Le polar historique, et tout particulièrement le polar historique médiéval, met souvent à l'honneur des enquêteurs ou enquêtrices « ecclésiastiques » (abbés, abbesses, ou bien simple moine ou simples nonnes) : citons parmi les plus connus Guillaume de Baskerville et Adso (
Umberto Eco), Frère Cadfaël (Ellis Peters), Athelstane (Paul Harding alias
Paul C. Doherty), Erwin le Saxon (
Marc Paillet), Mère Frévisse (
Margaret Frazer) ou encore Soeur Fidelma (
Peter Tremayne)… Et pour compléter les enquêtrices médiévales, une laïque, Kathryn Swinbrooke (
C. L. Grace alias
Paul C. Doherty) (une des meilleures séries du genre).
Dans ce contexte, Soeur Fidelma tient un rôle un peu à part : de tous ces détectives, elle officie dans la période la plus ancienne (VIIème siècle) et dans un pays (l'Irlande) qui, bien que christianisé depuis longtemps (par
Saint Patrick, patron des tenanciers de pubs et des buveurs de bière), reste encore assez méconnu. Elle officie dans l'église celte qui, pas toute inféodée à l'église romaine, garde encore quelques particularités dont la mixité, et le droit pour les moines et les nonnes de se marier et de vivre en famille.
Fidelma est d'origine noble, son frère est roi d'un des cinq royaumes d'Irlande, Muman (Munster). Naturellement perspicace et intelligente, elle a acquis une solide expérience de juriste, ce qui la prédispose à résoudre de façon magistrale les énigmes policières auxquelles elle est confrontée. Pour ce faire elle est aidée par Frère Eadulf, saxon d'origine, lettré et juriste lui aussi, et de plus médecin (ça peut être utile). Leur binôme fait merveille, non seulement en Irlande, mais encore en Angleterre, en France, en Espagne, en Italie…
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Absolution par le meurtre » (2004) est la première enquête de nos héros : nous sommes en 664, en Northumbrie (nord de l'Angleterre et sud de l'Ecosse) où se tient un concile entre l'église celte et l'église romaine. Les dissensions sont nombreuses, le climat est tendu, une abbesse, amie de Fidelma, est assassinée. Notre bonne soeur va mettre toutes ses compétences en jeu pour trouver le coupable…
Le plus intéressant, dans les romans de
Peter Tremayne, n'est pas tant l'énigme policière, elle est classique, mais plutôt par le contexte socio-politique et religieux qui l'entoure. Il faut reconnaître que l'auteur ne lésine pas sur un cours d'histoire, de théologie, qu'il nous impose par de longues digressions un peu fastidieuses… Mais bon, si ce n'est pas d'une importance capitale pour l'intrigue… vous m'avez compris. (D'autres auteurs, plus malins, regroupent ces notes informatives en fin de volume). Rassurez-vous vous ne perdez rien au charme de l'histoire, nettement dominé par le portrait de Fidelma, femme libérée (c'est pas si facile, surtout à cette époque), super nonne (à défaut de supernana, quoique…) et d'un capital de sympathie qui dépasse largement la moyenne.
A ranger sur votre étagère entre Cadfael et Athelstane. Entre ces deux-là, elle n'a rien à craindre. Eux, par contre…