Le manoir de Tyneford a croisé ma route dans ma boutique Emmaüs. Je n'en avais jamais entendu parlé, mais le titre, puis la couverture, et enfin le résumé, ont su me convaincre de le ramener à la maison. Ce livre semblait être tout ce que j'aime, au point que j'ai tout de suite ressenti le besoin de limiter mes attentes, pour ne pas être déçue à la lecture.
Nous sommes au printemps 1938, à Vienne. Elise, jeune fille de la bonne société bourgeoise et artiste de la ville, voit monter l'antisémitisme et les lois raciales dans son pays. Elle est finalement contrainte de le quitter, et doit pour rejoindre l'Angleterre devenir domestique dans un grand manoir du Dorset. Après des premiers pas difficiles, un changement de vie radical, Elise va peu à peu trouver sa place, et plus.
J'ai beaucoup aimé ce roman historique. La personnalité d'Elise, son évolution, ses relations avec les habitants du manoir ou du village, maîtres, domestiques ou invités... m'ont captivée.
J'avais peur que l'on soit davantage dans une romance historique que dans un roman historique. du romanesque, certes, il y en a, mais j'ai trouvé que l'équilibre était réussi entre histoire et romance. J'ai noté des rebondissements auxquels je ne m'attendais pas, mais dont j'ai trouvé qu'ils rendaient finalement l'histoire plus réaliste. Oui, c'est la guerre et tout le monde n'en reviendra pas. Oui, on peut aimer diverses personnes, de différentes manières. Oui, la vie se charge de changer les gens, et l'on n'est plus à 30 ans la même personne qu'à 20, d'autant plus en ces temps troublés.
J'ai beaucoup aimé que le roman traite du sujet des réfugiés, qui n'est pas si courant dans les romans historiques. Il me semble que l'autrice s'est inspirée de sa propre histoire familiale, de l'exil de sa grand-tante. Elle rend très bien la difficile intégration de ces réfugiés, tiraillés entre le soulagement d'être en sécurité, le sentiment d'injustice face au déclassement social que cela représente malgré tout, et surtout l'inquiétude pour les proches toujours en danger.
Le style m'a beaucoup plu, je l'ai trouvé travaillé et poétique à la fois, tout en restant facile à lire. J'ai adoré les nombreuses descriptions des paysages anglais, la lande, le manoir gothique, la propriété qui s'étend jusqu'à la mer...
Pour la fin, nostalgique et un brin douce-amère, l'autrice explique s'être inspirée d'un véritable village fantôme annexé par l'armée lors de la Seconde Guerre Mondiale. de mon côté, je n'ai pas pu m'empêcher de comparer Tyneford House à Manderley, demeures qui marquent les personnages même des années après les avoir quittées.