Bon ! Je viens de terminer la lecture du dernier Éric-Emmanuel Schmitt. J'ai hésité longuement avant de décider d'en faire un article sur ce blog. Je crains fort d'écorner un peu plus ma réputation bien amochée de « méchante ».
Nous avons tous une mère. Si ce n'est déjà fait, nous la perdrons tous un jour. Pour certains, cela n'aura apparemment aucun impact sur le cours de leur vie. Pour d'autres, cela résonnera peut-être comme une bénédiction, une réjouissance, une libération.
Enfin, il y a ceux qui souffrent dans leur chair de voir disparaître l'être qu'ils ont le plus chéri au monde. Je fais partie de ces derniers, même si j'aime aussi fort et différemment d'autres êtres. Une mère est le premier sujet d'attachement et son départ n'est jamais anodin, quoi qu'on dise et quoi qu'on pense.
Pour Éric-Emmanuel Schmitt, ce ne fut pas moins douloureux que pour d'autres. Et alors ? aurais-je tendance à ajouter.
4ème de couv.
« Maman est morte ce matin et c'est la première fois qu'elle me fait de la peine. Pendant deux ans,
Eric-Emmanuel Schmitt tente d'apprivoiser l'inacceptable : la disparition de la femme qui l'a mis au monde. Ces pages racontent son devoir de bonheur : une longue lutte, acharnée et difficile, contre le chagrin. Demeurer inconsolable trahirait sa mère, tant cette femme lumineuse et tendre lui a donné le goût de la vie, la passion des arts, le sens de l'humour, le culte de la joie. Ce texte explore le présent d'une détresse tout autant que le passé d'un bonheur, tandis que s'élabore la recomposition d'un homme mûr qui n'est plus l'enfant de personne.
Eric-Emmanuel Schmitt atteint ici, comme dans
La Nuit de feu, à l'universel à force de vérité personnelle et intime dans le deuil d'un amour. Il parvient à transformer une expérience de la mort en une splendide leçon de vie. »
Atteindre à l'universel ? Euh… N'est-ce pas un tantinet exagéré, lorsque s'écoule la litanie des occupations et des états d'âme de l'auteur au fil des jours et des semaines, jusqu'au moment il se sent guéri de sa douleur et peut accepter le départ de la mère chérie. L'écriture est assez impersonnelle, le style classique, rien à dire sur la forme qui n'a rien d'exceptionnel sans être quelconque. On a compris que Schmitt est un normalien, cultivé et intelligent, aux talents variés et indéniables.
Je ne remets pas en cause son chagrin ni sa légitimité à nous narrer ce deuil dans
Journal d'un amour perdu. Simplement, je ne vois pas nécessairement l'apport de son ouvrage, ni littéraire ni humaniste. J'aurais tendance à soupirer, encore un homme qui perd sa maman et s'imagine le premier à vivre cette horreur, tout comme certaines femmes pensent être uniques à mettre un enfant au monde.
Je conserve en mémoire le récit, sans doute plus froid et plus clinique, de Simone de Beauvoir accompagnant sa mère vers la fin, dans Une mort très douce. Je me souviens aussi du Livre de ma mère d'
Albert Cohen, qui m'avait déjà passablement irritée par son emphase et son nombrilisme.
Quand son propre deuil a été long et compliqué, peut-être est-il plus difficile de voir celui d'un tiers s'étaler parfois complaisamment au fil des pages. Il est des lecteurs qui sauront davantage apprécier le côté un peu larmoyant et grandiloquent de cet amour filial, sans doute parce qu'ils seront plus dotés d'empathie ou de bienveillance.
Je dirai simplement que ce livre aura peut-être le mérite de permettre à chacun d'entendre sa propre peine et d'exprimer un chagrin trop souvent enfoui très vite au plus profond de son âme, la vie quotidienne nous donnant peu le loisir de révéler nos deuils.
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