Citations sur Cannibale (20)
Il n’y avait, a priori, aucune ambiguïté dans la complaisance du prof vis-à-vis de son élève. Genre, il aurait été amoureux d’elle ou elle de lui. Cette hypothèse, avancée par le capitaine Marin, avait soulevé des protestations et même des rires, comme s’il s’agissait d’une incongruité.
Rafaël Cottin, lui, était médiocre partout, sauf en sport où il excellait, quelle que soit la discipline, mais ça, Marin le savait déjà. La photo du garçon sous les yeux, comme cette nuit au domicile des époux Cottin quand il avait demandé un cliché pour l’avis de recherche, Marin se fit la réflexion qu’il était sacrément beau. Un visage lumineux, de beaux yeux clairs bordés de longs cils sombres, il émanait de lui une franchise empreinte de gentillesse.
À cause d’une sale affaire qui l’avait mis injustement en cause, il avait été muté d’office dans cette petite ville de province sans histoires. Le contraste avec ce qu’il avait quitté était tel qu’il lui arrivait, les premiers temps, de tourner en rond, de s’ennuyer même. Il se disait alors, pour se consoler, que c’était mieux pour tout le monde, cette reconversion forcée.
Tu es mon double et ma moitié.
Des filles comme elle, il y en a plein.
Après elle, d’autres viendront. Je ne peux rien y faire.
Je t’aime et je pleure en cachette.
De douleur et de rage
Marin surprit la tension dans le corps d’Albina Cottin et son affaissement tout aussi immédiat, comme si elle abandonnait la lutte avec ce mari qui ne cessait de répondre à sa place. Il se promit de revenir là-dessus ultérieurement. Il échangea un regard avec Vaillant qui semblait crevé et exprimait, à sa façon, que ce n’était pas ici, cette nuit, qu’ils trouveraient la solution.
Voilà une histoire qui manquait de clarté. Des jeunes sans portable ! Il n’avait plus entendu une chose pareille depuis ses débuts dans la police, quinze ans plus tôt !
Il imagina une fille venue de loin, larguée dans la forêt, comme un colis encombrant, après qu’on l’avait attaquée. Mais qui ? Un sadique ? Il y avait eu une histoire comme ça, dans le coin, des années auparavant. Plusieurs jeunes femmes s’étaient plaintes d’un type qui rôdait dans les bois et en avait fait tomber une dans un fossé. Elle s’était débattue et il avait pris la fuite. On ne l’avait jamais identifié. Et c’était si vieux…
Ils sont arrivés ensemble. Le médecin qui m’a accueillie à l’hosto et le flic.
J’ai soulevé les paupières, un millimètre, juste ce qu’il fallait.
Le flic, je l’ai reconnu tout de suite. Je sais qui il est.
Je sens son regard sur moi. Il m’observe comme un entomologiste regarde un insecte à travers une loupe. Il évalue, il soupèse.
Vas-y. Te gêne pas.
Il a sorti son téléphone. Photo.
Ils vont bientôt savoir qui je suis.
Je le vois, immobile au pied du lit. Je devine ce qui se passe dans son cerveau de flic.
Ses yeux sombres grands ouverts, semblables à deux lacs insondables, fixaient le vide. Elle pouvait avoir 16 ou 17 ans. Malgré lui, Clément fut secoué d’un frisson. L’expression de cette fille était terrifiante, comme si elle avait rencontré le diable, qu’elle avait longuement livré bataille avec lui et ne s’en était pas sortie victorieuse.
Je suis à toi. Tu es à moi. Nous sommes les deux moitiés d’un fruit et le produit d’un amour sans bornes.
J’ai mal, au cœur, au ventre, mal à tout. Mal partout où tu es et tu es partout…
L'expression de cette fille était terrifiante, comme si elle avait rencontré le diable, qu'elle avait longuement livré bataille avec lui et ne s'en était pas sortie victorieuse.