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Critiques filtrées sur 3 étoiles  
Varsovie 1911, « six ans après la révolution » :
« Les partis politiques s'affrontaient à la fois en Russie, où se déclenchaient des pogroms, et en Pologne où on appelait au boycott des marchandises juives. Par centaines de milliers, des jeunes filles et des jeunes garçons juifs passaient la frontière en fraude pour gagner la Prusse ou la Galicie et, de là, s'en aller chercher fortune en Amérique, au-delà des mers. »

Keila, surnommée la Rouge à cause de sa chevelure rousse, est une belle jeune femme, ancienne prostituée mariée à Yarmi, qui fait partie du menu fretin de la pègre locale. Juifs tous les deux, ils vivent dans un quartier qui nous est présenté comme grouillant de rabbins, il faut dire que toute cette première partie se décline sur le mode de la comédie de moeurs haute en couleurs. Yarmi et Keila tirent le diable par la queue et survivent pour le moment sans retomber dans leurs erreurs passées. Mais tout cela ne peut durer qu'un temps et, lorsque l'argent vient à manquer et que, comme par hasard, ressurgit un ancien comparse aux moeurs dissolues et à l'esprit retors, la roue va tourner (et mal tourner) : il leur promet l'Amérique, dans tous les sens du terme, mais dans l'immédiat, la réalité n'est pas à la hauteur du rêve.
Le tragico-burlesque initial vire ainsi au tragique tout court et Keila, au coeur du nouveau trio, est la première victime de ce changement. le jeune Bunem, cependant, dont elle fait connaissance à ce moment-là, fils de rabbin qui d'emblée la traite avec respect, va modifier la donne et lui permettre d'envisager un autre avenir…

Isaac Bashevis Singer est un auteur que je connaissais de nom, sans plus, aussi est-ce par curiosité que, pour le découvrir, je me suis dirigée vers cet inédit.
« Keila la Rouge » est un roman dépaysant et bien mené, dans lequel je n'ai pas eu de mal à me plonger, même s'il m'est apparu un peu déconcertant au début, le temps d'appréhender (en gros) le contexte et de me familiariser à l'environnement. Je l'ai trouvé intéressant par tout ce qu'il m'a appris sur la situation des Juifs en Pologne (ils sont sous la domination russe, confinés dans une « zone de résidence » ; « Les Russes ne permettent pas aux Juifs de faire des études. Les enfants juifs ne sont pas autorisés à aller au lycée et encore moins à l'université. ») et en Amérique au début du 20ème siècle, avec l'antisémitisme qui sévissait alors (en Europe et en Russie mais aussi aux États-Unis).
En revanche, le personnage de Keila, acharnée à « redevenir une bonne fille juive », ne m'a pas convaincue, c'est gênant puisqu'il s'agit de l'héroïne, tant je l'ai trouvée outrancière (voire grotesque) dans ses réactions hystériques lorsqu'elle doit faire face à ce qui lui arrive (bon, je reconnais qu'elle semble attirer les malheurs !) . Celui de Bunem n'a, au contraire, rien de caricatural : il est fouillé et retient l'attention du lecteur, prompt à s'intéresser aux déboires de ce jeune homme franc et à l'esprit vif, qui remet les traditions en question et ne cesse d'interroger le monde autour de lui.

Un bilan plutôt positif donc, pour un roman de moeurs à l'écriture enlevée, qui croque avec un égal talent la rue Krochmalna à Varsovie et les quartiers modestes de New York.
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Un roman au charme étrange. Un de ses mérites réside dans l'évocation des quartiers juifs populaires de Pologne puis de New York : autre monde et autre époque. Lorsque les colons étaient aidés par de riches mécènes pour s'implanter aux quatre coins du monde, Palestine comprise, lorsque la clôture dans le ghetto, l'oppression russe et les courants anarchistes imprimaient en Europe leurs marques à toute réflexion sur le destin individuel, la manière d'aimer ou de se réaliser. Et l'Amérique, puissant aimant où la feroce liberté d'entreprendre dépouille chacun de ses entraves identitaires. C'est déstabilisant de se plonger dans cet univers. Quelques dizaines d'années avant la Shoah et un antisémitisme meurtrier systematisé... L'ignorance dans laquelle se trouve les personnages du destin des leurs place le lecteur dans la posture d'un dieu omniscient et impuissant. C'est un drôle de tour que nous joue l'auteur puisque le roman a été écrit bien après guerre.
La vacuité des existences et la truculence aussi joyeuse que désespérée avec laquelle les personnages se résolvent à vivre leur tourments n'en résonnent qu'avec plus d'ironie tragique encore. Et dans le même temps, la critique du capitalisme à l'américaine de Solcha, le vertige existentiel qui saisit Bunem et Keila résonnent de manière très forte avec des réflexions propres à notre 21 siecle.
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« Keila la Rouge «  est un texte inédit d'Isaac Bashevis Singer mort en 1991.
Varsovie en 1911. Keila est surnommée la Rouge non pas à cause de ses opinions politiques mais de sa flamboyante chevelure. Pute au grand coeur, elle rencontre le ténébreux Yarmy la Teigne, petit délinquant un peu souteneur à ses heures. Ces deux-là vont s'aimer et s'épouser jusqu'à l'arrivée de Max le Boiteux, de retour des Amériques, que la gourgandine surnomme l'Ange de la Mort.
Pour fuir le Diable, elle quitte la Pologne pour les États-Unis emmenant avec elle Bunem, le fils du rabbin, fiancé à Solcha, l'anarchiste pure et vierge, exacte opposée de la rousse. Mais la malédiction va poursuivre les deux amants...
De ce roman-fable, qui me laisse une impression mitigée, j'ai aimé la description d'un quartier juif de Varsovie dont les habitants solidaires affirment leur religion et leurs traditions contre l'antisémitisme de la population et de l'occupant russe. A contrario, New York est la ville de l'individualisme et du « chacun pour soi ». Les Juifs d'Europe de l'Est qui parlent le yiddish,  « charabia d'une tribu à demi civilisée », y sont mal considérés. J'ai aimé aussi les personnages de Bunem et de Solcha qui sont les métaphores, pour le premier, du doute, pour la seconde, de l'idéalisme.
En revanche, Keila l'hystérique, incarnation du sacrifice, de la repentance et de la rédemption, ne m'a pas touchée. Elle m'a même profondément agacée.

EXTRAIT
Ceux qui mettent au point les lois ne se soucient guère des tempêtes soulevées par les émotions humaines.

Lien : http://papivore.net/autres-l..
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