Il faudra toujours me dire la vérité. Avec le pouvoir, on parle de moins en moins ouvertement au chef. On redoute de lui transmettre les mauvaises nouvelles. À vouloir le protéger, on le fragilise. Je vous demande de ne jamais agir ainsi avec moi.
L’Amérique va encore « rêver » pendant quelque temps que le monde et l’avenir lui appartiennent… Avant de disparaître, toutes les grandes civilisations ont une période troublante de somnambulisme…
Ils faisaient l’amour dans des états de transe, expérimentant toujours des délices de plus en plus interdites. Quelque chose s’était noué au cours de leur corps-à-corps dans les eaux froides de Tilbury. L’urgence faisait partie de leur couple. La mort aussi. Ils en parlaient, d’elle et de l’autre vie, comme d’une compagne, sur l’oreiller, quand d’autres parlent d’enfants ou de mariage.
Ils s’autorisaient tout.
— Ouvre cette porte. Sans savoir où aller, je te suivrai. N’importe où !
— Avoir du courage à deux, c’est passionnant.
— Quand on a la chance d’un amour aussi pur, il ne faut jamais se faire du mal. La moindre blessure tue…
Il semblait à Michael qu’en aimant pour la première fois, il aimait mieux. Il se louait d’avoir refréné ses sentiments jusqu’à cette rencontre, y compris à l’adolescence où les passions sont les plus brûlantes…
— Quand on aime comme ça, on n’est plus un homme comme les autres.
Il est un temps, en amour, où l’on n’y voit plus clair, mais où tout ce que l’on voit est beau.
Toute sa vie, Kerbs avait été un meurtrier redoutable, pourtant, penché en ce moment au-dessus de lui, le sang au visage, les poings en étaux, c’était bien John Bateman, le businessman, qui avait la tête sordide d’un criminel professionnel. C’était lui dont n’importe qui penserait, en le surprenant dans son bureau : « Il a des dizaines de cadavres à son actif, il les tue de sang-froid, les démembre, les emmure, les fait disparaître dans des surgélateurs… » Les râles de la victime ne furent bientôt plus que d’imperceptibles vibrations que Bateman décelait du bout des doigts.
Vous savez ce qu’on raconte… C’est même passé en proverbe : « Derrière les grandes richesses, il y a toujours un grand crime… »
Il aimait sentir son cuir lourd et épais peser sur ses épaules, cette peau séculaire admirablement nourrie et cirée. Son odeur suffisait à le faire voyager dans le temps. Il attachait un soin maniaque à son entretien et à son authenticité. Le moindre bouton, le moindre lacet, le plus petit ruban étaient d’époque. Cette année, il pensait faire un effet formidable avec son nouveau chapeau et son fusil de collection ! Ces fêtes de reconstitution le renvoyaient aussi à son enfance et au temps où c’était son père qui jouait à être l’ancêtre des West !…
C'était irréfutable : un Bateman parvenait toujours à ses fins.
On n’employait jamais le mot de gangster au sujet des Bateman, car ils étaient là depuis toujours et que tout le monde leur devait quelque chose, mais leurs activités étaient strictement d’ordre mafieux. Se mettre sous la protection de la famille Bateman, c’était, comme on le disait en gaélique, « avoir un toit ».
que ni la fortune ni aucune puissance ne pouvait empêcher un homme de se faire justice lui-même, surtout au nom d’une femme. Conrad arborait l’air de ceux qui disparaissent sans motif, qui n’écoutent qu’à demi, qui se méfient de tout, qui épient quiconque pourrait se glisser derrière eux.
Il avait l’air d’un homme traqué...