, cultivés et complètement caricaturaux.
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LES BELLES ÂMES – Lydie SALVAYRE – SEUIL (2000)

Que propose Real Voyages ? Des périples à travers l'Europe des démunis ! Car les touristes des classes moyennes ou aisées cherchent des sensations fortes.

Le programme a deux axes : montrer à ces touristes « un échantillonnage varié autant qu'exhaustif des différents spécimens des pauvres ». L'autre axe prévoit « d'y aller progressivement : d'abord les pauvres présentables, puis moins présentables jusqu'aux épaves … ».

Qui sont ces touristes d'un genre si particulier ? Il y a un homme d'affaires et sa femme, il y a un homme de gauche et sa femme, un écrivain célibataire, une journaliste (à Gloria), célibataire elle aussi, etc. Des « belles âmes », quoi ! Il y a aussi l'animateur, l'accompagnateur, le chauffeur et Olympe. Olympe, une jeune métisse qui se bat comme elle peut pour survivre malgré tant de laideur. A la fin du livre, nous pensons que la société entière devrait veiller sur les êtres comme elle. Mais on ne le fait pas. On les visite, c'est plus commode. Jusqu'à ce que …

La visite débute dans une cité grise de banlieue parisienne et l'étape suivante est le quartier le plus pauvre de Bruxelles : Molenbeek. (Tiens, tiens …)

Les travers de chaque personnage (visiteur ou visité) sont vus par l'oeil vigilant de Lydie SALVAYRE et rendus par son écriture ironique. L'humour noir est à son comble. Cela nous fait rire (jaune) presque à chaque page tant les situations et les échanges entre les personnages sont cocasses :
« Mlle Faulkircher est en proie à une exaltation égalitaire qui va durer ce que durent les roses : aux moins deux bonnes journées. Les plaisirs altruistes constituent des passe-temps délicieux. »

« … On lui sert une tasse d'une propreté douteuse. Ca va lui coller une de ces nausées ! Moralité : il n'est pas toujours aisé de paraître démocratique ».

« Mme Pite ne vaut pas un clou sur le marché sexuel, qui, de tous les marchés est le plus impitoyable ».

Les portraits au vitriol nous saisissent tant ils sont vivants.

Finalement, je me dis que les personnages des « Belles Âmes » ne sont pas si fictifs que ça car, si nos dirigeants européens avaient pu porter la même attention que Lydie SALVAYRE à l'état de l'Europe, depuis bien longtemps, (ce livre a été publié en 2000, donc avant même le 11 septembre 2001) – les terribles événements que nous vivons aujourd'hui n'auraient pu survenir, faute de raisons comme Molenbeek, par exemple.

«Je pressens le déclin de l'Europe et le froid à venir, déclame-t-il, (ici c'est l'accompagnateur, ancien séminariste qui parle) ça le reprend. Et bien qu'historiquement parlant nous n'en soyons qu'à ses débuts, dit-il, sa fin déjà s'annonce dont je distingue les présages. Car l'Europe impensée, l'Europe répudiée, l'Europe crucifiée, l'Europe de la honte et de la perdition, l'Europe qui pourrit, empue et sombre dans l'indifférence de tous, l'Europe qui meurt librement de misère dans une Europe libre, cette Europe-ci, mesdames, messieurs, est la vérité de l'autre, la riche et sourde et arrogante Europe. … Et si nous n'y mettons pas fin, le malheur de cette Europe-ci signera le malheur de l'Europe tout entière et le malheur du monde. J'ai regret à le dire. »

Et voici les réactions des visiteurs qui l'entendent :

- « Encore des divagations apocalyptiques !
- La barbe !
- Ce type ne ferait-il pas partie d'une secte ? »

Lydie SALVAYRE est-elle voyante comme Mila ? Non, elle est tout simplement lucide. Et nous ?

Alors, que fait-on maintenant qu'on a perdu beaucoup de temps ? A écouter nos politiques de tous bords, à part une ou deux associations, pas grand monde ne semble proposer de bonnes solutions !

«L'amer savoir celui qu'on tire du voyage » a dit Flaubert.

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J'aime beaucoup cet auteur alors lorsque je l'ai trouvé j'ai sauté sur l'occasion. Quelle intelligence et quel talent chez cet auteur! À chaque livre, une découverte, une plongée dans l'inconnu tant elle se renouvelle… et ce livre est une pépite, un régal d'acuité et de méchanceté mais également de réalisme sur les hommes tels qu'ils sont… j'ai adoré ! Il faut accepter simplement de lâcher certains codes
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Un circuit touristique original est proposé : la visite des quartiers les plus pauvres d'Europe. le récit est à prendre évidemment au second degré et il vaut mieux passer la seconde pour ce voyage. On y décrit la pauvreté et ce qu'elle engendre : bêtise, fainéantise, violence, sexe et propos souvent écoeurants.
De l'autre côté, un petit groupe de voyeurs. Chacun a une bonne raison d'être là : l'un écrit des livres, l'autre cherche la rencontre... Des liens se créent entre eux et la pauvreté est une occasion de débattre, d'échanger et de mieux se connaître. Finalement, ils oublient vite et cherchent avant tout à se montrer le plus attrayant possible. Chacun se vend ou se concentre sur sa petite personne. Qui est finalement le plus écoeurant ? A vous de juger.
Le cynisme m'a amusé au début puis je me suis lassée des propos inutiles et les intrigues amoureuses entre touristes ne sont pas des plus passionnantes.
Il fallait quand même y penser... le sujet est bien traité.
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C'est un drôle de voyage que ce Real Tour qu'entament nos touristes nantis, un voyage à travers les cités de banlieues parisiennes ou allemandes, les squats italiens pour humer la pauvreté, s'en émouvoir et, soi-disant, la mieux comprendre. Un récit fort et sans merci qui oscille constamment entre compassion, mépris, tristesse, moqueries… Personne ne sait sur quel pied danser et on ne peut s'empêcher de se demander quelle serait notre réaction. Ca se lit vite et agréablement, ça fait réfléchir, que demander de plus ?
Lien : http://www.reseau-colibris.fr
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Je n'ai pas aimé ce livre. Je connaissais de Sylvie Salvayre, "Pas pleurer" qui m'avait touchée et interpellée, et. "petit traité d'éducation lubrique" très drôle !!!
même 7 femmes intéressant ... alors quelle déception à la lecture de l'histoire de ce groupe de touristes qui part, dans un voyage organisé à travers l'Europe, à la découverte "des pauvres". C'est malsain, c'est du voyeurisme, c'est détestable.
Lien : https://www.babelio.com/livr..
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[Comme d'habitude, je m'engage à lire 10% du livre et s'il me plait je continue]

J'ai du mal avec le cynisme, alors c'était mal parti. J'ai aussi du mal avec le verbiage, et j'ai découvert que là aussi, c'était mal parti. J'ai du mal, enfin, avec les clichés littéraires.
Par contre j'adore les structures originales, les apparitions de mots précis et précieux, les huis clos (même si ici le groupe se promène).
Cependant, arrivée aux 10%, je suis fatiguée de cette histoire qui est comme un très long pitch d'un roman que voudrait écrire l'autrice et qu'elle nous raconterait avec moult précisions. Je suis peut-être pas dans le mood, mais je vais passer mon tour cette fois-ci.
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