Je ne peux donc considérer que le fait d’avoir une vie intérieure soit un problème ou un souci. Le souci est plutôt, hélas, la vie extérieure.
Les enfants avec autisme ont souvent une démarche, un comportement général un peu étrange. Les autres remarquaient ainsi qu'en classe je ne réagissais pas de la même façon aux sollicitations de la maîtresse ou du prof. Très observateurs, ils se firent ainsi vite un jugement sur leur petit camarade. Instantanément, les enfants savent qui sera populaire ou aimé du groupe, et qui sera mis à l'écart. La société des adultes est similaire, seule son hypocrisie sociale est plus raffinée : au lieu de taper directement, on utilisera certaines phrases d'exclusion, certaines attitudes, pour un résultat à peu près analogue. Il était donc à peu près impensable pour les autres élèves que je participe à leurs jeux de groupe. Même en supposant qu'un jeu auquel je puisse participer fût mis en place, s'ils étaient habitués à ce que je sois exclu, ils ne m'acceptaient qu'avec peine dans leur groupe.
Une cachette ou un lieu de refuge apporte un moment de calme sensoriel.
Dans la formation des fonctionnaires à la française (...), je me suis souvent interrogé non seulement sur ce qu'ils doivent savoir, et que vérifie supposément le rituel du concours, mais aussi sur ce qu'ils doivent impérativement ignorer. A cet égard, les lieux de formation remplissent une tâche en laquelle on peut, pour une fois, avoir pleinement confiance.
Je me dis qu'il n'y a aucun mal à rester un enfant. Quand on voit ce que font les adultes.
Je me méfie des théories qui voudraient réduire l'être humain à un mécanisme d'horlogerie. je crois que l'être humain est beaucoup plus composite, en mouvement. Ne l'enfermons pas , ne nous enfermons pas dans une case. Il nous en manquerait une. (excipit).
Parfois, quand j’utilise l’expression « personne avec autisme », on me la reproche. On ne peut « avoir » l’autisme comme on a une montre, on peut « être » autiste. C’est donc un peu par provocation que je continue de dire « avec autisme », en l’alternant certes avec d’autres expressions. Non pas que je croie que l’on puisse avoir un jour l’autisme comme une valise (un parapluie, diront les psychanalystes et les amateurs de blagues psychanalysantes), et le ou la laisser le lendemain à la maison, mais parce que la simple allusion à cette possibilité met en lumière le fait que la personne, quoi qu’il arrive, dépasse de sa valise.
Quand le corps médical vous assure que très bientôt vous aurez des hallucinations, vous vivez dans un monde de surveillance et vous guettez leur apparition.
En somme, être normal est bien triste. Je préfère la compagnie des fous.
La source d’angoisse numéro un pour une personne autiste, ce sont assurément les changements par rapport à ce qui était prévu.