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8ème tome de la série des 10 romans avec Martin Beck, commissaire à la police criminelle de Stockholm. Martin reprend le service après une longue convalescence. Pour se remettre dans le bain, on lui confie le dossier d'une victime découverte dans sa chambre complètement close, porte munie de verrous et fenêtre fermée. Pendant ce temps, les inspecteurs enquêtent sur un braquage de banque.
Plus que deux tomes et les enquêtes de Martin Beck seront définitivement terminées. Dommage !
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J'avais un très bon souvenir de Roseanna, mon premier Sjöwall / Wahlöö, et peut-être ai-je un peu idéalisé à partir de cette première expérience la série policière de ce célèbre couple d'auteurs suédois. Aujourd'hui, j'en suis à mon troisième roman, et j'avoue que je ne ressens plus le même enthousiasme. Est-ce dû à ces romans en eux-mêmes, ou au fait que romans policiers et séries télévisées du même genre ont connu un succès de plus de plus retentissant ? Car qui aujourd'hui n'a pas vu ces séries presque mythiques que sont devenues entre autres The Killing, Bron/Broen, Trapped, ou encore la version anglaise des enquêtes de Wallander ?

Pour tout dire, l'ambiance pesante de Roseanna, ou encore de L'homme au balcon (à mon sens moins réussi), brille par son absence dans La chambre close. Et pourtant, c'est un petit roman sympathique qui m'a étonnée par l'humour presque constant des auteurs. Humour que je ne leur connaissais pas, pas plus qu'aux scénaristes de The Killing, Bron/Broen ou Trapped. Et contrairement à l'un des préfaciers du roman, Håkan Nesser, je ne crois pas que Sjöwall et Wahlöö aient voulu faire passer un message politique et bêtement radical de gauche. On sent qu'ils se sont amusés à caricaturer la société de l'époque, la politique du gouvernement des années soixante-dix en Suède, sa police, son système économique. Et le message n'est pas si bête que ça, il est juste anti-capitaliste, à sa manière burlesque et outré, ce qui n'a rien de répréhensible (sauf évidemment pour les anciens militants de gauche qui sont aujourd'hui devenus d'ardents néo-libéraux).

Donc, ce n'est pas l'histoire, divisée en deux enquêtes, qui se révèle passionnante, c'est bien plus la manière. Car l'enquête sur l'énigme - éculée - de la chambre close intervient déjà assez tardivement, et ne brille pas par son inventivité. L'autre enquête, plus largement traitée et qui concerne des braquages de banque, n'est pas non plus des plus passionnantes. Et évidemment, on s'attend à ce que les deux se rejoignent ; or la fin est un peu bâclée. D'autant que petit à petit, plus les enquêtes avancent, moins l'humour est au rendez-vous.

Ce qui nous donne là un roman plaisant mais pas complètement réussi, qui permet de passer un bon moment. Sans plus.
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Une jeune femme, apparemment peu sûre d'elle-même, pénètre dans une agence bancaire et commet un hold-up mal préparé ; prise de panique, elle tire et abat un des clients. L'équipe de Martin Beck - Kollberg et Larsson vont devoir collaborer étroitement, malgré leurs différends et surtout sous la coupe du procureur Olson, qui va interférer constamment dans l'enquête, pour faire la lumière et surtout filer une bande de malfaiteurs bien connue pour ce type de délit. Il est vrai que les cambriolages de banques se multiplient, résultat du désespoir de certains et de l'émergence de bandes organisées. Martin Beck, pour sa part, après une longue convalescence de plus d'un an à la suite de la fusillade lors de l'enquête relatée dans L'abominable homme de Säffle reprend du service. Il enquête sur le cas étrange d'un homme retrouvé plusieurs semaines après sa mort dans son appartement dont toutes les issues sont fermées ; l'hypothèse du suicide par arme est vite écartée, aucune arme à feux n'ayant été retrouvée sur les lieux. Qui en voulait à cet homme, manutentionnaire retraité, invalide vivant seul, hors du tissu social ? En s'intéressant à la personnalité de la victime, Marin Beck va découvrir une toute autre histoire, l'homme n'était peut-être pas si tranquille.
Les deux enquêtes vont se rejoindre, sans vraiment que certains des protagonistes ne comprennent vraiment pourquoi et comment...

Un meurtre dans une pièce fermée est un exercice quasi incontournable pour un écrivain de roman policier et Maj Sjöwall et Per Wahlöö s'y prêtent avec La chambre close. On y retrouve un Martin Beck qui a pris un peu de distance pendant sa convalescence et surtout son collaborateur Kollberg, un peu désabusé. Une enquête où la hiérarchie dans la personne du procureur Olson qui oriente systématiquement l'enquête selon ses propres options malheureusement erronées. Une enquête qui révèle des trafics de drogue, d'alcool, de chantage et une société qui se paupérise, laissant de côté les plus fragiles...
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Dès les premières pages, on reconnait le style si particulier des auteurs. Un style descriptif précis où chaque détail semble être important. Ainsi une demi page est consacrée à la description du contenu d'un tiroir presque vide du bureau de l'inspecteur Martin Beck, au commissariat de Västberga! Ce style participe à créer une ambiance un peu mystérieuse et teintée d'humour. On retrouve très vite aussi nos vieilles connaissances : les agents Kristiansson et Kvant "nos deux crétins". Quand ils se mêlent de quelque chose, ça part mal. Et là visiblement, ils ont ignoré qu'il est difficile de se suicider d'une balle en plein coeur dans un appartement ultra-verrouillé… sans aucune arme à feu à l'intérieur du logement. On est ainsi précipité, dès le début, dans un mystère de chambre close. Et Gustavsson, leur chef, sait quoi penser de ces "énigmes impossibles à résoudre : on voit tout de suite qu'il vaut mieux abandonner". Mais Martin Beck ne l'entend pas de cette oreille et "n'est pas décidé à abandonner. En tout cas, pas avant longtemps."
.
On prend toujours beaucoup de plaisir à lire Sjöwall et Wahlöö. Ainsi les interrogatoires des témoins du braquage meurtrier d'une banque sont savoureux : il n'y a en pas deux qui disent la même chose et aucun n'a vraiment vu ce qui s'est passé, puisque le lecteur sait comment l'auteur des faits s'est enfui et peut comparer la vérité à ces témoignages fantaisistes. On va aussi assister à la préparation minutieuse "du coup du siècle" par deux braqueurs que la police de Stockholm voudrait bien prendre en flagrant délit. Avec toujours un certain humour sous-jacent. On retrouve à cette occasion Bo Zachrisson "un bon à rien d'agent de police" déjà rencontré dans d'autres romans des mêmes auteurs. Car il n'y a pas que des super policiers chez Sjöwall et Wahlöö : ainsi une tentative d'arrestation menée par le procureur Bulldozer Olsson tourne au fiasco et apparait aussi comique qu'une pièce de Feydeau!
.
Dans un tout autre registre, certains passages de la chambre close dénotent de l'engagement politique des auteurs. À gauche. Ainsi, à propos du futur immeuble du QG de la police nationale, ils écrivent : "il devait abriter une direction centralisée et planifiée de type totalitaire". Ou cette remarque sur la Säpo "qui au fond ne servait à rien puisqu'elle s'obstinait à mettre en fiche les communistes tout en ignorant diverses organisations fascistes." Ou encore : "attaquer une banque peut être justifié par des raisons politiques." Est-ce parce qu'ils sont engagés à gauche et qu'ils combattent toute forme de pouvoir fort que la plupart des policiers de ce roman apparaissent incompétents ou ridicules? Une façon de lutter par le biais de la littérature? Qu'importe, cela n'enlève rien à l'excellence de ce roman policier qu'on ne peut pas cataloguer, tellement il est unique dans l'univers du polar.
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«Le retour de Martin Beck»
En convalescence «une affaire» lui est confiée aimablement pour qu'il puisse la traiter de son fauteuil.
Une affaire avec «des faits inexplicables… On voit tout de suite qu'il vaut mieux abandonner» lui dit un collègue ayant travaillé dessus.
Mais bon ce n'est pas le genre a dégoûter Martin Beck bien au contraire et puis la convalescence lui a pesé un peu.

Une narration qui mêle en alternance drôlerie et pondération réglementaire.
On a droit d'un coté à un humour un peu suranné et plutôt balourd de l'équipe de police anti-gang qui planche sur un hold-up.
Un procureur complètement halluciné à coté de ses pompes, à certains comportements et dialogues se voulant désopilants mais sans finesse et très potaches.
Une scène improbable de prise d'assaut d'un appartement…vide... avec gaffes sur gaffes des policiers assaillants, véritable comédie policière anglaise à gags, une peu lourde quand même du style «hot stuff»
Un interrogatoire peut-être inspiré par l'inspecteur Juve tournicotant autour de Fandor avec ses «tu mens, tu mens, il ment, tais-toi!» dans le Fantômas de 1964
Une souricière qui vire à un fiasco digne du gendarme Cruchot et de ses bras cassés sur la plage des nudistes.

D'un autre coté à un sérieux très sage de la part de l'inspecteur Beck: un vieux de la vieille avec lequel il ne faut pas rigoler et qui appelle un chat un chat
Plutôt porté sur la règle et l'introspection sans fard, opiniâtre qui ne lâche rien en passant par la petite porte.
Avec ténacité et méthode il remonte à l'origine de l'affaire confiée: un banal suicide dans un appartement complètement fermé à clef « de l'intérieur» comme les WC de Coluche, suicide par balle mais sans arme à feu… «Une énigme véritablement impossible à résoudre un nouveau «mystère de la chambre jaune»

Au centre deux affaires, le hold-up avec mort d'homme et l'énigme de « la chambre close », apparemment sans lien mais qui après quelques investigations sont moins étrangères qu'on aurait pu le penser et vont se croiser. Encore faut-il penser à croiser les faits et cela ne semble pas évident avec cette police suédoise.

Une histoire plutôt sympathique et assez anodine avec un seul mort et encore par «accident» et un «suicidé» pas très net époque où on ne tirait pas systématiquement sur tout ce qui bouge: une violence disons humaine de proximité.

Les auteurs ont dans leur démarche générale une volonté de se gausser de la police fonctionnaire et tourner en ridicule le comportement de certains comportement carriéristes et de l'incompétence d'individus profiteurs du système. du grand guignol un peu étonnant de la part de Sjöwall et Wahlöö: ils se sont lâchés!

Mais ils louent quand même le professionnalisme de certains et qui en général n'en sont pas même remerciés.
Une enquête, du moins celle de Martin Beck, vraiment pour très très grand convalescent. L'autre plus débridée mais trop farfelue et une fin plutôt immorale, comme se le permet parfois un autre écrivain de policier Andréa Camilleri, immorale car les méchants ne sont pas punis ou punis pour autre chose ce qui revient au même.

Mais il y a quand même un heureux : Martin Beck
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Que la quatrième de couverture nous rappelle que "Maj Sjöwall et Per Wahlöö ont écrit, entre 1965 et 1975, une série de dix romans mettant en scène l'enquêteur Martin Beck et son équipe." est une bonne chose.
Qu'il y soit précisé que "Leur oeuvre, qui n'a pas pris une ride, a marqué la littérature policière occidentale." En est une autre.
Tout le monde reconnaît qu'ils ont été les précurseurs du polar social et que dans la plupart de leur titre, "leur oeuvre n'a pas pris une ride", mais "la chambre close" est vraiment un cas particulier.
Ce n'est pas là un polar social mais une farce....

Martin nous est présenté comme un homme usé, vivant à la périphérie du réel qui l'entoure, seul dans son monde et dans ses réflexions, désabusé et déçu par la "Société".
L'équipe de Martin nous est présentée comme une bande d'incapables, caricatures de débiles, prête à tous les raccourcis pour être le plus vite possible tranquille.
Les voleurs sont présentés comme des êtres intelligents sauf quand ils ont abusé de l'alcool ou d'autres choses.
Par contre le bon sens de l'homme de la rue, le prolo, n'est jamais mis en doute, le fait de travailler dur, d'être ouvrier donne un label de vérité.
Un exemple parmi d'autres :
"Il est souvent intéressant d'écouter les vieux ouvriers et incompréhensible que presque personne ne prenne le temps de le faire. ..... Pourquoi ne donnait on jamais la parole à ce genre de personnes, dans les médias ? Les politiciens et les technocrates les écoutaient ils jamais ? Certainement pas car, dans ce cas, ils auraient évité bien des bêtises sur des questions relatives à l'emploi ou à l'environnement social."

La chambre close est un roman à part dans leur oeuvre, il faut le voir comme une caricature des pensées de certains intellectuels de l'époque souhaitant affirmer que l'homme du peuple a toujours raison.

Éclairés par les scores électoraux des derniers temps, avec la montée des populismes, ici et ailleurs, j'ose espérer qu'il auraient remis en cause ce postulat vraiment trop simpliste !
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La chambre close : publié en Suède en 1972 sous le titre original "Det slutna rummet".

Le roman d'un crime, huitième titre de la série.

L'édition en format poche chez Rivages ( 2009 ) est préfacée par Michael Connelly ( le créateur d'Harry Bosch ) et par Håkan Nesser ( auteur suédois ).

3 juillet 1972, le commissaire Martin Beck chef de la brigade criminelle suédoise reprend du service après quinze mois d'une longue convalescence nécessaires après avoir été blessé par balle ( voir ICI ). Triste retour à la réalité, sombre portrait de la Suède que les auteurs ( de gauche ) dressent sans complaisance et sans retenu. Il est étonnant de constater que ce portrait est très actuel bien qu'écrit il y a près de ... cinquante ans.

Sur fond de manifestations contre la guerre du Vietnam, de nouvelles constructions défigurent les quartiers de Stockholm qui sont également vidés de leurs traditions. le taux de chômage explose ( et nous ne sommes qu'en 1972 ! ). Les personnes âgées vieillissent seules, pauvres, privées d'identité et de dignité après une longue vie de travail. La société de veut plus d'elles et les regroupe dans des établissements qui ne sont plus appelés hospices mais maisons de retraite. Seul le nom à changé. Toute opposition politique est qualifiée de communiste, prétexte pour que les manifestations soient violemment réprimées. le taux de suicides à Stockholm est un des plus élevés au monde. Karl Edvin Svärd, un retraité vivant seul s'est-il suicidé ? Son cadavre est resté près de deux mois sans que personne ne s'en aperçoive. On a retrouvé Svärd tué d'une balle dans son minuscule appartement toutes les fenêtres et les portes fermées de l'intérieur. L'enquête a été bâclée, l'arme du suicide n'a même pas été trouvée. Ce dossier va rejoindre le lot des affaires non élucidées. Mais c'est sans compter sur la rigueur et la ténacité de Martin Beck. A la même époque Per Wahlöö s'opposait à Maria Lang la figure de prou du "whodunit" suédois.

La critique sociale prend le dessus sur le polar dans ce roman mais sans sombrer dans le tragique. Une autre affaire criminelle occupe la Police de Stockholm et la brigade de répression du banditisme. le braquage d'une banque a mal tourné et fait une victime innocente. L'enquête est dirigé par le procureur Sten Olsson surnommé Bulldozer. Rien ne lui résiste, il soupçonne immédiatement un gang organisé. Lors d'une première tentative d'arrestation, la brigade se couvre de ridicule. le lecteur peut s'attendre à rire encore lorsque Bulldozer acquiert la certitude que ce gang prépare le casse du siècle ...

Quel talent des auteurs ! Ils nous font sourire, réfléchir à l'évolution des sociétés. Martin Beck jalonne le roman par sa présence forte, policier habile, attendrissant lorsqu'il rend visite à sa mère et qui donne une leçon de vie lorsqu'il partage des instants avec Rhea.

Lien : http://cercle-du-polar-polai..
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C'est le premier titre que j'aborde de ce duo d'auteurs ,généralement présentés comme les précurseurs du polar social suédois.Le héros de cette série est l'enquêteur Martin Beck,un quincagénaire divorcé et solitaire qui effectue lors de cet épisode sa reprise du travail après une longue convalescence due à une vilaine blessure recoltée lors d'une affaire précédente.Pour le ménager;on lui confie une affaire sensée être "tranquille" qu'il devra résoudre en solo:une sorte d'énigme entourant la mort suspecte d'un vieil homme vivant en ermite dans un appartement a priori fermé de l'intérieur,un casse-tête digne d'un roman de Conan Doyle.Nous suivons en parallèle une seconde enquête menée par les collègues de Martin Beck concernant la traque d'une bande de braqueurs de banques jusqu'à ce que les deux affaires se rejoignent.....Ce titre ,huitième d'une série de dix,a été publié pour la première fois en 1972.En marge de ces enquêtes,Sjöwall et Wahlöö brossent un tableau très féroce de la société suédoise de l'époque,de ses institutions,soulignant en particulier l'inefficacité et la brutalité de sa police dont l'incompétence tourne parfois au burlesque.On ne s'ennuie pas une seconde à la lecture de ce roman dense,bien rythmé et très prenant.La présente édition a été améliorée car effectuée directement du suédois au français par opposition à celle de 1987 réalisée à partir de la traduction anglaise.Toutes les qualités de cet excellent roman sont remarquablement mises en avant par les préfaces de Michael Connelly et de Hakan Nesser.
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Sjöwall Maj et Wahlöö Per – "La chambre close" – rééd. Rivages/noir, 2009 (ISBN 978-2-7436-2028-8)
– original suédois publié en 1972
– Première édition française publiée en 1987
- Roman traduit directement du suédois par Philippe Bouquet.
– Deux préfaces, l’une de Michael Connelly (cop. 2009), l’autre de Hakan Nesser (cop. 2009).

Ce livre présente à mes yeux deux aspects forts différents. En effet, de prime abord, il s’agit d’un roman policier, reprenant d’ailleurs l’un des thèmes classiques du genre, à savoir le mystère autour d’une victime retrouvée morte assassinée dans une chambre close depuis l’extérieur, thème conjugué avec celui d’un hold-up dans une agence bancaire qui fait une victime parmi les clients présents, l’agresseur parvenant à s’enfuir sans laisser de traces. Bien entendu, les deux intrigues finissent par se rejoindre, et nos auteurs ajoutent alors un autre thème plus original, celui du malfaiteur qu’il s’avère impossible, faute de preuves, de condamner pour son crime réellement commis mais qui du même coup est condamné pour l’autre crime qu’il n’a pas commis mais dont il ne peut plus se dépêtrer de par ses propres déclarations.
Tout cela est mené avec une grande dextérité par nos deux auteurs (qui fournissent même une sorte de théorie du thème de la chambre close en page 354), mais (il convient de le souligner) en fondant leur récit sur la conviction – maintes fois réitérée au cours du récit – que la police serait dans sa quasi-totalité composée d’imbéciles et de crétins, à la seule exception des deux ou trois enquêteurs dont le héros Martin Beck (exemple pp. 85, 241). Ce fondement engendre certes des scènes cocasses (surtout autour de l’équipe placée sous les ordres de «Bulldozer Olsson»), mais aussi et surtout des situations caricaturales peu crédibles.

L’autre aspect est (toujours à mes yeux, nostalgie, nostalgie) beaucoup plus intéressant : ce roman policier constitue un véritable compendium des croyances, attitudes, discours et modes de vie de cette frange gauchiste de la population principalement intellectuelle qui s’agitait régulièrement dans ces années-là.
Dès le chapitre 3, page 34, les auteurs spécifient que le récit commence précisément à la date du 3 juillet 1972 (le chapitre 19 est daté tout aussi précisément du 6 juillet 1972) : nous sommes dans les années d’agitation post-soixante-huitarde, avec les posters de Lénine et Mao (page 225) et les manifestations contre la guerre menée par les Etats-Unis au Vietnam (pp. 87, 307).

En Suède comme en France et dans les pays occidentaux, ces cercles intellectuels ne s’embarrassaient pas de nuances excessives, usant et abusant d’un vocabulaire outrancier comme par exemple en page 90 :
« Que peut-on faire quand on voit sa propre organisation se décomposer sous ses yeux ? Quand on entend les rats du fascisme courir derrière la cloison ? »
(en France, on se souvient du stupide « CRS-SS » hurlé à plein poumons à la vue du moindre képi par des gens qui n’avaient aucune conscience de ce que fut réellement le nazisme).
Ainsi, la presse en prend pour son grade (p. 79), les hommes d’affaire se voient portraiturés en «grands criminels» (p. 127 – il faut convenir que le coup des «parachutes dorés» défraie encore aujourd’hui la chronique), la loi est «conçue afin de protéger certaines classes sociales et leurs intérêts douteux» (p. 221), et de toute façon «en Suède, quand les classes supérieures boivent, on parle de culture œnologique, tandis que les autres sont immédiatement qualifiés d’alcooliques et de cas médicaux, ce sur quoi on s’empresse de la abandonner à leur triste sort» (toujours p. 221), la pilule va libérer la sexualité des jeunes (p. 236), le transport par containers sert à frauder à grande échelle (p. 350), les compagnies d’assurance sont des monstres assoiffées de profits (p. 379). Et ce ne sont là que des thèmes brièvement esquissés.

L’une des obsessions majeures des cercles intellectuels gauchistes de toute nationalité occidentale, résidait dans «la violence policière», la mise en place d’une société dominée par «l’idéologie sécuritaire» obsédée par la chasse aux communistes ou autres gens de gauche. Dans ce registre, nos auteurs atteignent des sommets : les pôvres manifestants pacifiques se font matraqués (p. 87) par des policiers avides de sang, «armés jusqu’aux dents» (p. 88), bientôt tous à la solde d’un «Etat dans l’Etat» (p. 201) s’incarnant dans un nouvel immeuble qui «devait abriter une direction centralisée et planifiée de type totalitaire» (p. 202), le tout sous la coupe de la Sûreté d’Etat «qui au fond ne servait à rien puisqu’elle s’obstinait à mettre en fiche les communistes tout en ignorant diverses organisations fascistes plus ou moins exotiques» (p. 219) et dont la description sommaire atteint tout simplement au ridicule (p. 307).

Un autre thème typique de l’extrême-gauche de cette période est abordé plus succinctement, celui du rapport entre la délinquance criminelle de droit commun et son rôle éventuellement «révolutionnaire» : il est esquissé par Monita, la complice involontaire du trafiquant Mauritzon (page 278), puis il est largement développé dans un dialogue (pp. 288-291), le personnage du récit faisant appel à Lundkvist (récipiendaire en 1958 du glorieux prix Lénine, quelle référence !) et à son «anthologie intitulé L’Homme socialiste» ; cet interlocuteur va encore plus loin en énonçant benoîtement (p. 290) l’un des crédos de cette époque : dans la toute belle société socialiste, il n’y a plus de bandits ni de voleurs car «pourquoi les gens attaqueraient-ils ce qui leur appartient, là-bas ?»

Il se trouve par ailleurs que ce roman effleure çà et là des thèmes nouveaux, dont on ignorait à l’époque l’importance qu’ils allaient prendre jusqu’aujourd’hui : ainsi du passage poignant (pp. 102-107) dans lequel Martin Beck découvre le nouvel état de sa mère âgée, reléguée dans ce que l’on venait de nommer une «maison de retraite» ou l’allusion (p. 137) à cette pornographie qui déferle aujourd’hui à plein régime via Internet et dont la Suède fut à cette époque le foyer, ou encore le chômage endémique très bien illustré par le destin de Monita (pp. 266-273).

Ceci étant, j’ai bien sûr gardé le meilleur pour la fin, à savoir le tableau du milieu gauchiste lui-même, magnifiquement rendu ici par la rencontre de Beck avec Rhea Nielsen (qui apparaît d’abord de façon anodine en p. 210). La première rencontre est longuement décrite (pp. 223-247), la deuxième plus succinctement (pp. 351-358) et la troisième (pp. 377-378) n’a plus besoin de commentaire superflu. Dans la réalité de ces années-là, il a réellement existé des gens comme cette Rhea Nielsen imaginaire, il a réellement existé des maisons dont nul ne songeait à fermer la porte à clé, où tout un chacun venait sonner à toute heure à la porte du voisin pour demander tel ou tel service…

Pour conclure, la préface émanant de Michael Connelly ne présente que fort peu d’intérêt, alors que celle de Hakan Nesser rejoint tout à fait mes propres constatations : Sjöwall et Wahlöö vivaient à une époque où les gens se croyant «de gauche» se racontaient de belles histoires et se berçaient de jolis rêves tout roses, c’était avant que cette «gauche» ne se voit phagocytée puis supplantée par la «gôôôche» bien-pensante d’aujourd’hui, celle des bobos arrogants.

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Adorant la collection Rivages/Noir, j'ai tenté l'expérience avec un petit policier made in Suède. Au final, le résultat que j'attendais n'est guère au rendez-vous, mais La chambre close met d'autres atout en avant.

Ce livre met en exergue deux enquêtes policières qui semblent différentes mais qui sont étroitement liées. L'une, que mène seul Martin Beck, est le "suicide" d'un homme dans une chambre qui était fermée de l'intérieur. La seconde enquête menée par Bull, vise à arrêter deux grands gangsters qui, selon des sources, vont faire le coups du siècle prochainement.

Je parlais un peu plus haut d'autres atout qu'avais La chambre close. le principal est la dénonciation forte des auteurs, envers la société Suédoise. Et tout y passe, le Gouvernement lui-même qui ne cherche qu'à augmenter son propre profit au détriment de son peuple, à la police corrompue jusqu'à la la moelle et qui enchaîne bourde sur bourde, à la population qui ne réagit pas et qui s'autodétruit en pillant, volant, et agressant... Chaque page de ce policier dégoulinent d'accusation, de dénonciation face à ces évènements. C'est un atout dans le sens où, en plus de mener une enquête, les auteurs décrivent la société Suédoise des années 60-70 ; façade de démocratie, sous la croûte il n'y a rien d'autre que le profit fait par les bourgeois laissant crever les autres catégories sociales.
Le second atout de ce roman est les deux enquêtes, mais qui aussi pour moi cache une faiblesse. En effet celles-ci avancent parallèlement, on ne se perd pas dans les enquêtes ce qui est déjà bien. Cependant, quand j'ai terminé le livre, j'ai trouvé que le lien entre les deux enquêtes n'était pas aussi exceptionnel que ce à quoi je m'attendais. Quand nous nous retrouvons confronté à un "suicide" dans une chambre fermée de l'intérieur sans retrouver d'arme, on peut s'attendre à un retournement de situation, quelque chose de surprenant. Ici non, la fin je l'ai trouvé plutôt plate, j'ai peut être un trop bon souvenir de Dix petits nègres de notre chère A.Christie ? :\
Le troisième atout est son rythme : pas de longues descriptions, c'est un policier qui se lit très facilement - sauf pour les noms de lieux, quand on est français ils sont juste incompréhensibles, mais après c'est un détail de langue -.

Concernant les personnages, j'ai bien aimé Beck qui n'est autre que le commissaire en chef de la brigade criminelle de Stockholm - s'il vous plaît ... -. Malgré un retour à son poste après une longue convalescence du à une - comme il le dit si bien lui-même - bourde de sa part, Beck se voit chargé de l'affaire du "suicidé", qui a été bâclé dès le départ. Pourquoi est-ce que j'ai apprécié ce personnage ? Loin d'être attachant comme certains personnages qui ont pu croiser mes yeux, Beck est un homme distant, allant droit au but, sans fioritures ni chichis. Cet homme pose les questions, et les bonnes, ne passant pas par quatre chemin avec un suspect, déduisant, s'escrimant à résoudre une affaire que personne ne veut.
Je dirais que Martin Beck est le seul qui pour moi, a eu un véritable intérêt dans ce livre. Non pas que les autres soient négligés, mais ils forment tous une masse compacte de profiteurs, de corrompus - à l'exception près de Rhea -.

Comme je l'ai dit précédemment le seul point noir véritable pour moi est la fin qui m'a déçue. Je m'attendais vraiment à quelques chose de plus complexe et je suis resté un peu sur ma faim. A certains passages, les dialogues sont pour moi un peu bâclés, ils sonnent faux. Je ne sais pas mettre de mots sur ce que j'ai ressentie mais quelques chose clochait. Passons.

Pour résumé : Un petit policier tout simple, la plume des auteurs méritent la lecture. Deux enquêtes entraînantes, en fond de paysage une Suède pourrie et meurtrie, un anti-héros qui est devenue héros et qui détonne par son fond de justice face au système. Dommage qu'il y ait cette sensation de manque au dénouement, si j'ai encore l'occasion de lire des oeuvres de Per Wahlöö et Maj Sjöwall je le ferais sans problème.
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