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Dès le début, ce roman surprend. Barry, new-yorkais multimillionnaire à la tête d'un fonds spéculatif, ivre, cherche à acheter un billet de bus Greyhound ( moyen de transport réservé aux pauvres ) pour traverser l'Amérique jusqu'au Nouveau-Mexique. Démarrage vif et cocasse tant le rupin galère, complètement perdu, visiblement peu aux faits des codes de la vie des Monsieurs Tout-le-Monde.

Pétage de plomb ? Oui, Barry est en pleine crise. Il n'aime plus sa superbe femme, à la police de Wall Street aux trousses pour un délit d'initiés. Mais ce qui a déréglé la machine Barry, c'est son fils autiste sévère : Barry a échoué dans sa quête de la famille parfaite. Et il fuit. Pour retrouver un amour de jeunesse et découvrir qui il est vraiment.

Pas sûr qu'il apprenne à mieux se connaître lors de son road-trip, mais en tout cas, il va mieux connaître son pays, hors de son gratte-ciel de millionnaires. le récit est souvent hilarant car Barry est un vrai personnage romanesque, irritant, forcément, mais surtout complètement barrée, obsédée par les montres de luxe, désarmant de naïveté, terriblement gaffeur. Il vaut le voir discuter Bourse le plus naturellement possible avec un dealer de crack !

Si l'embardée de Barry est souvent loufoque, en filigrane, ce sont toutes les failles, toutes les dissonances des Etats-Unis qui sont débusquer à travers chacune de ses péripéties. Les rencontres de Barry sont autant de révélateurs d'une Amérique pré-Trump complètement détraquée, dans laquelle plus personne ne se comprend et reste enfermé dans son système de pensée. Riches ou pauvres, tous les personnages secondaires qui jalonnent le voyage de Barry sont tous esquintés.

Gary Shteyngart se révèle être un observateur fin de la fatuité et de la vénalité de l'Amérique, à l'instar d'un Philip Roth auquel j'ai souvent pensé durant cette lecture. Son tour de force dans ce portrait au vitriol est de jamais tomber dans l'amertume ou le pur cynisme : on sent l'affection qu'il a pour Barry qui croque sans concession mais toujours avec une tendresse moqueuse parsemée de mélancolie.

J'ai beaucoup apprécié ce roman brillamment agité qui se clôt avec l'élection de Trump. Mais j'ai trouvé sa fin justement trop rangée, pas assez folle, bref pas à la hauteur de la verve percutante que l'auteur a déroulée durant tout son roman.
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Première de couverture trompeuse laissant imaginer un voyage en bus vers les grands espaces et ce fameux titre, Lake Success, qui n'est autre qu'une ville de Long Island.

Néanmoins, il y a de bons moments dans la lecture de ce livre dont le principal intérêt m'a semblé résider dans l'évocation des contrastes qui font l'Amérique, contrastes de richesses, de conditions sociales, d'opinions politiques, de goûts sexuels, de vision de la maternité et de la paternité. Là-bas, chacun est convaincu de détenir la vérité, sa vérité, ne souhaitant guère s'encombrer de celle des autres.

Deux héros principaux, Barry et Seema, couple qui s'est aimé, a mis au monde un enfant autiste, puis a choisi finalement une séparation non dite et, donc, Barry va entreprendre un voyage en bus vers l'ouest pour rencontrer un ancien amour de jeunesse.

Ce que j'ai perçu comme intéressant, c'est la structure du roman qui évoque en alternance le périple de Barry et le quotidien de Seema qui élève seule l'enfant autiste, pas complètement seule car elle est entourée d'un staff impressionnant, mais elle est consciente du manque du père.

Leurs vécus sont finalement assez proches, malgré des parcours différents puisque tous deux ont leurs aventures sexuelles, leurs problèmes financiers, leurs tracasseries diverses, mais c'est quand même Barry qui donne l'impression ou plutôt l'illusion de profiter alors qu'il s'enfonce dans une déchéance et une misère sexuelle frappantes.

Gary Shteyngart profite du tableau de ses deux personnages pour en peindre d'autres et sa palette est riche en couleurs et cela est quelquefois plein d'humour, mais aussi de noirceur dans cette Amérique qui s'apprête à élire président "un homme d'affaires new-yorkais profondément perturbé".

The american dream is dead.
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Pour ceux qui me suivent un peu, vous savez que les « Coup de coeur ! », « Pépite ! » et autres « Une claque ! », ça n'est pas vraiment le genre de la maison. Et pourtant… En refermant Lake Success de Gary Shteyngart -traduit par Stéphane Roques-, les doigts me démangent pour débuter cette chronique…

En 2016, à l'heure où l'Amérique se plaît à s'auto-persuader que la crème renversée qui la mènerait d'une victoire annoncée d'Hillary vers une surprise Donald est improbable, c'est la vie de Barry Cohen qui bascule le temps d'une nuit new-yorkaise. Barry est riche, très riche, ultra-riche même, à la tête de son fonds d'investissement, rassuré par ses possessions : ses équipes, son gigantesque appartement, sa collection de montres aux prix indécents, sa femme Sheema et son fils Shiva.

Un équilibre pourtant au bord de la rupture : des positions capitalistiques en repli, les autorités boursières à ses basques, une épouse qui se découvre riche mais lassée et un fils diagnostiqué « différent » pour éviter de nommer une réalité pour laquelle Barry et Sheema ne sont pas prêts. Il suffit d'un soir, d'un dîner, d'un déclic… et Barry rompt.

Plaquant tout, d'un Greyhound à un autre, Barry va traverser l'Amérique en diagonale jusqu'à El Paso, à la recherche du « deuxième acte de sa vie », croisant dans les multiples étapes de son road-trip déjanté, ses improbables « prochains » : un dealer à haut potentiel, un jeune cartographe, une ancienne et accueillante fiancée. Travaillant plus que jamais ses approches sociales, comme au temps où, petit, il rêvait de Lake Success, la ville symbolisant tous les possibles, Barry demeure l'éternel incompris, clone triste du Gatsby de Fitzgerald qu'il admire tant. Barry est lourd, mais drôle, mais insupportable, mais maladroit, mais prétentieux… mais attachant quand même.

À l'opposé de la tendance littéraire contemporaine qui décrit à coups de romans successifs (et parfois, un brin redondants…), l'Amérique des laissés pour compte, Gary Shteyngart choisit une autre focale en s'intéressant à cette Amérique qui continue à flamboyer alors que tout vacille déjà ; qui se complait dans le déni d'une société de tous les excès au bord du chaos ; qui est déjà malade mais ne veut pas se l'avouer et ne s'en rendra compte qu'au petit matin d'un lendemain électoral de novembre 2016…

C'est drôle et terriblement pitoyable à la fois, léger et profond, et l'écriture de Shteyngart s'y adapte parfaitement, alternant des dialogues savoureux et enlevés avec des passages plus compacts et ardus, dans un ensemble qui sonne parfaitement juste. On pense à beaucoup d'autres livres en lisant Lake success, classiques ou contemporains, sans que jamais une comparaison ne saute aux yeux, preuve de la singularité et de la fraîcheur de cette belle découverte de début d'année.

Bref, j'ai adoré, c'est vous dire si je le recommande !
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Est-ce anormal quand on est quadragénaire et que tout va mal, d'avoir soudain la nostalgie d'un amour d'adolescence ? Et justement, pour Barry, ça va mal, ça va même tellement mal, qu'il s'est mis dans la tête de refaire, depuis New York, le trajet effectué vingt-quatre ans plus tôt pour rejoindre dans le Sud, où elle réside chez ses parents, Layla, sa camarade de fac et petite amie d'alors. Un périple de plusieurs jours en cars Greyhound, le mode de voyage le moins cher aux États-Unis. Un véritable raid en terre inconnue, quand on a l'habitude de se déplacer en jet privé.

Car Barry Cohen pourrait symboliser le rêve américain dans sa déclinaison actuelle de royaume de la Finance. Grand, athlétique, d'origine modeste, il est à la tête d'un fonds spéculatif très important et gagne des sommes inouïes. Immersion dans l'univers des très très riches : Barry déguste un whisky japonais rare à trente mille dollars la bouteille, bichonne sa collection de montres valant chacune plusieurs dizaines de milliers de dollars et son appartement occupe un étage entier dans une tour de Manhattan. Un endroit réservé non pas aux gagnants, mais « aux gagnants parmi les gagnants ».

Barry a même des lettres. le nom de son fonds spéculatif, « L'envers du capital », est inspiré du titre d'un roman de Fitzgerald. A l'opposé des financiers casse-pieds obsédés par les chiffres et les graphiques, il séduit ses clients en leur racontant des histoires plaisantes qui leur font croire qu'ils sont intelligents. Barry est un type sympa, tellement sympa que les clients ne le quittent pas, bien que le fonds perde de l'argent depuis trois ans. Mais cela pourrait se gâter, parce que Barry est suspecté de délit d'initié et parce qu'un investissement malheureux dans un laboratoire pharmaceutique douteux pourrait faire de lui la risée de Wall Street.

Sur son nuage de candeur bienveillante, tout semblait simple et évident pour Barry. Tout a basculé quand on a diagnostiqué un autisme sévère à son fils de trois ans. Barry s'avère incapable de s'adapter pour entrer dans la sphère du petit garçon handicapé, ce qui choque et éloigne irrémédiablement de lui son épouse, Seema, la fille d'immigrés indiens, « la femme la plus belle et la plus intelligente du monde », dont il aurait voulu qu'elle soit aussi « sa meilleure amie ».

Lors de son périple en car Greyhound, pendant lequel, dans son fantasme de repartir de zéro, il a renoncé à son smartphone et à ses cartes de crédit, Barry est plongé dans l'Amérique d'en bas, ses quartiers déshérités, ses cités HLM. Il croise des femmes et des hommes de toutes diversités d'origine, de couleur de peau et de moyen de subsistance, partageant pauvreté, apathie ou colère, subissant l'inconfort de la promiscuité, des odeurs, des bruits. Quelques télescopages sont cocasses. Au milieu des Deschiens à l'américaine, Barry reste le gars sympa, incurablement positif. Il voudrait offrir à chacun le meilleur : sa passion obsessionnelle pour les montres, la possibilité d'une belle carrière dans un fonds spéculatif, la perspective d'une amitié ou d'un amour pour toujours…

Plus lucide, consciente des impairs et des insuffisances de son futur ex-mari, Seema cherche à rebâtir sa vie de son côté. Mais comment se passer du grand luxe auquel elle s'était habituée sans même s'en rendre compte ? Peut-être en renouant avec l'univers des intellectuels démocrates…

Car tout se passe en 2016. L'actualité, c'est « Trump vs Hillary ». Les petits Blancs du Sud croisés par Barry aspirent à la victoire de Trump. Les autres s'en moquent. A Manhattan, on en parle « en mode automatique » : on l'abomine, on n'y croit pas, mais on se consolera à l'idée de payer moins d'impôts.

Gary Shteyngart, un écrivain américain juif né en Union soviétique, est coutumier de l'analyse critique de la société américaine et de ses dérives actuelles. Dans les chapitres de Lake Success, alternativement consacrés à Barry et à Seema, la narration emmêle le passé au présent, ce qui en rend parfois la lecture confuse et pesante. Et sa tonalité sarcastique n'implique pas que le livre soit amusant.

La bar-mitsvah atypique du dernier chapitre est plutôt touchante. Finalement, malgré sa collection de montres et ses millions de dollars, Barry ne voulait qu'une chose : être aimé par son fils.

Lien : http://cavamieuxenlecrivant...
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Il en a marre … de tout ou à peu près : marre de Seema, sa très belle femme d'origine indienne qui bat des cils devant le voisin écrivain, marre de son fils autiste, Shiva, qui hurle et se débat chaque fois qu'il tente de l'approcher, marre d'être poursuivi par la justice pour délit d'initié, marre enfin de voir sa vie se dérouler sans qu'il y participe vraiment…
Alors, une nuit, après une soirée bien arrosée, Barry Cohen, l'homme aux 2,4 milliards de dollars d'actifs sous gestion, laisse tout en plan, remplit son sac de sa collection de montres prestigieuses et saute dans le premier car Greyhound qui se présente en direction du Sud-Est : Baltimore, Richmond, Atlanta, Jackson, El Paso...
Voyager en Greyhound… Tout un programme qui ne manque pas de pittoresque pour notre richissime propriétaire d'un appartement luxueux à Manhattan : côtoyer la populace et ses odeurs de transpiration, d'urine, de hamburger, de bière, risquer de se faire piquer sa valise, sa carte bleue, son portable, crever de chaud ou de froid, avoir mal au dos, aux jambes, au cou... Il va falloir s'accrocher... Mais si c'est pour changer de vie, à 43 ans, ça vaut le coup… Faut foncer, découvrir des gens, des vrais, des Américains à qui on ne parle pas, voir un monde dont on ne soupçonnait même pas l'existence, vivre autre chose, de plus authentique, de plus fort et peut-être, si la chance est du bon côté, retrouver Layla, son amour de jeunesse… Peut-être sera-t-elle, elle aussi, prête à se lancer dans une nouvelle vie… Et s'ils trouvaient le bonheur, ensemble ? Et si, pour couronner le tout, Trump n'était pas élu ?
Il y a du Woody Allen dans ce Barry Cohen : plein aux as, mal dans sa peau, complètement schizophrène (avec deux belles obsessions à son actif : les montres ultracoûteuses et l'image d'une famille idéale incarnée par trois enfants se brossant les dents devant trois lavabos Duravit et « s'éclaboussant les uns les autres dans la félicité »), vivant plus ou moins bien son judaïsme, sa sexualité, sa famille, traumatisé par un père « nazi modéré » et nettoyeur de piscines (sans en avoir une lui-même…)
Il est souvent pitoyable de naïveté ce pauvre Barry, complètement décalé, bien déjanté, insupportable de médiocrité, de prétention, d'amour-propre et si faible, si touchant, si attachant… Ce petit road-trip en Greyhound semble lui faire découvrir le monde, the true life, l'Amérique : un Mexicain borgne, un jeune dealer, une belle noire aux cheveux blonds… Une Amérique des pauvres, des loosers, des marginaux…
Franchement, ce roman drôle, loufoque et, dans le fond, bien désespéré est vraiment irrésistible et nous apprend beaucoup sur un peuple de laissés-pour-compte usés jusqu'à la corde et qui a voté Trump pour se faire entendre.
Oui, Lake Success est certainement le grand roman américain de ce début d'année…
Je recommande !
(Et que je vous dise, entre nous, je me suis lancée dans le plat indien de la famille de Seema: le SAMBAR (ragoût d'okras, d'échalotes, de pois mung, cannelle, curcuma, tamarin (pas encore trouvé celui-là !), piments… Un délice…)
Lien : http://lireaulit.blogspot.fr/
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Véritable road-trip au travers des Etats-Unis, nous y suivons Barry Cohen, un riche new-yorkais au tournant de sa vie. Alors qu'il y a peu, il gérait un fonds spéculatif de plus de 2 milliards de dollars, un simple dîner chez des voisins va lui servir d'électrochoc et mettre en branle sa vie si rangée. Muni seulement d'une petite valise dans laquelle il a glissé des montres de luxe, il quitte femme et enfant et décide de retrouver son amour de jeunesse.

Sa route rencontrera, bien entendu, tout un flot de personnages hauts en couleur et de situations rocambolesques. C'est la richesse de la plume de Gary Shteyngart qui en fond un portait d'une Amérique à la veille de l'élection de Trump où le fossé entre riches et pauvres se creuse quotidiennement.'

C'est parfois drôle, parfois loufoque, mais aussi parfois tendre et tellement réaliste. Voyageant qu'au travers de la chaîne de bus Greyhound, Barry, le héros principal, rencontre une Amérique de la classe ouvrière qui est modelé finement, sans tomber dans les clichés. C'est bien plus qu'un simple roman mais bien une approche sociale de l'entre-deux, entre la fin de mandat du démocrate Barack Obama et avant l'entrée à la Maison Blanche, du républicain Donald Trump.

Souvent pas à sa place et maladroit, le personnage de Barry se rend attachant par ses failles et par son ignorance du monde réel, ayant vécu à l'abri dans sa tour d'ivoire. Les chapitres s'alternent entre ce voyage et la vie de son épouse, Sheema, délaissée à New York. Même si ces derniers sont moins nombreux, je les ai même préférés.

Voyage initiatique qui bouleversera Barry mais aussi sa famille, le lecteur y découvrira l'Amérique profonde, par une approche sociale telle qu'on pourrait penser que l'auteur a effectué lui-même le périple. Alors que le ton aurait pu être léger, c'est tout en profondeur que Gary Shteyngart signe un roman fort et si humain.

Lu dans le cadre du Grand Prix des Lectrices Elle 2020, en lice dans la catégorie « Roman », pour le mois de mars.
Lien : https://www.musemaniasbooks...
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Gary, trentenaire, propriétaire d'un fond d'investissement, marié, père d'un petit garçon est un homme riche qui vit à Manhattan. Après, plus ou moins un pétage de plomb, il largue tout:boulot, femme, enfant. Son couple bat de l 'aile, son fils vient d' être diagnostiqué autiste, il est accusé de délit d'initiés. Il jette téléphone et cartes de crédit, prend un car greyhound et va entreprendre un road trip à travers le pays à la recherche de lui-même, de ses rêves, de ses amis perdus, de son ex fiancée. Pendant cette folle traversée d'est en ouest du pays, il espère se reconstruire, il cherche l'authenticité rugueuse de l'Amérique des pauvres, se frotte à la vraie Amérique, loin de sa tour d'Ivoire de Manhattan. Empêtré dans ses idées de riche, naïf, arrogant, maladroit il essaie à travers tous les états qu'il traverse Virginie, Louisiane,Texas, Arizona, nouveau Mexique de provoquer des rencontres, de tisser des liens avec les gens, maladroitement.
Après son road trip, n'ayant pas pu renouer des liens avec son ex, il rentre à NY, riche de ses aventures. Il essaie de récupérer, en vain , sa femme. Mais Gary est un battant, qui ne s'avoue jamais vaincu, il se reconstruira.
À travers ce roman situé à la fin du mandat d'Obama et donc juste avant l'élection de Trump, l'auteur dresse, avec humour, une radioscopie de l'Amérique où l'on voit le fossé entre riches et pauvres, les failles de cette Amérique malade, multiculturelle où les riches sont toujours plus riches et les pauvres toujours plus nombreux.
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#Lake Success, #lecteurs.com
Héros ou lâche ? Barry, dans ce roman mille-feuilles, est tantôt l'un, tantôt l'autre et parfois les deux en même temps. Jusqu'il y a peu à la tête d'un fond spéculatif américain pesant près de 2,5 milliards de dollars, ce pavaneur américain qui n'existait que par ce qui s'exhibe, bascule dans une nouvelle dimension, une autre réalité. Sur un coup de tête, un coup de semonce et un coup au coeur, Barry décide de tout larguer et de s'embarquer pour un road-trip en autocar à travers l'Amérique profonde. Plongée au coeur d'un cortège de pauvretés souvent solidaires.
Abandonner toute sa richesse pour un retour mythique à Lake Success, lieu refuge enraciner dans sa mémoire sous toutes les couches d'exploitations et d'ingratitudes qui ont soudé sa vie… est-ce un acte héroïque ? profondément humanitaire ? digne d'admiration et de respect ? Pas tout à fait. Barry part sans son portefeuille, sa carte de crédit mais emporte avec lui un faux passeport et une valise de montres précieuses, toutes hors de prix mais négociables, même à la perte s'il échet. C'est que Barry veut fuir. le FBI qui le talonne pour délit d'initié et sa femme, riche, belle, encore aimée peut-être mais mère de leur enfant autiste avec qui Barry, maître du Monde de la finance, n'a jamais su échanger. Barry fait-il front face à l'adversité ou fuit-il lâchement ? Subtile ambivalence soigneusement entretenue par Gary Shteyngart qui distille dans son livre l'âme d'une Amérique douloureuse, pauvre et déboussolée par la possible arrivée à la Maison Blanche d'un fantoche sans morale et compétence pour diriger le pays.
Le personnage de Barry est inquiétant : sommes-nous à ce point menés par le nez par des spéculateurs sans morale ? Mais il est drôle, presque craquant lorsqu'il caricature à travers sa passion des montres et ses incroyables maladresses relationnelles, son incapacité à mesurer l'importance du temps à passer avec ceux qu'on aime et l'existence propre, souvent non conforme à nos rêves, que chacun a le droit et le devoir de défendre. Il est touchant enfin par les efforts qu'il déploie pour accéder à sa rédemption et, enfin, permettre l'épanouissement des autres. Et même si les problèmes moraux de la Justice restent sans solution satisfaisante, Barry, à travers ce road-trip, nous donne de voir et mieux deviner une galerie émouvante de personnages oubliés, laissés pour compte alors qu'ils constituent le ciment d'une nation américaine donnant de croire, encore un peu, en l'humanité.
Un passage particulièrement émouvant est la « prise de parole » de Shiva, ce fils autiste dont il a fallu éloigner le père pour qu'il grandisse, qui lors de sa bar-mitsva (rite juif du passage de l'enfance à l'âge adulte) aura des mots insoupçonnés pour ce « papa-oiseau » qui toujours s'envolait et s'éloignait de lui.
Un livre de réalités brutes, duperies, disputes, absences, fuites et ruptures tout autant qu'une histoire de refondation, renaissance et ouverture à un avenir digne de l'Homme.
Merci à Lecteurs.com et aux éditions de l'Olivier pour cette très belle découverte.
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Péter les plomps et sauter au débotté dans un car Greyhound pour un road trip de New York au Texas? Pourquoi pas. Quand on fait partie des 1%, c'est déjà nettement moins probable; et c'est là qu'intervient le truculent Gary Shteyngart qui nous a déjà montré dans 'Super triste histoire d'amour' que pour ce qui est d'emmener son histoire hors des cadres, il n'a peur de rien.

Ce qui fait peur par contre dan ce roman, c'est l'état de l'Amérique, à la fois toile de fond et personnage principal, que le lecteur contemple atterré derrière les vitres des cars miteux, à distance irréductible du train de vie et du loft somptueux de Barry, notre héros en goguette.
Une Amérique si divisée à la veille de l'élection de Trump qu'elle est au bord de l'implosion. Comme Barry, qui n'en peut plus de ne pas comprendre où il a merdé dans son parcours parfait d'Américain "républicain fiscalement modéré", ni pourquoi sa vie part en vrille, femme, enfant, fortune, au lieu d'être le paradis qu'il pensait se créer.
Alors Barry largue tout, tout sauf ses montres de prix, il s'accroche à leurs aiguilles, cherche à remonter le temps jusqu'à son premier amour, quitte à pousser plus loin, par un nouveau trajet en car, jusqu'à la vraie vie.
Et Trump sera élu, par cette autre Amérique rencontrée en Greyhound, sous les yeux ébahis des 1% démocrates, ou si peu.

Trip sympa que ce roman d'époque, servi par l'humour désopilant d'un auteur très attachant.


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Barry Cohen,un ultra riche financier New-yorkais est à un tournant de sa vie. Sa splendide femme le méprise et il se sent impuissant et inutile face à l'autisme sévère de son jeune fils.Même ses affaires périclitent...
Alors,un soir,devant ce triste constat,il décide sur un coup de tête de tailler la route à bord d'un greyhound (bus bon marché) rêvant d'une autre vie,plus simple et plus heureuse.
Son road- trip rocambolesque à travers les États-Unis, au hasard de rencontres improbables, lui fait découvrir la réalité de la vie des laissés pour compte,des désabusés et autres rejetés du système.Son but est de retrouver sa petite amie de ses années d'étudiant.Bien sûr,rien ne se passe comme prévu mais ce périple va bouleverser ses certitudes.A son retour,il aura perdu ses illusions mais trouvera une autre possibilité de vie,plus réelle.
La personnalité du personnage est complexe : très intelligent mais confondant de naïveté dans ses relations, avec une passion peu commune (les montres de luxe) qui lui procure du réconfort.Il apprend des scénarios sociaux pour évoluer dans la société. Il me semble atteint d'une forme d'autisme,ce qui lui crée bien des embarras.Cela fait de lui quelqu'un de farfelu et de touchant malgré ses failles.J'ai aimé l'humour et le côté absurde des situations,la description de l'Amérique pré-Trump.La fin m'a émue car il a parcouru du chemin Barry et il ne s'en sort pas si mal...
Merci à JIEMDE pour m'avoir fait découvrir cet auteur avec sa critique inspirante!
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