Le gang des vieux schnocks

- Tu peux te joindre à nous si tu veux, se moqua Victor. On te nommera membre d'honneur par faveur spéciale, en tant que jeune Schnock. (p.151)

Jules les connaissait tous. Parmi les moins gradés, ceux qui poireautaient au froid et sous la pluie, certains étaient allés à l'école avec lui. Les autres étaient plus âgés mais ils étaient toujours le frère, le cousin ou le voisin de machin qui était pote avec bidule qui en répondait sur la tête de sa mère. Jules les salua, selon les cas d'un poing tendu et effleuré, d'un vague signe de tête ou d'un regard en coin. Malheur à qui ne connaîtrait pas le code non écrit ouvrant les portes invisibles du repère de RedBoule. (p.102)

- On voudrait qu'ils ne nous oublient pas trop, rectifia Rose-Aimée. Et montrer qu'on est gentils même quand on est vieux.
- Pas dou tout, s'insurgea Papi Ferraille. On est pas "yentils", on est Yuste pas morts ! (p.71)

- Il nous faudrait aussi des noms de code ! suggéra Gisèle. Ce sera plus discret.
Sa proposition déclencha l'enthousiasme.
- Moi, cé séra "Zorro", s'écria Papi Ferraille, porque il est rousé comme oun rénard ! (p.50)

- Nous avons besoin d'un nom, déclara Victor qui poursuivait son idée. Un nom qui percute ! Quelque chose avec "meute" ou "tribu"... Le Clan des Croulants ? (p.45)

- Vous la connaissez ?
- Si, yé connais beaucoup dé monde dans le quartier. Surtout les viejos, c'est sour.
- Oh, ils ne sont pas tous sourds, protesta Gisèle.
- No, pas les sordos ! fit Papi Ferraille, les yeux au ciel. Les viellés personnes ! (p.20)

Le doute l'avait tarabustée tandis qu'elle tractait son caddie dans un roulement de wagonnet de mine, indifférente aux coups d'œil interloqués des passants sur sa silhouette aussi large que haute, moulée dans un pantalon imprimé léopard et un imperméable zébré. Gisèle Bernadeau était habituée à ce que son style fasse des envieux. (p.9)

Un jeune à capuche a arraché le sac de cette brave Rose-Aimée! Papi Ferraille le sait, il a tout vu. Alors avec Gisèle, une ex-coiffeuse au look improbable, et Victor, le vieux rebelle qui détourne les affiches publicitaires, ils unissent leurs solitudes pour former un gang étrange et redoutable.
On va lui montrer de quel bois on se chauffe à ce gamin qui agresse les vieilles dames au lieu d'aller en cours! Et tout le quartier n'a qu'a bien se tenir. Jules, 14 ans, n'est pas près d'oublier la leçon que le prépare le Gang des Vieux Schnocks..

Ces tagueurs, quelle engeance ! Des jeunes, forcément. Mal élevés, irrespectueux du bien d’au- trui, qui se croient tout permis. On se demande ce que fichent les parents ! La semaine précédente déjà, l’attention de Gisèle Bernadeau avait été attirée par un immense panneau au coin du bou- levard. Le visage ridé d’un vieillard y côtoyait le message d’une association d’aide aux personnages âgées :
MARCEL EST PLUTÔT DRÔLE
MAIS ÇA NE LE FAIT PAS RIGOLER DE PASSER L’ÉTÉ TOUT SEUL. L’hiver non plus! avait ajouté la main anonyme

L’homme recula de trois pas pour juger de son œuvre et Gisèle put lire:
ASSURANCES OBSÈQUES :
LE SAPIN C’EST BIEN.
LE CHÊNE C’EST MIEUX.
Halte aux pubs mensongères! Signé: les vers.
L’homme peaufina le point d’exclamation, rangea son petit matériel et saisit son cabas.