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Citations sur De purs hommes (120)

Mon noble père croyait encore au fair-play et à l’amitié devant le pouvoir.
p.41
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«Parler. Non, décidément non, ils bavaient les phrases comme des sauces trop grasses ; et elles coulaient, sans égard du reste, à quelque sens, seulement préoccupées de sortir et de conjurer ce qui, autrement, leur aurait tenu lieu de mort : le silence, l’effroyable silence qui aurait obligé chacun d’eux à se regarder tel qu’il était vraiment. »
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Si un gay était repéré, à tort ou à raison perçu comme tel, charge était à sa famille de se disculper : elle devait certifier qu'elle abominait ce mal, soit en coupant tout lien avec l'accusé, soit en faisant montre d'une violence encore plus grande à son encontre. C'était, pour cette famille que la honte avait recouverte d'un mauvais nuage, le seul moyen de sauver sa réputation. C'était l'unique façon, pour elle, d'éventer ce redoutable soupçon qui équivalait à une mort sociale : être un vivier de pédés, receler le gène transmissible du péril gay. L'innommable déshonneur dont le goor-jigéen était frappé menaçait toujours d'étendre son ombre sur tous ses proches. C'était souvent pour se protéger de l'anathème populaire qui les guettait que ceux-ci s'empressaient, lorsqu'ils ne pouvaient le cacher, de honnir publiquement l'individu qu'elle excommuniait. Gay : voilà bien le seule linge sale qu'une famille était heureuse et soulagée de laver en public, avec le secours de toutes les mains qui venaient frotter, frotter , frotter jusqu'au sang l'ignoble tâche faite sur l'honneur et sauvegarder ce qui leur importait le plus : l'image qu'elles renvoyaient dans le petit ballet d'ombres de nos insignifiantes existences. Personne ne supporte la honte.
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Nous sommes très nombreux dans ce pays à être de formidables comédiens sur la scène religieuse, histrions déguisés, masqués, grimés, dissimulés, virtuoses de l’apparence, jouant si bien que nous arrivons non seulement à duper les autres, mais à nous convaincre nous-mêmes de l’illusion que nous créons. Oui, les bons musulmans au regard fervent, au cœur écrasé de pureté, au front ceint des lauriers de l’élection divine, c’est nous, les soldats du Bien, le peuple-œuf plein de lui-même et fier de son être-œuf, l’aéropage de justes baignant dans l’immaculée bonté ; nous sommes là, toujours là, hurlant nos paroles charitables, nos recommandations enflammées, notre prosélytisme passionné, régurgitant à la demande tous les versets coraniques que nous avons mémorisés sans les comprendre, prompts à guetter et critiquer chez l’autre tout signe d’impiété, détournant chastement le regard des femmes que nous ne rêvons que de baiser (certains d’entre nous y parviennent) ; c’est bien nous, irréprochables saints au grand jour, bouffeur de seins, gamahucheurs émérites, renifleurs de culs, fétichistes des gros orteils, buveurs de jus de sexe la nuit tombée. Comédiens. Prestidigitateurs. Bonimenteurs. Illusionnistes. Nous ne sommes peut-être pas les plus nombreux dans ce pays, mais nous possédons assez de talent pour jouer une pièce grandiose. Alors jouons !
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Éprouver une terreur sacrée devant un fait, en être profondément bouleversé, puis s'adonner au plaisir peu après en oubliant le drame : il n'y a qu'un homme pour être ainsi, pour être tour à tour, ou à la fois, le frère du monstre, et la sœur de l'ange. Aucune vraie décence ne dure.
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Or, c’est parler des choses qu’il faudrait, je veux dire de l’intérieur des choses, de cet intérieur inconnu, dangereux, qui ne pardonne aucune imprudence, aucune bêtise, comme un terrain miné…
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Nous sommes très nombreux à être de formidables comédiens sur la scène religieuse, histrions déguisés, masqués, grimés, dissimulés, virtuoses de l’apparence jouant si bien que nous arrivons non seulement à duper les autres, mais à nous convaincre nous-mêmes de l’illusion que nous créons. ..
Comédiens. Prestidigitateurs. Bonimenteurs. Illusionnistes. …alors, jouons.
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- Où est le problème ?
- Il aimait les hommes. Voilà le problème.
- Il aimait aussi les femmes. Mais ça ne change rien. Verlaine était un goor-jigéen*. Il pouvait être mille autres choses aussi. Il pouvait aimer les animaux. Mais l'essentiel c'est que Paul Verlaine était un grand poète. Qu'est-ce que ça change à sa poésie qu'il ait été goor-jigéen ?
- Ca change quelque chose, monsieur, répondit Al Hassane. Il a couché avec des hommes, ça change même tout. Ca change tout car...
Al Hassane hésita quelques secondes à continuer, conscient que ses prochaines paroles l'engageraient personnellement, même s'il s'exprimait, je le voyais bien au nom du groupe.
- Car ?
- Car vous nous enseignez la poésie d'un homosexuel... Ca peut avoir une influence sur nous. C'est pourquoi le ministère a interdit d'étudier Paul Verlaine. Il fait partie de la grande propagande européenne pour introduire l'homosexualité chez nous.

* homosexuel en wolof
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Etre jugé ou ne pas l'être: qu'est-ce qui était pire? Dans les deux cas, on était soumis au regard de l'autre, même si ce regard ne le voulait pas. En ne me jugeant pas, Rama me donnait le droit d'être entièrement libre. Je ne l'étais donc pas totalement. Si j'avais besoin qu'on ne me juge pas pour être moi-même, je dépendais encore de l'autre, de son jugement comme de son non-jugement. [...] Méfiez-vous des personnes qui prétendent ne pas vous juger: elles l'ont déjà fait, peut-être plus durement que les autres, même quand elles sont sincères, surtout quand elles sont sincères. Sans le vouloir, peut-être sans le savoir, elles vous ont pensé et décortiqué jusqu'à l'os.
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Elle travaillait dans le milieu de la nuit. Je n'ai jamais su en quelle qualité d'ailleurs, et cela faisait longtemps que je n'avais plus envie de savoir, car cette ignorance était le lit de bien des fantasmes. Je la rêvais éclatante dans l'univers interlope et sordide, effrayant et séduisant, des libertins de la bourgeoisie dakaroise qui se livraient, au milieu de flots d'alcool, d'argent, d'urine et de merde, à d'inimaginables pratiques, inconnues de Sade lui-même, et qui avaient pour moi l'attrait monstrueux et puissant de l'étrangeté.
Cela faisait quatre ans que nous nous fréquentions. Je l'avais rencontrée à l'époque où, ayant abandonné mes rêves héroïques de réforme de l'université, je passais mes nuits à faire le tour des bars et des bordels, pour vivre la poésie au lieu de la lire et de la commenter.
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