Que voilà un beau et terrible portrait de femme -et quelle femme !
Il s'agit de Pauline Dubuisson qui, en 1951, assassina son ex-fiancé, et fut condamnée à perpétuité à l'issue de son procès en 1953. Son histoire inspira
Henri-Georges Clouzot, qui réalisa en 1961 "la Vérité", avec Bardot dans le rôle de Dubuisson. Après avoir vu le film sans s'y être reconnue, celle-ci, libérée pour bonne conduite, s'exila au Maroc.
Dans ce roman, Pauline Dubuisson se raconte, raconte sa vérité. Son enfance dans l'entre-deux-guerres, son adolescence sous l'occupation ; ses rêves de médecine, son goût pour les hommes (et alors ?). Loin du tribunal, elle explique pourquoi elle en est venue à tuer son ancien amoureux. Et fait le procès de la France de l'après-guerre.
Le style est sec.
Jean-Luc Seigle se met de façon impressionnante dans la peau de cette femme déterminée, indépendante, sûre d'elle -"arrogante" disaient la presse et les braves gens de l'époque (mais que diraient-ils aujourd'hui ?), qui a affronté seule toute la dégueulasserie d'une société hypocrite, plus indulgente envers les salauds qu'envers celles qu'elle s'empresse de qualifier de "salopes".
C'est un roman puissant, violent, comme un direct en plein foie. On sent la colère et l'empathie de l'auteur pour sa narratrice, et on ne peut que les partager. Et déplorer que 70 ans après, il est toujours reproché aux femmes d'être aussi libres qu'elles l'entendent.