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Dans ce premier recueil intitulé Les reflets du monde et qui aura sans doute des suites, Fabien Toulmé s'est intéressé aux Luttes, aux luttes citoyennes.
Il nous embarque pour trois voyages, trois récits de résistance populaire, trois histoires d'humains en lutte.
Sa première destination, le Liban, en novembre 2019, sera un peu le fruit du hasard.
Le salon du livre auquel il devait se rendre, à Beyrouth est annulé, des manifestations secouent le pays depuis presque un mois. Il décide néanmoins de maintenir son voyage, pour tenter de comprendre ce qu'il s'y passe.
Ce qu'il a compris de la situation libanaise d'après les journaux, c'est que les manifestations ont débuté le 17 octobre suite à l'annonce par le gouvernement, de l'instauration d'une taxe sur les appels effectués via l'application Whatsapp pour renflouer les caisses de l'État, mais que ce soulèvement semble surtout être la conséquence d'un ras-le-bol général vis-à-vis de la classe dirigeante.
Pour qu'il puisse nous présenter les choses telles qu'elles se sont passées et se déroulent à ce moment-là, Fabien va rencontrer des gens qui vivent ces événements de l'intérieur et notamment cette jeune féministe, porte-voix connue dans les manifs, Nadal.
Deux ans après ce premier reportage, il est de retour au Liban. Si beaucoup de choses se sont passées entre temps, la crise du Covid, le confinement, la double explosion qui a ravagé la capitale libanaise le 4 août 2020, une crise économique sans précédent, force est de constater que la Thawra, la révolution populaire « n'a pas survécu à tous ces vents contraires et la place des Marthyrs est revenue à son état initial de parking ».
C'est ensuite dans le Nord-Est du Brésil que l'auteur poursuit sa découverte du monde qui nous entoure en se rendant à João Pessoa, la ville au monde où il se sent le plus chez lui.
Il apprend que, là, tout près, le long du Rio Sanhauá, une « communidade », terme brésilien pour désigner des quartiers pauvres, une communauté, en traduction littérale, du Porto do Capim qui vit au bord de la rivière est menacée d'expulsion par la mairie à cause d'un projet immobilier.
Pour savoir ce que pensent les habitants, ces personnes qui subissent cette sorte de processus de gentrification très en vogue dans les grandes villes, présenté comme inévitable et bénéfique car permettant une amélioration des conditions de vie, Fabien Toulmé va dans les pas de Rossana, présidente et fondatrice de l'association des femmes du Porto do Capim, cette communauté qui lutte contre la destruction de ce quartier populaire.
Son troisième voyage se fera au Bénin. Pour ce dernier reportage il va essayer de comprendre ce qui peut amener quelqu'un à militer. Il va rencontrer Chanceline, cette jeune militante pour les droits des femmes qui a commencé son engagement dès le collège. Plutôt que militante, elle préfère se décrire comme une organisatrice communautaire, c'est-à-dire qu'elle fait de la sensibilisation « sur le terrain » sur les problématiques liés aux droits des femmes et plaide auprès des autorités béninoises pour combattre les inégalités hommes-femmes.
C'est avec un immense plaisir que je suis partie en voyage avec Fabien Toulmé. Ses trois reportages composent un documentaire absolument intéressant et édifiant au cours duquel il décrypte trois résistances populaires en nous montrant les mécanismes de chaque rébellion, et duquel il ressort que dans ces mouvements de résistance, les responsables militantes sont des femmes, de véritables héroïnes.
Une question se pose : pourquoi, de façon quasi systématique, dans ces luttes, les femmes occupent-elles des places centrales pour ne pas dire exclusives ?
Cela a interpellé Fabien Toulmé qui s'est alors tourné vers le sociologue Olivier Fillieule qui nous offre des réponses pertinentes et fort intéressantes que je ne divulgâcherai pas ici mais que je vous laisse le soin de découvrir par vous-même dans l'album.
Des dessins simples presque naïfs très précis restituent bien les cadres de vie dans lesquels circulent les personnages, leur vie quotidienne. Les cases monochromes prennent différentes teintes, souvent en fonction de la chronologie, s'il y a retour dans le temps, ou en fonction de l'interlocuteur…
J'ai été subjuguée par le courage et l'opiniâtreté dont font preuve ces femmes dans la lutte qu'elles mènent pour une vie meilleure avec plus de justice et d'égalité, et admirative de leur parcours qui ne peut qu'inciter à se lever et à ne pas tout encaisser !
Les reflets du monde – En lutte est un roman graphique passionnant et touchant dans lequel Fabien Toulmé fait preuve de beaucoup d'empathie et de tendresse, n'hésitant pas à se mettre lui-même en scène dans son rôle de reporter.
J'avais fort apprécié L'odyssée d'Hakim 1, 2, 3, du même auteur et j'ai été à nouveau conquise par ce dernier.

Lien : https://notre-jardin-des-liv..
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Fabien Toulmé est actuellement un auteur que j'apprécie suivre tant ses oeuvres antérieures m'ont marqué : « Ce n'est pas toi que j'attendais », « Les deux vies de Baudouin » ou encore « L'odyssée d'Hakim ». Il arrive à nous sensibiliser sur différents sujets de société à travers des histoires réellement passionnantes.

En l'occurrence, on va partir à la découverte du monde à travers trois combats portés par des citoyennes. Il s'agit de décrypter trois résistances populaires des plus remarquables : une lutte citoyenne au Liban, le combat d'une favela brésilienne contre un projet immobilier et l'engagement d'une militante féministe au Bénin. Notons que les femmes tiendront un rôle central puisque c'est elles qui mèneront la lutte.

J'ai toujours eu de l'admiration pour les gens qui essayent de faire changer les choses de manière pacifiste et positive pour le plus grand bien de l'humanité. Il s'agit de lutter pour la justice sociale et contre les inégalités. Il est vrai que c'est plus difficile dans des pays qui ne connaissent pas la démocratie et qui répriment toute opposition. La mobilisation a souvent un coût.

On commence par le Liban, ce pays qui fut autrefois un protectorat français et qui est devenu indépendant depuis 1943 le laissant en proie à des rivalités internes très fortes entre les factions chrétiennes et les musulmans. L'instauration d'une taxe sur whatsapp pour renflouer les caisses de l'Etat a mis le feu aux poudres comme ce fut d'ailleurs le cas en France avec les gilets jaunes et la taxe sur le carburant. C'est l'accumulation de toutes les frustrations pour le peuple qui fait que cela éclate.

Oui, partout dans le monde, les pauvres gens en ont marre de payer pour une classe politique grassement payée et qui profite allègrement du système. A noter le mémorable discours méprisant du président Michel Aoun qui a mis de l'huile sur le feu.

Malheureusement, le mouvement de la Thawra s'est essoufflé laissant place à la résignation et le pays a été plongé dans une grave crise économique sans précédent où manger devient un luxe. Cependant, même en cas d'échec, cela fait bouger les lignes même assez subtilement et surtout, cela laisse des traces à plus ou moins long terme.

On continue par le Brésil des favelas à l'occasion d'un programme de réhabilitation d'un centre-ville où il faut expulser des gens d'une communauté. le processus de gentrification qui permet une amélioration des conditions de vie se fait souvent au détriment des plus pauvres. Derrière les beaux discours politiques se cachent une autre réalité pas très reluisante. Il y a un combat de femmes qui ont une vision plus collective des choses loin des intérêts individuels. Elles proposent une autre alternative moins destructrice et plus respectueuse de l'environnement local. le projet est pour l'instant suspendu à un recours juridique.

Enfin, le troisième voyage mène notre auteur en Afrique et plus précisément au Bénin, un pays qui arrive en 158ème position sur 189 dans le dernier classement des inégalités hommes-femmes établi par les Nations-Unis. Il y a une véritable problématique des grossesses précoces qui poussent les jeunes filles à quitter l'école très jeune et qui sont par conséquent un frein à leur autonomisation.

Il faut dire que les garçons sont éduqués à être des chefs et à faire ce qu'ils veulent des femmes une fois mariés. C'est donc par l'éducation à l'école que se fait la lutte à coup de sensibilisation pour changer la mentalité de la société béninoise axée sur la tradition africaine. Il s'agit d'évoluer et non d'effacer la culture béninoise. le droit des femmes gagne tout doucement du terrain et c'est encourageant.

En conclusion, je dirai que l'auteur a du talent, c'est incontestable car il arrive avec des mots simples à nous faire comprendre des situations plutôt complexes qui échapperaient à la compréhension populaire. Cela apporte des éclaircissements plutôt notables. On voit également qu'il ne juge pas et qu'il essaye de rester neutre même s'il est parfois admiratif de ces femmes qui combattent pour des causes justes.

J'aime beaucoup le dessin qui fait dans la lisibilité et qui me semble être très réussi techniquement. Il est très agréable à regarder dans une ligne claire semi-réaliste. A noter une narration toujours aussi fluide qui concourt à cette nouvelle réussite.

C'est encore le genre de BD profondément humaine à mettre entre toutes les mains.
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«  être féministe, ce n'est pas juste défendre le droit des femmes, c'est défendre tous les droits pour tout le monde."
Et c'est ce que font avec énergie et enthousiasme les femmes que va rencontrer Fabien Toulmé au cours de son reportage : Nidal au Liban investie dans la Thawra (révolution) de 2019 ; Rossana la brésilienne en lutte pour préserver son quartier des ardeurs de l'état et Chanceline au Bénin engagée dans la sensibilisation des adolescents aux grossesses précoces.
3 femmes, 3 luttes citoyennes et un même combat pour le changement et un monde plus juste. le dessin faussement naïf et les couleurs vives remplissent parfaitement leur office en créant des ambiances distinctes selon les pays (et les combats). Et comme toujours avec cet auteur, le récit est parfaitement documenté et d'une belle humanité. J'ai beaucoup appris. Et, sans surprise, j'ai beaucoup aimé 😀
Merci à la masse critique de Babelio et aux éditions Delcourt pour ce partage très instructif ! Et vivement la suite !
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Fabien Toulmé nous offre trois récits de femmes combattantes. Trois pays : Liban, Brésil, Bénin. Trois luttes : une journaliste dans la révolution, une habitante contre un projet immobilier dans une favela, une conseillère qui fait de la prévention dans les écoles contre les grossesses précoces (ma préférée).
Quatrième roman graphique que je lis de cet auteur dont on peut dire qu'il sait se renouveler avec des sujets variés. Il est évident qu'il les aime ses personnages et donc nous aussi ! Dessins toujours aussi sympas. Un peu d'élagage m'aurait fait mettre cinq étoiles.

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Dans cette BD documentaire, Les reflets du monde : En lutte, Fabien Toulmé raconte trois luttes menées par des femmes dans trois pays différents. À son habitude, il précise la genèse de ses enquêtes, ou plutôt les circonstances qui l'amènent à s'intéresser à tel ou tel sujet, et il devient personnage de ses récits. Il nous conduit cette fois au Liban avec Nidal, au Brésil avec Rossana et au Bénin avec Chanceline. Il nous présente et nous entraîne dans la vie de ces trois femmes d'origine sociale et d'âge différents, qui toutes trois luttent pour une cause qui leur tient à coeur. Plus même, une cause qu'elles considèrent comme vitale et qui peut les mettre en danger. Pour se renseigner sur leurs motivations, leur formidable implication, et l'omniprésence des soulèvements populaires dans le monde actuellement, Fabien Toulmé va se tourner vers un spécialiste, le sociologue Olivier Filleule (p. 123). le récit de cette rencontre donne certaines pages passionnantes qui expliquent de manière limpide et argumentée les points communs de ces soulèvements. On retrouvera Olivier Filleule pendant l'enquête au Brésil. Il proposera différents éléments de réflexion à Fabien Toulmé quand celui-ci constate : « Je tombe systématiquement sur des luttes où les femmes occupent des places centrales pour ne pas dire exclusives » (p. 226). Là encore, les pistes proposées au lecteur s'avèrent particulièrement intéressantes. Comme le titre le précise, plus encore que les péripéties vécues par ces trois femmes chaleureuses et sympathiques, ce sont les luttes, leurs convergences et leur universalité qui sont présentées ici.
***
J'avais été bouleversé par Ce n'est pas toi que j'attendais, passionnée par les trois tomes de L'Odyssée d'Hakim et franchement déçue par Suzette ou le grand amour. Je recommande chaleureusement ce dernier album où je retrouve tout ce que j'aime chez cet auteur : son souci pédagogique, sa curiosité, sa bienveillance et tout l'intérêt qu'il porte au monde dans lequel nous vivons. le dessin de Fabien Toulmé, immédiatement reconnaissable, cache une grande précision sous son évidente simplicité. le minimalisme n'empêche pas de reconnaître d'emblée les personnages (les nez !) et obéit peut-être à un souci pédagogique (le potager de la page 210, entre autres). J'ai été touchée par l'hommage que Fabien Toulmé rend à son prof d'histoire, monsieur Guilledou, qui apparaît de temps en temps sur un petit nuage, et qui semble bien dépassé par l'évolution de ce monde qu'il ne reconnaît plus. Un vrai bon moment de lecture !
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Grâce aux éditions Delcourt, que je remercie, j'ai eu le plaisir de lire le roman graphique : Les reflets du monde : En lutte de Fabien Toulmé.
Cet épisode des Reflets du Monde prend racine dans les voyages de Fabien Toulmé.
Il y raconte la Thawra, révolution citoyenne au Liban, la lutte d'une favela brésilienne contre un projet immobilier et l'engagement d'une militante féministe au Bénin, trois combats menés par des citoyens.
Ou plutôt «par des citoyennes», car, dans ces mouvements de résistance, les femmes occupent une place centrale.
Les reflets du monde : En lutte est une bande dessinée documentaire qui m'a captivée.
Nous découvrons trois femmes : Nidal au Liban, Rossana au Brésil et Chanceline au Bénin.
Toutes trois sont des personnalités fortes, engagées dans des causes justes et importantes pour faire bouger les choses pour les femmes de leur pays.
Elles se battent pour le logement, le pouvoir d'achat, la santé des femmes. Ce n'est pas toujours facile mais elles s'accrochent.
Fabien Toulmé croque leur histoire avec un dessin faussement naïf qui convient parfaitement et une colorisation parfaite pour le style.
Cette bande dessinée est captivante et fort bien documentée.
J'ai appris énormément de choses sur les trois pays présentés, sur le combat de ces femmes. On comprend qu'il est réellement important que des changements soient réalisés.
J'ai beaucoup aimé ma lecture et si l'auteur sort de nouveaux ouvrages de ce genre, je le relirais avec plaisir.
Ma note : un très joli quatre étoiles et demie.

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Fabien Toulmé, la marque de grandes lectures de BD ! J'avais lu Ce n'est pas toi que j'attendais, Les deux vies de Baudoin mais aussi le premier tome de L'odyssée d'Hakim. Dans Les reflets du monde : En lutte, Fabien Toulmé s'intéresse aux femmes, car c'est par elles que se font les grandes luttes contre l'injustice, partout dans le monde.
Dans cette BD reportage, il met en avant trois luttes dans le monde : au Liban, pour montrer le combat contre le gouvernement et leurs décisions injustes ; au Brésil, contre la construction d'un parc écologique à l'emplacement actuel d'un quartier et au Bénin, pour sensibiliser les jeunes aux grossesses précoces, résultat d'un culture béninoise où la femme n'a pas vraiment de droits. Ce sont des combats pour des droits vitaux (pouvoir d'achat, logement, santé des femmes), avec des explications sur les vies de ces femmes, on comprend le besoin de changement. On voit aussi qu'il n'est pas aisé de passer d'une condition à une autre, le changement prend du temps à se faire aussi bien au niveau des autorités des pays qu'au niveau du peuple. J'ai aimé les explications sur le mécanismes de révolte, amenées par un ami de Fabien Toulmé. Je ne peux dire qu'il y a un reportage qui m'a plus intéressé que d'autres, ce qu'elles racontent montre des choses toutes plus révoltantes les uns que les autres. Un point est même fait plus tard pour voir comment les choses ont évolué avec leur combat.
Je ne manquerai de lire d'autres reportages du même genre du dessinateur, j'ai beaucoup aimé sa façon de raconter leurs batailles engagées.
#LesrefletsdumondeEnlutte
#NetgalleyFrance
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Après mon gros coup de coeur pour la trilogie L'Odyssée d'Hakim, je ne pouvais pas passer à côté du nouvel album de Fabien Toulmé!
On sent que le monsieur se professionnalise, il part enquêter dans différents pays, contacte des spécialistes en visio, se tient informé, et même au niveau de l'esthétisme, un gros travail est fait, autant au niveau de la structure que du choix des couleurs, sans compter la petite touche en plus: les apparitions surréalistes de l'ancien prof de collège de Fabien, flottant sur un petit nuage!
A l'origine, Fabien part enquêter sur les luttes contre les différentes oppressions aux quatre coins du globe. Il se retrouve ainsi, surtout par accident, au coeur de la révolte des Libanais contre le pouvoir après que celui-ci a annoncé vouloir taxer les appels whatsapp, la goutte d'eau qui a fait déborder le vase d'une rancoeur déjà bien fournie. Il y rencontre Nidal, une activiste féministe qui lui parle de son combat au nom de tout le peuple.
Cette révolte pour une société meilleure l'incite à aller voir ,cette fois, du côté de favelas au Brésil, où une communauté est menacée d'expulsion. L'originalité du combat qui y mené contre le gouvernement tient au fait que les combattants sont exclusivement des femmes, non par choix mais par un fait sociologique connu, qui veut que les hommes se sentent peu impliqués par tout ce qui touche le domestique.
Cette fois-ci, l'origine de cette communauté qui s'est installée de l'autre côté de la voie ferrée de Joao Pessoa et le combat mené contre la mairie qui veut les expulser pour créer un parc écologique sont clairement exposés dans leurs tenants et aboutissants. J'ai repensé aux combats menés de plus en plus dans nos propres campagnes face à des projets qui vont à l'encontre de la biodiversité, et je me suis sentie proche de Rossana, la leader de ce mouvement.
Son troisième voyage amène tout naturellement Fabien à se questionner sur le chemin parcouru par ces militants pour qu'ils en arrivent à là, c'est-à-dire bien souvent à sacrifier leur confort et leur vie personnelle au nom d'un combat collectif. Il rencontre ainsi Chanceline au Bénin, qui lui explique tout son cheminement, de son enfance à aujourd'hui où elle fait de la prévention dans les écoles autour de la sexualité, les grossesses précoces, le harcèlement et plus largement le droit des femmes. Encore une femme épatante et intelligente qui a su très jeune s'orienter vers le militantisme dans sa propre communauté.
Au final, trois femmes déterminées et d'une grande intelligence dans leurs engagements; c'est un livre qui fait du bien avant tout mais qui permet également de mieux saisir les rouages qui se jouent à différentes échelles d'oppression. Finalement, ce roman graphique m'a fait sentir le monde comme un tout petit monde dans lequel on se retrouve au nom de combats qui se ressemblent.
Aucune déception suite à l'Odyssée d'Hakim dans un genre de témoignage pourtant très différent. Bref, à lire absolument.
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Passionnant ! Fabien Toulmé nous propose
trois récits de luttes citoyennes .
Au Liban, au Brésil et au Bénin,
il est allé à la rencontre de ceux
et en l'occurrence, de celles, qui se battent
pour un monde plus juste.
Avec son honnêteté intellectuelle habituelle,
il s'intéresse sérieusement à chacun de ces combats
qui en disent long sur les pays d'origine
et, l'espèce humaine !
Le pouvoir d'achat des plus précaires au Liban
la gentrification qui déloge une communauté au Brésil
les grossesses de mineures au Bénin..
Il est surpris de rencontrer des femmes
à l'origine, et investies totalement dans ces luttes.
Il interroge alors, un sociologue
sur la signification de cette représentation féminine
dans ces mouvements contestataires.
Ces femmes sont souvent artistes
chanteuses, actrices , elles mènent leurs actions
pacifiquement et surtout courageusement
l'art est aussi un outil de diffusion de leurs idées .

J'ai appris beaucoup de choses, sur ces trois pays.
La lorgnette sensible de Toulmé en dit beaucoup
plus que sur la seule lutte en question.
C'est un récit débordant d'humanité
qui fait un bien fou.






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Fabien Toulmé est un habitué de la bande dessinée documentaire. On lui doit notamment « L'odyssée d'Hakim », une trilogie remarquable retraçant le parcours d'un réfugié syrien depuis sa vie sous la dictature de Bachar Al-Assad à son arrivée en France auprès de sa femme, en passant par le périlleux voyage entrepris avec son fils de deux ans pour gagner l'Europe. Pour son nouvel ouvrage, l'artiste a décidé de questionner l'engagement et les luttes citoyennes en réalisant trois reportages consacrés à des mouvements de résistance populaire menés par des femmes : le premier se passe au Liban et met en scène Nidal, une activiste investie dans la révolution en cours ; le second se déroule au Brésil où l'on découvre le combat d'une petite communauté pour résister à la destruction de son quartier ; le troisième prend place au Bénin où l'on fait la connaissance d'une militante pour les droits des femmes spécialisée dans la sensibilisation des jeunes à la sexualité. Imposant, l'ouvrage est donc divisé en trois grosses parties qui mettent en scène Fabien Toulmé lui-même ainsi que les personnes qu'il a pu rencontrer lors de ses reportages sur le terrain. Chaque lutte possède ses propres couleurs (bleu et rose pour le Liban, vert et jaune pour le Brésil, marron et rouge pour le Bénin), ce qui permet à l'artiste de matérialiser le changement de cadre et de tenter de rendre compte de l'atmosphère sur place. Ces chapitres sont complétés par de petits intermèdes qui permettent d'apporter des précisions sur des faits qui se sont déroulés après le retour en France de l'auteur, ou bien de nous livrer un éclairage plus théorique grâce à l'intervention du sociologue spécialiste des questions de lutte et de militantisme Olivier Fillieule. L'ouvrage se révèle donc très varié puisqu'il mêle à la fois des aspects théoriques qui permettent de réfléchir sur le processus de l'engagement citoyen ou la place des femmes dans ces luttes, mais aussi du reportage de terrain, avec les témoignages des premières personnages concernées, et enfin des passages presque autobiographiques au cours desquels l'artiste fait le lien entre une situation et son histoire ou expose ses propres sensations. A cette diversité s'ajoute un dernier aspect qui permet de rendre la lecture agréable et bien plus digeste : l'humour ! Un humour discret mais bien présent et qui permet d'alléger un peu l'ambiance, comme c'est le cas par exemple avec le petit « running-gag » présent dans chacune des trois parties et qui consiste pour l'artiste à mettre en scène son prof d'histoire géo de collège (un petit barbu bedonnant perché sur un nuage et apportant des précisions sur le contexte du pays visité).

Les trois luttes mises en scène ici sont intéressantes et permettent de mettre en lumière des thématiques différentes. le premier reportage se déroule lors de la révolution qui a secoué le Liban en 2019. Parti d'une banale histoire de taxe supplémentaire imposée par le gouvernement (sur les appels effectués via l'application Whatsapp), le mouvement social embrase alors la société libanaise qui aspire à un changement radical et s'insurge contre la corruption qui règne au sein des élites dirigeantes. C'est dans ces circonstances que l'auteur (venu à la base pour participer à un festival littéraire), fait la rencontre de Nidal, une jeune journaliste militant pour le droit des femmes et jouant un rôle actif dans le mouvement social en cours. Son témoignage permet à l'auteur d'exposer le plus concrètement possible le quotidien des Libanais et Libanaises, et ainsi d'insister sur leurs revendications, à savoir un accès aux « droits essentiels ». On découvre en effet grâce au travail réalisé par Fabien Toulmé un pays rongé par la corruption et la crise économique dans lequel les rares services publics sont incapables de fonctionner correctement faute de financement, où les coupures d'électricité sont incessantes et où il n'est pas rare que des gens meurent devant les hôpitaux, faute d'argent pour se soigner. Afin de mieux faire comprendre le contexte local, Fabien Toulmé n'hésite pas, en parallèle du témoignage de Nidal, à revenir sur l'histoire du pays et ses spécificités, que ce soit en matière de religion, de culture, de régime politique ou de choix économiques. L'auteur revient aussi sur les dangers inhérents à ce type d'engagement, la jeune femme faisant l'objet de menaces et de harcèlement sur les réseaux sociaux (et même de poursuites en justice à la fin du mouvement), mais aussi sur la répression et les violences qui émaillent les manifestations grâce à des témoignages complémentaires à celui de la militante.

La seconde lutte dont il est question est d'un genre un peu différent car il n'est pas tant question pour ses acteurs de gagner quelque chose mais tout simplement de ne pas tout perdre. Direction cette fois le Brésil où Fabien Toulmé va faire la connaissance de la communauté de Porto do Capim, dans la région de Joao Pessoa. C'est là que le maire entend implanter un immense parc écologique. Problème : une centaine de familles vivent dans le quartier concerné, dont certaines refusent d'être relogées dans un autre endroit de la ville et de voir leurs habitations détruites. Un bras de fer s'engage alors entre la mairie et les habitants de Porto do Capim, et notamment les femmes qui sont le fer de lance de la contestation. Cette fois, Fabien Toulmé a recueilli les témoignages de Rossana et Odacy, deux figures emblématiques de la résistance au projet de parc écologique (qui n'a rien de vraiment écologique). A l'aide de ces deux militantes, l'auteur va à nouveau tenter de nous faire comprendre les tenants et aboutissants de cette lutte. Cela passe évidemment par la description de ce quartier et du quotidien de ses habitants, mais aussi par un rappel de son histoire, des différentes étapes qui ont structuré le combat de ces femmes, ou encore des méthodes de résistance employées (les recours juridiques, bien sûr, mais aussi l'art, la mise au point d'un contre-argumentaire efficace face à la propagande de la mairie…). Là encore le reportage est édifiant et permet de faire la rencontre de personnalités inspirantes et touchantes.

Le dernier reportage qui clôt ces « Reflets du monde » se déroule au Bénin où l'on fait la connaissance de Chanceline, une jeune militante pour les droits des femmes dont le coeur de l'action se situe dans la prévention contre les grossesses précoces. Là encore, un peu de contextualisation ne fait pas de mal et permet d'apprendre que le Bénin arrive en 158e position sur 189 dans le dernier classement des inégalités hommes-femmes établi par les Nations Unis, et que le nombre de grossesses chez les adolescentes est de plus en plus élevé. C'est aux côtés d'un journaliste de TV5 Monde que l'artiste va suivre la militante dans son quotidien qui consiste notamment à animer des séances de prévention et de sensibilisation à la sexualité. L'occasion d'aborder avec des adolescents, filles ou garçons, des sujets aussi essentiels que le consentement, l'utilité d'un préservatif, la contraception ou tout simplement les stéréotypes de genre. Là encore, le reportage nous permet de nous faire une bonne idée de ce que peut être le quotidien d'une famille béninoise lambda, notamment grâce au témoignage de Chanceline qui revient sur sa propre histoire familiale et les relations compliquées qu'elle a pu avoir avec son père. Au final, l'objectif fixé par l'artiste au début de son travail est parfaitement rempli. Par le biais de ces trois reportages, Fabien Toulmé nous permet en effet d'étudier des cas concrets de luttes citoyennes et de réfléchir sur ce qu'elles peuvent avoir en commun. La question de l'engagement est fondamentale ici et les témoignages rapportés par l'artiste permettent de mettre en lumière deux ressorts essentiels : la prise de conscience, par le biais de rencontres ou d'expériences accumulées, d'une injustice subie, et la capacité à identifier les responsables ou les causes profondes de cette injustice. Enfin, l'ouvrage permet de mettre en avant la place prépondérante prise par les femmes dans les luttes citoyennes partout dans le monde et de rendre hommage aux Nidal, Rossana, Odacy ou Chanceline qui se battent chaque jour pour les droits des femmes, mais aussi de l'ensemble de la population.

« En lutte » est le premier volet de ce qui pourrait bien devenir une série proposant des « Reflets du monde ». Grâce à des reportages de terrain et de nombreux témoignages d'acteurs et d'actrices des luttes citoyennes, Fabien Toulmé met en lumière les injustices subies dans trois endroits du monde (Liban, Brésil, Bénin) et interroge l'engagement militant ainsi que la place prépondérante des femmes dans les mouvements de résistances amorcés par les populations sur place. Un beau recueil, touchant et documenté, à l'image de ce que l'artiste avait déjà pu produire.
Lien : https://lebibliocosme.fr/202..
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