Jane McMullen s'est jetée sur la chaussée sans regarder et a traversé Picadilly ventre à terre – en route, je le savais, pour la galerie. J'ai prié pour un accident fatal : en un clin d’œil, Jane fauchée par le bus 19 et à moitié traînée jusqu'au Ritz.
Mais Jane a traversé la rue saine et sauve et a continué vers Brummel Yard.
- Oh vraiment, Phoebe ! Je ne compatis pas... Si c'est un tel cauchemar, pourquoi se l'infliger ?
Et voilà qu'à l'hiver de ma vie je planifiais ma mort alors que, semblait-il, j'avais à peine vecue. (p. 55)
Teddy était d’avis que j’ignore les textos et bloque le numéro. Il a dit que c’était normal, que les gens s’envoyaient des « photos de bite » et des menaces de mort tous les jours.
Pas de quoi en faire un plat.
Mais j’ai senti les premiers effluves du Fleuve de merde.
Quelqu’un m’avait démasquée.
Quand tu patauges dans le Fleuve de merde, le bon truc c'est profil bas... mais pas TROP longtemps...sinon on croit que tu as la TROUILLE... après, tu sors ! Tu te montres... tu laisses les gens admirer ton cran...Mais conduis-toi en paria et tu resteras un paria...
Je n’ai pas vécu comme une femme est censée le faire. J’ai obéi une fois aux conventions en me mariant. Terrible erreur, mais leçon utile (connais-toi toi-même) : je suis nulle pour vivre avec des gens. Je n’ai d’intérêt ni pour la vie domestique ni pour les enfants. Je suis solitaire, vieille fille dans l’âme, responsable devant personne, à charge de personne.
Pendant tout le trajet jusqu’à Sloane Square les horreurs défilent dans ma tête, la vie avec lève-personnes, rampes et barres d’appui, la mort lente en unité de soins fermée , Noël après Noël dans la maison du crépuscule. Epargnez-moi ça. Je choisirai ma sortie , ce qui signifie ne pas partir trop tard. Le timing sera primordial. Crevez tant que c’est encore possible.
Quelle erreur, pensa Nicki, d'avoir parlé à sa mère. mais les trajets en voiture avec elle étaient toujours une erreur, comme d'être enfermée dans un confessionnal mobile. (p.69)
Je ne suis pas prude …
J’ai été mariée, divorcée, mais pas plus troublée que ça par la passion. Ce dont je m’enorgueillissais jadis – la vie amoureuse des autres semblait si dévorante et confuse. J’ai eu une ou deux liaisons mais j’ai toujours haï le jeu de pouvoir entre les sexes, la coercition, la soumission, l’idée d’être « possédée »
Bien sûr, je considérais l’Amour comme la plus belle chose au monde, dans les livres, les poèmes, au théâtre et dans ses représentations artistiques - temples indiens, tableaux de Giulio Romano, estampes d’Utamaro. En pratique, je n’ai jamais pu m’empêcher de penser à l’absurdité de l’acte, pas plus sublime que l’entassement de cochons aperçu un jour lors d’une promenade campagnarde. Mêmes cris perçants et grognements. …
… Longtemps après le départ de mes invités, je suis restée assise, pétrie de regrets. Réalisant soudain que ma défiance envers le sexe n’avait été que couardise, peur de perdre le contrôle. Je m’étais refusé le plaisir. Je ne m’étais jamais perdue dans les vapeurs de la passion. …
… Et voilà qu’à l’hiver de ma vie, je planifiais ma mort alors que, semblait-il, j’avais à peine vécu.
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Ma mort idéale serait une oblitération silencieuse sous une neige épaisse. (...) Évidemment, à la fonte des neiges, je finirais pas gâcher la journée de quelqu'un. (p.24)