Les soeurs de Napoléon, tome 2 : Pauline

Joseph Turquan était tenu, en son temps, pour l'un des grands spécialistes de l'époque napoléonienne. J'avoue que la lecture de son « Pauline », paru en 1904, m'a laissé quelque peu perplexe. le portrait qu'il brosse en effet de cette soeur de Napoléon n'est guère flatteur. Évaporée, superficielle, capricieuse, vaniteuse, elle passe son temps à courir d'un lit à l'autre, à présenter ses exigences à son frère, à se préoccuper de ses toilettes et à entretenir de sourdes et mesquines rivalités familiales.
Le courage dont elle a fait preuve au moment de l'insurrection de Saint-Domingue au cours de laquelle son premier époux, le général Leclerc a trouvé la mort ? Joseph Turquan laisse plus ou moins entendre qu'il s'agissait d'inconscience plutôt que de force de caractère. Il met par ailleurs une telle énergie et une telle ardeur à vouloir démontrer que les nombreux témoignages, dont celui de l'impératrice Joséphine elle-même, faisant état de rapports incestueux entre Pauline et Napoléon ne sont qu'un tissu de mensonges haineux et malveillants, qu'il finirait presque par accréditer la thèse qu'il prétend combattre.
Qu'y a-t-il dès lors, selon lui, à porter finalement au crédit de Pauline ? le fait qu'elle n'ait pas abandonné son frère quand le vent a tourné et que l'empire s'est effondré. C'est peu. C'est maigre. Et le réquisitoire, sous des dehors légers, parfois complices, voire même complaisants, est tellement à charge qu'on se prend à douter sérieusement qu'il corresponde à la réalité.
Heureusement l'apparat critique est consistant. de nombreuses notes renvoient à des textes d'époque, rédigés par des contemporains qui ont approché Pauline et Bonaparte au plus près. C'est de ce côté-là, au sortir de cet ouvrage, qu'on éprouve le désir de se tourner dans l'espoir d'y trouver évoquée une Pauline plus complexe et plus consistante.