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Critiques filtrées sur 4 étoiles  

L'enquête a paru avant la chanson de Fernandel. Dans les deux cas, les gens se moquent toujours d'une Félicie, aus-si !
"Jambe de bois" est fraîchement décédé mais impossible pour Maigret de tirer les vers du nez de la jeune servante Félicie.
Pourtant elle concentre toute l'attention du commissaire. Elle a découvert le corps de Jambe de bois, tué par balle mais pas d'arme du crime sur place. Félicie n'a rien vu, rien entendu puisqu'elle était partie au ravitaillement.
Le face à face entre Maigret et Félicie nous donne un aperçu de ce qu'est un roman dur, comme les appelait Simenon. Cela a pour effet de mettre l'enquête au second plan.
Et de nous concentrer sur la tension entre ces deux personnages que tout oppose socialement et culturellement.
Maigret est opiniâtre, Félicie aussi. Maigret est mutique, Félicie ....
Si bien que les collègues de Maigret tiennent Félicie comme plus dure à cuire que bien des suspects de la pègre. C'est tout dire.
Paradoxalement un peu coquette mais pas les bonnes manières. Simplette mais pleine de bon sens. Souvent diserte mais pas loquace avec le commissaire. Car elle a bien des choses à cacher.

Félicie par Simenon, c'est un peu la Bovary vu par Flaubert, la jeune femme d'un milieu défavorisé rêve d'une vie romantique faite de stéréotypes.

A lire pour savourer la confrontation.
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Le Poissy des années 30 ou du début des 40. Un lotissement tout neuf, en expansion rapide, en promesse de ville alors qu'il n'est encore qu'un hameau disparate dans les champs en fleurs. Quelques lots en dents creuses sont encore à pourvoir. Les maçons viendront bientôt y poser leur ciment.

Mai est dans l'air, la nature revit, bourgeonnent les arbres et chantent les oiseaux.

"Cap Horn": une petite villa qui aurait pu se nommer "Sam Suffit". Son propriétaire, Jules Lapie, un déjà vieux retraité, modeste et près de ses sous malgré une rente qui lui assure la suffisance heureuse face à ses vieux jours. Un homme sans histoire et sans passé, célibataire et transparent. Les seuls luxes qu'on pourraient lui reprocher: cette volonté de vivre les pieds sous la table sans ne rien faire; Félicie, à cet effet, sa bonne à temps plein depuis sept ans; Félicie 20 ans à peine.


Etrange duo que celui-ci, formé de ces deux êtres dissemblables à souhait: une jeune, un vieux, sous le même toit, toujours à se disputer, à se jalouser, comme un vieux couple; rien entre eux, les ragots n'y feront rien, si ce n'est cette habitude de l'autre qui se transforme en tendresse.

Lapie est assassiné dans sa chambre alors qu'il est seul dans la villa. Maigret entre en scène. Félicie, en suspect d'évidence, parle d'héritage pour elle réservé, réfute le statut de maîtresse, rembarre durement Maigret, grogne, râle, rechigne, se défile, élude, ronchonne, menace, n'en fait qu'à sa tête, ne répond pas aux questions ou ment. Maigret, surpris, interpellé, presque en acceptation irrationnelle de l'agression, sur la pente d'une l'intuition folle qui le porte à faire sauter la raison et la logique, ne procède pas à son arrestation pour entrave à la justice, mais patiente, temporise, fait dos rond...

Un testament est retrouvé: Félicie hérite... L'étau pourrait se resserrer, Maigret attend.

L'enquête se ramifie bientôt vers Pigalle et Rouen. le Milieu et ses raisons louches pointent du nez, semblent parties prenantes dans l'affaire. Certaines scènes du roman s'y attardent: jazz des caves, stripteaseuses des boites de nuit, rafles de la Mondaine et tentative d'assassinat sur la personne d'un neveu de Lapie. Maigret se doit de suivre la filière évidente de Pigalle mais s'y résorbe contre toute logique. Il s'incruste à Poissy, prend presque pension dans la villa, délègue à ses seconds les recherches et démarches parisiennes et normandes. Félicie l'attire comme aimant tant il sent en elle le noeud du problème, sa solution, alors qu'elle n'est que la bonne sans intérêt d'un homme qui l'est tout autant. le jeu du chat et de la souris commence, mais le félin n'est pas aussi méchant qu'il le devrait, la souris minaude (que Mme Maigret se rassure), agace, réplique finement, argumente, contre argumente, réfute, s'obstine. Les deux se cherchent chamaille, se reprochent mensonges et intimidations. Maigret une nouvelle fois s'entête à contre-courant de sa hiérarchie qui voudrait le voir sur des pistes plus prometteuses. Bientôt entre lui et Félicie, au fil des jours, des "vous" apparaissent, qui se voudraient des "tu" mais qui n'osent pas. La confiance réciproque naît.

Le happy-end est bientôt là. Maigret et Félicie se quittent sur un sourire. le lecteur tourne la dernière page, bugge sur le mot fin, une idée de doux printemps heureux et en promesse dans l'air des derniers mots offerts.

Depuis que j'ai repris Maigret pour ce blog (j'en avais lu une quinzaine auparavant) c'est la première fois que Simenon met sous mes yeux une histoire remplie de tendresse, d'humour et d'amitié (d'amour platonique..? Chut, ne jugeons pas, cela ne regarde qu'eux) entre son bourru de commissaire et une de ses héroïnes. Faut dire que cette Félicie là, toute revêche et mal embouchée qu'elle paraisse, détient un caractère tendre, rêveur, humain et à sa manière très attachant. Je me suis même pris à penser que Maigret voit peut-être en elle un double de lui-même: ronchon au grand coeur quand il sent que l'autre a bon fond.

On est loin du Maigret-type, loin de la pluie, de la neige, du froid, du brouillard, de la nuit; des lâchetés, des turpitudes humaines et des homicides qui vont avec. On est mi mai, orages et chaleur mêlés, fraîcheur des nuits, senteurs printanières, rosé frais sous la tonnelle; quelque chose en Maigret sort du gel et entre dans la promesse d'un bel été. "Félicie est là" est à prendre comme un intermède rassurant entre deux bouffées de noirceur, entre deux hivers humains.

J'ai quitté Félicie en bas de dernière page, fermant le livre à regret de devoir partir, de celui d'abandonner le petit monde agencé par Simenon. J'ai tourné la page d'un geste lent mais hélas définitif ... pour la retrouver quelque part sur le Net (je ne dirai pas où) en version télé noir et blanc d'époque avec Jean Richard. Et ma foi, si elle n'est pas si avenante que çà, comme le voulaient Simenon et le réalisateur, il n'en reste pas moins qu'au final Félicie a un si beau sourire. On peut comprendre Maigret et sa faiblesse pour elle.

Simenon et les femmes, une grande histoire pour lui et Maigret..! "Cécile" dans "Cecile est morte", la détective en vieux jupons dans "La maison du juge".

Mais ne vous y trompez pas, "Félicie est là" n'est pas un instant "Nous Deux" ou "Harlequin", loin de là, c'est une étude très fouillée, subtile et amusante d'une personnalité féminine très complexe; une enquête policière traditionnelle et logique qui vaut le détour. C'est un grand roman.

Bises à vous, Félicie, qui entre les pages du roman entamez toujours de nouvelles joutes oratoires hilarantes avec votre sauveur de commissaire. Vous n'êtes que fille papier et de caractères d'imprimerie assemblés; il n'empêche, vous m'avez touchée à coeur. Simenon met avec "Félicie est là" un peu de soleil dans l'eau froide de Maigret, dans sa vision si noire de l'humain, dans la notre aussi.
Lien : https://laconvergenceparalle..
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Voilà un Simenon atypique. Point d'atmosphère lourde et pesante, ni de brumes ou de crachin. Point de canaux, ni de petite ville avec ses secrets.
Avec pas mal d'humour, Simenon entremêle trois mondes que rien n'aurait du se faire rencontrer : le monde casanier de Jules Lapie, dit jambe-de-bois, victime d'aventures qu'il faisait tout pour éviter; le monde imaginaire de Félicie, principal héroïne du roman, que @Ibon qualifie avec justesse de Bovary façon Simenon; et puis un troisième monde que je ne révèlerai pas ici mais qui est à l'origine de l'enquête.
Il en ressort un roman bien sympathique, court et rapide, qui se digère bien, façon Simenon.
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Que dire de cet énième roman de Simenon : Maigret est bien présent, mais il va s'opposer à Félicie, une jeune femme au caractère particulièrement bien trempé !
La confrontation va faire des étincelles....
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