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Critiques filtrées sur 4 étoiles  
Il y a dans ce roman une tangente paradoxale tout à fait pertinente et palpitante entre le silence et la violence.
C'en est terrible. Car progressivement, on fait corps, on jumelle avec cette mère de famille qu'est Anna.
Imaginez la souffrance muselée à l'intérieur depuis des années, personne pour voir, personne à serrer dans ses bras, pas de baume pour colmater, pas de résilience, imaginez donc comme celle-ci doit être rouge et vive.

Le début de cette histoire m'a laissée perplexe. Une narration clinique, détachée, très peu servie en émotions, ce n'est pas ce que je préfère. J'aime ce qui est clair et crie et vibre. Rien de tel ici et pourtant… Plus j'avançais dans cette histoire plus cette violence m'a happée, abasourdie, je me suis frappée à ce silence qui crie aux barreaux.

Anna s'est construit une vie idéale afin d'échapper à ses origines modestes et à une enfance malheureuse et étriquée. Avec Hughes, elle forme un joli couple solide dans sa villa au bord de mer. Sa routine est mise à mal quand son fils unique, Léo, dix huit ans est arrêté et incarcéré.

Anna va cogiter, ressasser, se battre aussi pour son fils mais quand tout part à vau-l'eau ce sont les souvenirs cauchemardes d'Anna qui viendront la noyer peu à peu. Les démons de son enfance vont péricliter sa sûreté mentale mise à mal avec l'arrestation de son fils.

Progressivement on assiste avec effroi à l'émergence d'une violence refoulée depuis trop longtemps. Une violence sourde, discrète qui voudrait hurler mais Anna est une femme modèle, une poupée qu'on a modelée à rester digne et droite.
Anna m'a beaucoup parlé, je l'ai comprise page après page avec beaucoup d'émotions.

À force de non-dits, de silences étouffants, de traumas non cicatrisés, on finit par devenir sa propre victime. On flirte dans un no man's land proche de la folie, de la confusion. Cette approche littéraire des traumatismes de l'enfance m'a beaucoup parlé. L'auteure explore très bien les dommages collatéraux et funestes d'une enfance manquée.

Le cataclysme est ici interne, sérieux, réaliste, ce qui rend ce livre des plus troublants.

Un roman que j'ai appris progressivement à apprécier, à deviner et à apprivoiser. Jusqu'à cette fin qui est en tout point, remarquable et réussie.
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Anna Gauthier mène une existence bourgeoise, en tout point conforme aux convenances de sa petite ville de province. Un incident dans une manifestation envoie néanmoins son fils Léo, lycéen jusqu'ici sans histoire, derrière les barreaux. Pour Anna, brusquement dessillée par la froideur hostile qui s'empare alors de ses relations, c'est l'édifice patiemment construit de sa réussite qui se lézarde, la renvoyant aux blessures d'une enfance qu'elle pensait pourtant depuis longtemps enterrée.


Anna n'a survécu aux maltraitances subies en silence dans son jeune âge qu'en leur tournant le dos, déterminée à modeler sa vie selon son image du bonheur. Et elle semble y être parvenue, en tout cas elle en est convaincue : entre sa pharmacie, son mari en vue et son fils promis à un bel avenir, rien ne vient déparer le parfait accomplissement de son existence, intégrée à la coterie des notables du coin. Jamais elle n'imaginerait qu'elle a pris le bonheur pour ses apparences, qu'elle a construit sa réussite comme un bouclier contre le mal, et qu'il ne suffit pas de contrôler sa vie pour la mettre à l'abri.


L'incident de parcours de son fils est une pierre qui vient briser l'idéal auquel elle s'accroche. Confrontée à la machine judiciaire, à la rumeur réprobatrice et aux trahisons des soi-disant amis, Anna perd le contrôle des événements, accumule les désillusions, et, dans sa panique et son impuissance, voit l'accroc à la perfection à laquelle elle s'évertuait, prendre les ravageuses proportions d'un cataclysme. Alors que les acquis patiemment accumulés en rempart contre la souffrance tombent un à un, la voilà à nouveau démunie face à ses blessures anciennes, resurgies intactes après des décennies de silence et de déni. le choc est si puissant, le désespoir si intense, qu'ils l'entraînent bientôt au-delà de toute raison, dans une explosion de violence incontrôlable.


Le réalisme du récit compte pour beaucoup dans l'effroi ressenti face à tant de souffrances vécues silencieusement. Les ravages de la violence sur la construction psychologique d'un être et les conséquences de traumatismes répétés et ignorés produisent ici une bien funeste bombe à retardement. Chez Anna elle-même, tombée dans la pathologie mentale. Mais aussi chez son fils, par l'un de ces si troublants et inconscients mécanismes de transmission.

Lien : https://leslecturesdecanneti..
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Anna, pharmacienne au coeur d'un petit village, mène une vie paisible, qu'elle a longtemps recherchée, auprès de son mari, Hugues, ancien journaliste qui aujourd'hui travaille au service culturel de la mairie, et de son fils Léo, qui, à 18 ans, prépare son bac en vue d'intégrer une école réputée, spécialisée dans les métiers du numérique. Dans sa villa au bord de mer, la jeune femme, qui a fait table rase de son passé, surtout depuis la mort de ses parents, savoure le présent. Jusqu'à ce terrible matin de mai où des hommes cagoulés de la gendarmerie font soudainement irruption dans leur maison, se ruent dans les couloirs et à l'étage. Ils en redescendent, traînant Léo, abasourdi, les mains menottées. le monde d'Anna s'écroule, pièces après pièces...

Si l'on s'imagine que l'on va assister au combat d'une mère pour faire sortir son enfant de prison, pour avoir frappé un policier lors d'une manifestation, il n'en est rien. En effet, Valérie Tong Cuong nous entraîne insidieusement, malignement, au coeur du passé d'Anna. Puisque, suite à ce terrible incident, la jeune femme va ressasser continuellement et faire ressurgir, bien malgré elle, ses démons du passé. Son image si parfaite, si épanouie, si calme, va se craqueler, se fissurer et apparaître sous un tout autre jour. L'auteure aborde, avec une grande justesse, l'amour inconditionnel et le combat d'une mère pour son fils, le paraître, la machine judiciaire, l'amitié... mais aussi, à pas feutrés, les non-dits, les secrets trop longtemps enfouis, les silences, les blessures ineffables. Ce roman percutant, effroyable, à la plume incisive et directe, fait montre d'une intensité tourbillonnante.
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C'est grâce aux retours de quelques Babelpotes que ce livre a atterri dans ma liste d'envies. Et maintenant que je l'ai lu, je ne peux que les en remercier.

"Un tesson d'éternité" est un livre d'amour, non pas une romance, pas du tout même, puisqu'il s'agit de l'amour d'une mère à son fils. Cette mère, c'est Anna. Elle est mariée à Hugues, avec qui elle a un fils, Léo, en passe de commencer les épreuves du Bac dans quelques semaines. Ils ne sont pas riches, comme ils disent, mais vivent aisément au "Village", dans le sud de la France. Lorsque, à 6h du mat', ils sont sortis du lit par les gendarmes qui investissent la maison sans la moindre délicatesse et menottent Léo pour le mettre en examen, c'est toute leur petite vie tranquille qui bascule. Effectivement, lors d'une manifestation, Léo a agressé un flic, violemment. La vidéo tourne sur les réseaux et dans les médias, le fait ne peut être ignoré. Pour Anna, c'est l'incompréhension : comment son fils, lycéen sans problème, peut-il être le "casseur de flic", voire même le dealer, soupçonné ?

S'en suit, à partir de là, un long cheminement. Intérieur pour commencer, qui nous permet de découvrir l'enfance et l'adolescence d'Anna : elle revient essentiellement sur son parcours scolaire, où elle évoque les difficultés auxquelles elle a dû faire face en tant que tête de turc du "Serpent". Cheminement judiciaire et carcéral d'un autre côté, où elle ne cessera pas de soutenir son fils, de le croire malgré tout ce qui est dit sur lui, quitte à s'éloigner de son mari et de ses amis. L'on suit une mère prête à tout pour sortir son fils de prison, ou de l'aider comme elle peut à défaut.

Ce petit roman est vite lu mais n'en demeure pas moins intense. Anna ne peut que nous toucher, d'autant qu'on ignore jusqu'au bout que penser de son fils. Doit-on la croire sur parole quand elle trouve les bons arguments pour défendre son fils et nous persuader qu'il n'est pas celui qui est décrit par la partie adverse ? Ou au contraire, doit-on y voir une mère désespérée, aveugle, refusant d'abandonner son fils ? Au final, une mère connait-elle bien son enfant ? Telles sont les questions qui nous turlupinent tout au long de notre lecture. À nous d'ailleurs d'y trouver la réponse qui nous arrange... L'autrice joue avec le doute, celui d'Anna et le nôtre, et c'est subtilement bien exploité.

Le parallèle avec son adolescence est également accrocheur, puisqu'il nous permet de mieux comprendre Anna, cette femme battante qu'elle est devenue aujourd'hui, cette mère qui fera confiance à son fils jusqu'au bout.

L'autrice dépeint ses ressentis juste ce qu'il faut pour qu'on compatisse et qu'on puisse s'imaginer à sa place. Bien que la narration soit à la troisième personne, on se retrouve bel et bien dans une introspection, bien maîtrisée qui plus est.

J'ai passé un bon moment dans ce petit roman qui n'est pas autre chose qu'une ode à l'amour maternel.
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Valérie Tong Cuong raconte avoir dès son jeune âge écrit ce qu'elle ne pouvait échanger avec ses proches. Ainsi on imagine qu'elle couchait sur le papier ses craintes et peurs, afin de les exorciser pacifiquement. Contrairement à l'héroïne d'Un tesson d'éternité, Anna, dont l'arrestation du fils pour une erreur d'adolescent résonne comme un rappel à sa propre jeunesse tourmentée, et la pousse à choisir une dramatique impasse. Une façon de traiter le déterminisme social et le harcèlement que j'ai trouvée souvent assez juste. Et même si on peut avoir parfois le sentiment que l'auteure enfonce le clou, encombrant son propos de phrases creuses, l'histoire reste prenante par ce qu'elle suscite comme réflexion sur les conséquences des traumatismes de l'enfance.
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L'écriture de Valérie Tong Cuong, clinique, distanciée m'a parfois déstabilisée sur certains de ses ouvrages. Mais pour ce dernier roman, cette plume est parfaite. Impeccable. Implacable. Pour raconter l'implosion d'une famille bien sous tous rapports après l'arrestation du fils.
Pour narrer les traumatismes de l'enfance .
Pour faire ressentir l'urgence. L'effroi. La culpabilité.
Pour dresser enfin le portrait d'une femme qui doute, se bat et se débat.
Un conseil : Prévoyez un peu de temps avant de commencer ce roman.
En effet, une fois entamé, impossible de s'arrêter avant la dernière page.
Implacable là aussi.
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Valérie Tong Cuong perçoit ce que les autres ne voient pas, ou ne veulent pas voir. Elle me rappelle ce dîner d'adultes, quand j'étais adolescente et mal dans ma peau martyrisée par l'acné. Ça buvait, fumait, riait, hurlait, planait à mille mètres au-dessus de mes angoisses. Une femme m'observait. À la fin du dîner, elle s'approche de moi et me dit : « viens, on va parler toutes les deux, tu vas me dire ce qui ne va pas ».
Un art et un don : savoir accueillir la fragilité de l'autre.
Parlons d'Anna, l'héroïne. Sa vie bascule le jour où les gendarmes embarquent son grand garçon. Toutes les familles sont suspendues à des fils ténus qui s'effilochent au moindre tiraillement. L'auteure en est l'observatrice attentive.
Anna porte ses origines modestes comme un fardeau, une cause de déterminisme, une tache indélébile. le poids du contrat social est souvent évoqué (p40, p68, p115, p131) dans le roman jusqu'à ces deux phrases, définitives : « l'homme a t-il par, son action, le pouvoir de changer sa destinée ? » et « la vie ne prête qu'aux riches et pour les autres, c'est Sisyphe ».
Ce qui arrive au fils d'Anna exhume un sentiment qu'elle avait enfouie depuis l'adolescence, depuis sa quête d'un horizon meilleur. Un sentiment dangereux, aussi puissant qu'un amour contrarié : l'injustice. Il sera d'autant plus abrasif qu'il se fracassera sur ce monde parallèle, indicible, impitoyable, obéissant à ses propres lois, comme la médecine : la machine judiciaire.
Le combat d'Anna est celui d'une mère prête à tout transgresser, tout risquer, avec pour seule excuse un réflexe immémoriel : « j'ai protégé mon enfant ».
La fin est puissante et cathartique. J'ai presque eu honte de m'en réjouir. À vous de la découvrir.
Bilan : 🌹🌹
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Tout a été dit déjà mais quand même ! .

Coup de coeur pour ce roman direct, sans fioritures, au final vertigineux impossible à lâcher , à propos du déterminisme social et du harcèlement où l'auteure décortique avec finesse et brio, la psychologie complexe d'une mère attentive, aimante, Anna , mère idéale croit- on …menant une vie à l'apparence tranquille , petite bourgeoisie provinciale , au coeur d'une nature enchanteresse!
Lorsque son fils est incarcéré, le monde d'Anna se fissure , le vernis craque.
La famille s'effondre .

Au delà de cet amour inconditionnel pour son fils réapparaissent fissures , failles béantes du passé de cette jeune fille harcelée, traumatisée , traquée , aux abois durant des années de souffrances aiguës.
le masque tombe : derrière ses sourires polis , de façade , sa volonté de fer, son équilibre fragile , les souvenirs humiliants les abus et les traumatismes anciens s'avèrent criants.
Anna est vide , anéantie , la lutte pour s'en sortir et sa petite vie bien rangée volent en éclats , l'injustice , la colère la submergent jusqu'au final fulgurant .
Un roman poignant, bouleversant , brûlant , pétri d'émotions, d'abus , de pauvreté cachée , de «  L'HYPOCRISIE SOCIALE » le venin et le vernis du «  BEAU MONDE » qui touche au coeur et fait réfléchir .

C'est mon quatrième livre ce cette auteure .
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Je croise le nom de Valérie Tong Cuong depuis des années et plusieurs de ses titres ont attiré mon attention. C'est pourtant Un tesson d'éternité qui est arrivé entre mes mains, alors que je n'en avais pas vraiment prévu la lecture. Mais c'est quelque chose que j'apprécie : entre deux lectures désirées, j'aime piocher complètement au hasard un titre et me laisser porter par cette naïveté de lectrice qui s'est tenue loin des réseaux sociaux et des avis dithyrambiques ou mordants. Ma rencontre avec Valérie Tong Cuong s'est donc faite avec ce roman de la rentrée littéraire dont j'ai vu, depuis, à quel point il est apprécié. C'est incontestablement un bon roman, et si le sujet-même n'a pas donné lieu à un coup de coeur chez moi, force est de constater qu'il est sacrément bien écrit et que la tension, qui monte de page en page, est orchestrée d'une main de maître. J'ai aimé la manière dont l'autrice conduit cette famille, a priori bien sous tous rapports, à voler en éclats, j'ai aimé que les personnalités ne soient pas complètement tranchées ou lisses, mais qu'au contraire elles soient floues et complexes. J'ai évidemment aimé le personnage d'Anna dont on découvre peu à peu les traumatismes et les failles : elle sombre et le lecteur ne se délecte pas de cette situation, il est seulement happé par le mécanisme brillamment décrit qui la conduit au point de non-retour. C'est très précis, incisif, assez froid. Et même si j'aime être émue à en avoir la gorge serrée, je crois que c'est ce style direct et sans fioritures qui fait la force du roman.

Lien : http://aperto-libro.over-blo..
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Léo n'est pas du genre à franchir les limites, il tient à conserver ses acquis, sa routine, ses amis, il doit lui arriver de boire un peu trop, comme tous les jeunes de son âge, rien de bien méchant. Mais lorsque les gendarmes viennent l'arrêter au petit matin, le monde d'Anna et Hugues ses parents, vient de basculer, ils sont au bord du précipice.

Ce roman est avant tout le portrait magnifique et puissant d'une femme, d'une mère, Anna. Sa vie qu'elle a patiemment construite s'écroule brusquement avec l'incarcération de son fils. Elle qui avait su sortir de sa condition de fille de famille modeste pour s'élever par son mariage et son métier dans la société, se voit rabaissée, ignorée par ses anciens amis.

Avec une sensibilité permanente, Valérie Tong Cuong remonte le fil de la vie d'Anna, les blessures d'une adolescence bafouée, sa lente reconstruction, et puis la chute et son couple qui se lézarde, avec le choc de l'emprisonnement de son fils et des rumeurs et vexations qui l'accompagnent. L'auteur nous décrit avec réalisme l'univers carcéral, les parloirs, la promiscuité, les odeurs, les cris et puis surtout la lutte d'Anna pour défendre Léo coûte que coûte, prête à prendre tous les risques pour le sauver, l'histoire d'un amour, un amour inconsidéré pour son fils.
La plume simple et limpide de l'auteure est remplie d'émotion.
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