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Citations sur Tolstoï ou Dostoïevski (30)

Un lecteur pourra les regarder comme les deux plus grands maîtres du roman, c'est-à-dire qu'il pourra trouver chez eux la peinture de la vie la plus complète et la plus pénétrante ; mais pressez-le, et il va choisir entre eux. S'il vous dit lequel il préfère, et pourquoi, vous aurez pénétré, je crois, sa propre nature. Le choix entre Tolstoï et Dostoïevski préfigure ce que les existentialistes appellent un engagement ; il implique l'une ou l'autre de deux interprétations radicalement opposées de la destinée humaine, de l'avenir historique et du mystère de Dieu.
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Selon les termes de Comte, Tolstoï fut un « serviteur de l'humanité ». Dostoïevski repoussait âprement le credo humanitaire et préférait demeurer avec les « serviteurs de Dieu », pleins d'angoisse, de faiblesse et parfois de criminelle folie.

Entre ces deux formes de servitude peuvent régner de grandes haines.
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Les œuvres de Tolstoï et de Dostoïevski illustrent de manière éclatante le problème de la croyance en littérature. Elles exercent sur notre esprit des pressions et des poussées d'une force si évidente, elles mettent enjeu des valeurs si évidemment parentes des grandes questions politiques de notre temps que nous ne pouvons pas, même si nous le voulions, y réagir sur un plan purement littéraire. Elles demandent au lecteur deux sortes d'adhésion ardente et qui souvent s'excluent mutuellement. On ne se contente pas de lire Tolstoï et Dostoïevski, on croit en eux.
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Les romans de Dostoïevski marquent les étapes successives d'une enquête sur l'existence de Dieu. En eux s'est élaborée une philosophie profonde et fondamentale de l'action humaine. Les héros de Dostoïevski sont ivres d'idées et brûlés par le feu des mots. Ce qui ne veut pas dire qu'ils soient des types ou des personnifications allégoriques. Nul, à l'exception de Shakespeare, n'a représenté plus complètement les énergies complexes de la vie. Cela veut dire simplement que des personnages comme Raskolnikov, Muichkine, Kirilov, Versilov, Ivan Karamazov se nourrissent de pensée comme d'autres humains se nourrissent d'amour ou de haine. Là où les autres hommes brûlent de l'oxygène, eux brûlent des idées. C'est pourquoi les hallucinations jouent un si grand rôle dans les romans de Dostoïevski : l'hallucination, c'est l'état dans lequel la ruée de la pensée à travers l'organisme humain et le dialogue entre le moi et l'âme se trouvent extériorisés.
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Un critique contemporain dit que la littérature et la religion, « avec leurs autorités distinctes et leurs révélations distinctes » nous donnent les principales « formes théoriques » et les principales images de notre vie. Elles donnent peut-être à notre vision de la nature mortelle de l'homme son unique foyer durable. Dans des cas exceptionnels, tels que l'Orestie, la Divine Comédie et les romans de Tolstoï et de Dostoïevski, ces autorités et ces révélations distinctes s'unissent en un tout. Leur conjonction -l'accès au logos par les deux principales avenues de la raison - fut célébrée dans le haut Moyen Age par l'introduction dans le calendrier chrétien d'un saint Virgile poète. C'est sous son patronage que je poursuivrai.
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Quand nous lisons « bien » Tolstoï et Dostoïevski (pour paraphraser Richards), la question de la croyance ou de l'incroyance se pose a tout instant, non par leur « faute » ou la nôtre, mais à cause de leur grandeur et de notre humanité.

Comment, alors, devrions-nous les lire ? Comme nous lirions Eschyle et Dante plutôt que, mettons, Balzac ou même Henry James. Parlant de la fin de la Coupe d'or, qui est si près d'être un roman religieux, Fergusson écrit : « Maggie n'a pas un Dieu à qui renvoyer le Prince, pas plus que n'en avait James. »

Ce renvoi à Dieu, et à un Dieu si terriblement proche de la vie de l'âme, est le centre même et la base de l'art des maîtres russes. La cosmologie d'Anna Karénine et des Frères Karamazov, comme celle du théâtre antique et du théâtre médiéval, est ouverte d'un côté au danger de la damnation, de l'autre à l'action de la grâce. Nous ne pouvons en dire autant du monde d'Eugénie Grandet, ou des Ambassadeurs, ou de Madame Bovary. Il s'agit ici d'un jugement non de valeur, mais de fait.
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Même là où ses intentions sont plus complexes et plus profondes Dostoïevski se conforme, pour le choix des situations, aux conventions du mélodrame contemporain. Vieux débauchés poursuivant des jeunes filles sans ressources, fils de famille corrompus par la débauche, héros sataniques hantés par le diable, « femmes perdues » au cœur d'or - voilà la distribution conventionnelle des rôles dans le répertoire mélodramatique.

Par la sorcellerie du génie ils sont devenus les personnages tragiques des Frères Karamazov. Et ceux qui prétendent que les confessions de Svidrigailov et de Stavroguine sont sans précèdent dans la littérature et ont dû jaillir de l'âme de Dostoïevski toute nue n'ont sans doute pas lu la Rabouilleuse de Balzac (1842), où le désir d'un vieil homme pour une fille de douze ans est assez clairement exprimé.
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On pensait d'ordinaire que le roman du XIXe siècle - du moins jusqu'à Zola- avait évité les aspects les plus scabreux et les plus pathologiques de l’expérience érotique. On citait Dostoïevski comme un pionnier dans la révélation de ce monde souterrain du refoulement et de la luxure « contre nature » que Freud nous a si largement ouvert. Mais les faits sont tout autres. Même dans le « grand » roman, nous trouvons des chefs-d'œuvre, comme la Cousine Bette de Balzac et les Bostoniens de Henry James, qui traitent de thèmes sexuels risqués avec une intelligente liberté. L’Armance de Stendhal et le Roudine de Tourgueniev sont des tragédies de l'impuissance ; le Vautrin de Balzac précède les invertis de Proust de près de trois quarts de siècle et Pierre, de Melville, est un extraordinaire coup de sonde dans les dévoiements de l'amour.
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L'esprit russe est littéralement hanté par Dieu.

De là, une différence radicale entre le roman russe et le roman européen du XIX siècle. La tradition de Balzac, de Dickens, de Flaubert était séculière. L'art de Tolstoï et de Dostoïevski est religieux. Il jaillit d'une atmosphère pénétrée d'experience religieuse et de la croyance que la Russie est destinée à jouer un rôle capital dans l'apocalypse qui menace. Tout autant qu'Eschyle et Milton, Tolstoï et Dostoïevski sont des hommes dont le génie est tombé entre les mains du Dieu vivant. Pour eux, comme pour Kierkegaard, une seule alternative s'offre à la destinée humaine. Aussi ne peut-on comprendre véritablement leur œuvre en usant des mêmes moyens que pour Middlemarch, par exemple, ou pour la Chartreuse de Parme. Nous avons affaire à des techniques différentes et à des métaphysiques différentes. Anna Karénine et les Frères Karamazov sont, si l'on veut, des œuvres d'imagination, ou des poèmes de l'esprit, mais ils ont pour objet essentiel ce que Berdiaev appelle « la quête du salut de l'humanité ».
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Mais ce fut dans les Mystères de Paris d'Eugène Sue (1842-1843) que le néogothique, appliqué à la peinture de la vie citadine, atteignit son expression la plus complète. Belinsky en fit l'éloge et l'ouvrage fut lu aussi avidement en Russie qu'à travers toute l'Europe. Dans Enfance, Adolescence et Jeunesse,Tolstoï se rappelle le vif plaisir qu'il trouvait dans la littérature, « à l'estomac » dirait Gracq, si curieusement puissante de Sue. Dostoïevski connaissait les Mystères et le Juif errant.
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