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Citations sur Dans le Jardin de l'Ogre (234)

Et puis, ils sont allés à Montmartre. « Ça plaira à la petite », répétait Monsieur. Place Pigalle, ils ont pris le train touristique et Adèle, coincée entre sa mère et l’homme, a découvert le Moulin-Rouge avec terreur.
Elle garde de cette visite à Pigalle un souvenir noir, effrayant, à la fois glauque et terriblement vivant. Sur le boulevard de Clichy, vrai ou pas, elle se souvient d’avoir vu des prostituées, par dizaines, dénudées malgré la bruine de novembre. Elle se souvient de groupes de punks, de drogués à la démarche chancelante, de maquereaux aux cheveux pommadés, de transsexuels aux seins pointus et aux sexes moulés dans des jupes léopards. Protégé par le cahotement du train aux allures de jouet géant, serrée entre sa mère et l’homme qui se lançaient des regards lubriques, Adèle a ressenti pour la première fois ce mélange de peur et d’envie, de dégoût et d’émoi érotique. Ce désir sale de savoir ce qu’il se passait derrière les portes des hôtels de passe, au fond des cours d’immeuble, sur les fauteuils du cinéma Atlas, dans l’arrière-salle des sex-shops dont les néons roses et bleus trouaient le crépuscule. Elle n’a jamais retrouvé, ni dans les bras des hommes, ni dans les promenades qu’elle a faite des années plus tard sur ce même boulevard, ce sentiment magique de toucher du doigt le vil et l’obscène, la perversion bourgeoise et la misère humaine.
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Il approche sa bouche et une onde électrique parcourt le ventre d'Adèle. La décharge atteint son sexe, le fait exploser, charnu et juteux, comme un fruit qu'on épluche. La bouche de l'homme a le goût du vin et des cigarillos. Un goût de forêt et de campagnes russes.
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Il n'osera pas.
Et pourtant, si.
Ses gestes ne trompent pas. Ce sont toujours les mêmes.
Il arrive dans son dos.
Le baiser dans le cou.
Cette main sur la hanche.
Et puis ce murmure, ce gémissement qu'il accompagne d'un sourire suppliant.
Elle se tourne, ouvre la bouche dans laquelle la langue de son mari s'enfonce.
Pas de préliminaires.
Finissons-en, pense-t-elle en se déshabillant, seule, de son côté du lit.
On y retourne. L'un contre l'autre. Ne pas cesser de s'embrasser, faire comme si c'était vrai. Poser sa main sur sa taille, sur son sexe. Il la pénètre. Elle ferme les yeux.
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Adèle regarde ses pieds. Ses mocassins vernis sont trempés par l'herbe mouillée. Ce ne sont pas des chaussures pour la campagne.
"Donne-moi les clefs" demande-t-elle à Richard.
Elle s'assoit dans la voiture, se déchausse et réchauffe ses orteils avec ses mains.
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Tu sais ce qui me dégoûte le plus ? C'est de dépendre de toi. C'est de ne même pas pouvoir te dire de dégager, de ne même pas pouvoir me lever pour te frapper, pour te jeter tes affaires à la gueule, pour te pousser dehors comme la chienne que tu es. Tu pleures ? Tu peux pleurer, je n'en ai plus rien à faire. Moi qui n'ai jamais supporté tes larmes, j'ai envie de t'arracher les yeux. Mais qu'est ce que tu as fait de moi ? Qu'est ce que cette histoire a fait de moi ? Un idiot, un cocu, un pauvre type. Tu sais ce qui m'a fait le plus de peine ? C'est ce carnet noir. Oui, le carnet noir dans ton bureau. J'ai lu ce que tu écrivais, sur ton ennui, sur cette vie de bourgeoise merdique. Non seulement tu te fais baiser par une armée mais en plus tu méprises tout ce qu'on a construit. Tout ce que j'ai construit, moi, en travaillant comme un chien pour que tu aies tout ce qu'il te faut. Pour que tu n'aies à t'inquiéter de rien. Tu crois que je ne rêve pas, moi, d'un au-delà à cette vie ? Tu crois que je n'ai pas de rêves, pas d'envie de fuite ? Que je ne suis pas, moi aussi, romantique, comme tu dis ? Oui, pleure. Pleure jusqu'à en crever. On aura beau dire, tu pourras trouver toutes les explications du monde, tu es une salope, Adèle. Une vraie raclure.
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Elle soulève les épaules et éclaté de rire. Richard la regarde, interdit. Il avait complètement oublié le bruit de son rire. Ce bruit d'eau vive, de torrent. Ce bruit de gorge qui lui fait renverser la tête et dévoiler son long cou. Il ne se souvenait plus de cette façon étrange qu'elle a de placer des mains devant sa bouche et de fermer les yeux, dans une grimace qui donne à son rire un air un peu moqueur, presque méchant. Il a envie de la serrer contre lui, de se nourrir de cette joie soudaine, de cette gaieté qui leur a tant fait défaut.
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Une histoire triste qui me rappèle surtout le roman de Joseph Kessel Belle de jour.
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Face au miroir piqué du hall d’immeuble, elle lisse ses traits et se regarde mentir.
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À côté de la collection d’allumettes de bars d’hôtels, Simone a installé l’urne funéraire en porcelaine blanc et rose. On dirait une grosse boîte à biscuits ou une vieille théière anglaise. En une nuit, son père est passé du fauteuil noir à l’étagère du salon.
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Qu’importe la solidité de la vie, la sainte franchise et l’abominable transparence. Peut-être que s’il se tait, cela tiendra quand même. Il suffirait sans doute de fermer les yeux. Et de dormir.
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