Le nanar des nanars !
Une cancrerie, une potacherie grossière, bête et vulgaire, écrite par un auteur à la plume farces et attrapes, qui n'a rien trouvé de mieux à faire que d'épuiser tout son stock de mauvais jeux de mots sur le thème du suicide.
Jean Teulé, dont j'ai lu quelques bouquins plutôt réussis, s'est lancé à travers cette lourde farce théâtralisée dans une entreprise "suicidaire" ( je me mets au diapason...).
Un
Guitry, à la limite un Marcel Achard, voire la bande du Splendid auraient pu en faire un spectacle comique ;
Teulé, lui, a fait du ridicule.
Dans cette fable dystopique, une famille de commerçants prospère depuis dix générations grâce au commerce de l'autolyse.
Il faut dire que le monde dans lequel ils vivent est décourageant à mourir.
L'air est abominablement pollué, il pleut de l'acide sulfurique, l'univers est sous la férule d'une dictatrice, Madame Indira Tu-Kata, le soir on voit de sa fenêtre, "comme un crachin d'automne des gens qui chutent des tours..."
C'est là donc que depuis dix générations les descendants de la famille Tuvache tiennent dans la Cité des Religions Oubliées et dans la rue Pierre Bérégovoy,
le magasin des suicides.
Il y a le père, Mishima, la mère, Lucrèce et leurs trois enfants : l'aîné Vincent, la cadette Marilyn et le benjamin Alan.
Tout irait bien dans le pire des mondes si le couple Mishima Lucrèce n'avait pas mis au monde, en testant un préservatif percé... " ceux qu'ils vendent aux gens qui veulent mourir contaminés sexuellement ", un gamin résolument optimiste, un amoureux de la vie, un bon vivant... leur tare, leur boulet, leur croix.
Vous devinez le but de la fable... inverser le cours morbide et mortifère d'un monde achromatopsique pour lui redonner des couleurs et de l'espoir.
Échec sur toute la ligne !
On a droit à tout ce que le mauvais goût peut vous asséner lorsque le manque d'esprit se persuade qu'il est spirituel, qu'il est détenteur d'une vis comica irrésistible et que son magasin des suicides ne peut que vous faire mourir de rire...
Je ne veux pas lister les énormités teuliennes ; il y en a trop et c'est vraiment trop lourdingue.
Vous aurez noté que les noms et prénoms font tous référence à des suicidés célèbres, le nom de la rue itou, le restaurant qui fait face au magasin porte le nom de Vatel, le fleuriste celui de Tristan et Iseut, la discothèque celui de
Kurt Cobain etc etc.
Mais là n'est pas le pire.
Le pire, c'est quand
Teulé se met à déballer son lot de jeu de mots sur la mort et le suicide.
Là, on touche des profondeurs de bêtise abyssales.
Dans ce petit bouquin ( qui m'a paru interminable ), je fais crédit à l'auteur de trois répliques et demie, de trois traits d'esprit et demi d'à peu près bon goût.
-"Allez, fichez-moi le camp ! Pas besoin de clients comme vous, ici !
- Mais je veux mourir.
- Démerdez-vous. Allez au bureau de tabac !"
À un de ses clients à qui il a vendu la panoplie du seppuku, il a ces mots :
-" Et quand on vous retrouvera, ça épatera vos amis ! Vous n'avez pas d'amis ?... Eh bien, ça épatera le médecin légiste qui dira :
- Il n'y est pas allé de main morte, lui !"
Lucrèce à une cliente aspirante suicidaire :
-" Vous avez des enfants, madame ?
-" Justement, j'en avais un... Il est venu un jour vous acheter une balle de 22 long rifle."
Le père récriminant Vincent son fils aîné à propos de son jeune frère Alan :
-" Et toi, Vincent, dont j'étais si fier... tu t'es laissé influencer par ce petit con qui mérite bien, lui, un prénom de pédé anglais. Ah, l'enculé !
- Allons, tu confonds tout, Mishima, intervient la mère qui a repris ses esprits."
Ouais, c'est just... mais je n'ai trouvé que ça !!!
Ça et la chute qui, pour le coup est vraiment une chute.
Sinon, c'est du genre :
-"Sa femme arrive avec une assiette, et répond dans la chambre :
- Des crêpes.
- Des crêpes de deuil ? "
Leur fournisseur a pour nom " M'en Fous La Mort."
Un des must passages d'invraisemblable stupidité étant la description par Vincent de sa maquette, de son projet d'un parc d'attractions sur le thème du suicide... là, c'est du très lourd !
Je vous quitte sur quelques balourdises :
- Vivre tue.
- C'est ce que je me tue à leur dire.
- Sa femme le fusille du regard.
- Il avale cul sec un petit verre de saké. Il est très menaçant comme un samouraï qui va attaquer. On croirait qu'il parle japonais :
- Ki a fé sa ki ?!
- Il est puni. Quand à l'école, on lui a demandé ce qu'étaient les suicidés, il a répondu : " Les habitants de la Suisse."
34 petites saynètes de deux, trois, quatre pages maximum pour ce qui est à ce jour et à ma connaissance le pire bouquin d'un homme que j'aimais bien.
Un homme qui, voulant écrire un hymne à la vie, s'est mis à écrire faux.