Citations sur La tristesse des anges (343)
Et le jour se lève avec lenteur.
Les étoiles comme la lune disparaissent et bientôt la clarté, l’eau bleutée du ciel, vient tout inonder, cette délicieuse lumière qui nous aide à nous orienter à travers le monde. Pourtant, elle ne porte pas si loin, cette clarté, elle part de la surface de la terre et n’éclaire que quelques dizaines de kilomètres dans l’air où les ténèbres de l’univers prennent ensuite le relais.
Sans doute en va-t-il de même pour la vie, ce lac bleuté à l’arrière duquel l’océan de la mort nous attend.
Les flocons se déversent, la neige envahit l’espace entre ciel et terre, elle relie l’air et le sol, on ne voit plus entre les deux aucune différence, tout se confond et les deux hommes doivent s’attendre à rencontrer des anges en plein vol au sein de l’éternité.
Vous pouvez me croire quand nous affirmons qu’en été nos landes peuvent être agréables et tout simplement belles, la bécassine des marais fend les airs, une goutte de pluie s’accroche à un brin d’herbe, un ru coule en silence entre deux versants couverts de végétation et parsemés de butte de terre, semblables à des chiens endormis, chaque bruit semble d’une certaine manière tendre vers le silence. Celui qui traverse ces landes par une belle journée d’été ensoleillée peut être saisi du sentiment qu’il a atteint les terres de l’éternité. Il y a aussi les soirées tranquilles et rêveuses de l’hiver avec la lune et les mille étoiles qui scintillent comme d’antiques poèmes au-dessus de la terre…
Celui qui est parti, solitaire, traverser les landes, plongé dans le calme d’une nuit d’été, celui qui a connu la compagnie du ciel et des oiseaux qui peuplent les tourbières, n’a sans doute pas vécu en vain.
Les étoiles comme la lune disparaissent et bientôt la clarté, l’eau bleutée du ciel, vient tout inonder, cette délicieuse lumière qui nous aide à nous orienter à travers le monde. Pourtant, elle ne porte pas si loin, cette clarté, elle part de la surface de la terre et n’éclaire que quelques dizaines de kilomètres dans l’air où les ténèbres de l’univers prennent ensuite le relais. Sans doute en va-t-il de même pour la vie, ce lac bleuté à l’arrière duquel l’océan de la mort nous attend.
[...] La poésie ne nous rend pas humbles ou timides, mais sincères, c'est là son essence et son importance.
La nuit doit être plutôt avancée, elle revient au monde depuis de si grandes profondeurs, depuis un rêve si abyssal. Le lit de son époux est dans un cagibi situé au fond de la chambre, ils ne dorment plus ensemble depuis des années, c'est à peine si elle se souvient de la sensation que procure le contact tiède d'une chair. Mais elle croit, on ne se refait pas, que tôt ou tard la lumière illuminera à nouveau le monde, la brume de ses yeux et les ténèbres qui cernent Kjartan se dissiperont, alors une nuit il viendra s'allonger tout contre elle, la prendra dans ses bras, la chair trouvera la chair, les lèvres trouveront les lèvres, une âme trouvera une âme.
les yeux baissés, le mains enfoncées dans ses poches, l'air fragile, incliné dans la pénombre, certaines personnes sont fermées comme des coquilles, grises et banales d'apparence, trop vite jugées, mais elles possèdent sans doute au fond d'elles une incandescence qu'il n'est donné de connaître qu'à peu de gens, et parfois à personne.
Les mot écrits peuvent avoir plus de profondeur que ceux qui sont dits, comme si le papier libérait des mondes inconnus, prisonniers d'un enchantement. Le papier est leur terre fertile.
Le dos appuyé au mur, il l'observe pendant qu'elle attise les braises. En ce bout du monde, les femmes savent arracher le feu à son sommeil, elles accomplissent ce geste chaque matin, et depuis des centaines d'années. Ailleurs, bien loin d'ici, de grands hommes ont réfléchi sur l'humanité et sur l'univers, ils ont découverts des planètes, des vers de poésie ont vu le jour, des empereurs, des rois, des généraux ont exterminé la vie autour d'eux et c'est ainsi que l'Histoire a connu ses flux et ses reflux; les années s'assemblent en siècles et pendant tout ce temps, ici, à la limite du monde, des femmes se sont éveillées avant Dieu et les hommes pour s'agenouiller devant le fourneau et ranimer les braises qu'elles avaient confiées à la nuit. La tâche peut prendre une heure, elles soufflent sans désarmer, car que serait la vie en l'absence de feu alors que le froid règne partout ? Elles soufflent, elles s'épuisent, quand la fumée consent enfin à s'élever et vient aussitôt leur baigner le visage, les yeux se mettent à les piquer, et les larmes coulent. Cette fumée leur permet de pleurer. Ici, il est bon de verser des larmes. Meurent les enfants, meurent les rêves, la lueur qui scintille en chacun s'affadit jusqu'à disparaître; et ceux qui ne pleurent pas se changent en pierres. Elles soufflent sur la braise. peut-être pleurent-elles car on peut ranimer un feu, mais pas un homme.