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Citations sur Le jongleur (45)

Nos succès n’existent et n’ont une force réelle que dans les yeux de nos proches.
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Ce n’est que des années plus tard qu’il comprendrait cette triste vérité connue des adeptes de l’écriture. Le nombre de pages ne garantit rien. Pire – le succès, la gloire ne garantissent rien. Les simulacres et les masques d’écrivain non plus. Tout aussi audacieux et bigarrés soient-ils. Au bout du compte on reste devant son bureau et sa feuille de papier, devant ses balles de jonglage – seul.
Pouvait-il prévoir qu’un jour dans sa vie d’adulte, d’écrivain, il dirait que la création était un subterfuge qui lui permettait d’échapper au poids insupportable de l’existence, à la mort qui nous renvoie à notre être terrestre ?
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Pour Gary, il était dorénavant question de la balle supplémentaire (...). Rastelli était un maître, mais comme tout ce qui est humain il était contaminé par l’imperfection et condamné à l’échec. Pour l’auteur, le jongleur n’était pas mort du fait d’un hasard idiot mais du profond désespoir de n’avoir jamais pu saisir encore une autre balle. La seule qui comptait réellement pour lui. Celle qui offrait un passeport pour la perfection. Il a souvent dit que s’il avait pu percer le mystère de Rastelli, il aurait peut-être évité de nombreuses catastrophes. Encore une fausse piste. Car est-ce là un grand secret ?
Le jeune Roman adolescent a encore le temps de se poser les questions ultimes. Celles qui peuvent mener au désespoir. La balle insaisissable est le fondement de l’art, la route vers l’excellence. La septième ? La huitième ? Peu importe. Ce qui importe, c’est que ce soit la dernière. Car peut-on vivre en ayant atteint la limite de ses capacités ? Cela en vaut-il la peine ?
Et cette dernière balle ne se cache-t-elle pas dans le barillet d’un revolver Smith & Wesson ? Il connaissait le polonais, et comme en français, le mot balle (kula) est synonyme de projectile.
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Roman admirait ce casse-cou qui pouvait en même temps jongler avec huit balles, se raser, taper des pieds et siffler une chanson à la mode. Les descriptions de ses représentations virtuoses remplissent les pages de ses livres. Dans plusieurs variantes brillantes. Trop nombreuses, peut-être ? « Le grand Rastelli, un pied sur un goulot de bouteille, fait tourner deux cerceaux sur l’autre pied replié derrière lui, tout en tenant une canne sur son nez, un ballon sur la canne, un verre d’eau sur le ballon, et jonglant en même temps avec sept balles. »
Mais cela allait au-delà de l’émerveillement devant tous ces cerceaux, ballons et balles en mouvement. Gary a fait de Rastelli un symbole du talent artistique, de l’art en général. Écrire était pour lui un moyen d’approcher cette perfection. Toute son œuvre témoigne d’une fascination pour le monde des magiciens et des jongleurs. Il adorait les clowns, les bouffons, les illusionnistes, les mangeurs d’étoiles de toutes sortes, les magiciens qui transforment le réel banal en irréel coloré. Le terme « jongler » prenant parfois plusieurs nuances. Pendant des années il est allé à leur recherche, pour les décrire, convaincu qu’ils étaient les détenteurs du secret de la perfection. Tout comme eux, il voulait se défaire des lois de la nature. Donner aux autres un sentiment d’illusion et leur permettre de croire à l’impossible. À une fiction créée avec aisance.
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Miłosz a passé sa vie à se battre pour ne pas perdre sa maison spirituelle. La mythologie de ses plus jeunes années l’a fortement marqué. Plus il était éloigné de la terre de son enfance, en Californie par exemple, plus il cherchait un lien avec son être ancien, celui de Szetejnie et de Wilno. D’où cet attachement à la langue polonaise. Il s’y installait comme dans une forteresse et remontait le pont-levis. Peu importe ce qui se passait autour. Il était chez lui.
Roman Kacew ne possédait pas ce genre de berceau. Est-ce pour cette raison qu’il erra de par le monde sans jamais trouver de répit ?
Il connaissait le yiddish, mais il ne savait pas lire le livre du monde. Ou bien ne le voulait-il pas. Il a éludé les histoires de famille, sa mère devait lui suffire et compenser pour toutes celles-là. Dans ses récits, il n’y a ni tantes, ni oncles, ni cousines ni cousins, pas de grands-mères, il n’y a aucun signe de tous ces bubbe meises, ces histoires juives qu’on raconte à la maison et qui deviennent des légendes. Qui aime quoi, qui fait quoi, qui lit quoi, qui a envie de quoi…
Pas non plus de grands-parents qu’il devait pourtant connaître, aucune femme à part sa mère. C’est en elle qu’il a enfermé tout son bagage émotionnel. Ce qui est frappant, c’est cette absence totale de curiosité pour le passé familial. Comme s’il s’en fichait, comme s’il venait de nulle part.
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Romain aurait pu endosser le costume de victime. Il avait tout l'attirail, tous les atouts nécessaires : juif, émigré, polonais. Membre à plus d'un titre du lot des persécutés, il poussa au contraire avec insolence l'art de railler et moquer
les illusions et les dangers qui les attendaient.

( p.422)
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Selon lui, écrire c'était fuir le monde.Il s'enfermait de longues heures dans son cabinet pour être vraiment lui-même, comme il le disait.Il n'était " heureux"- definition du bonheur à utiliser avec précaution- que lorsqu'il invoquait des personnages littéraires. Il leur donnait l'ordre de vivre et d'aimer.Dans sa prose, ils y parvenaient parfois. Il se sentait en sécurité dans les dessins étrangers. Dans le sien, moins.

( p.394)
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"Qu'est-ce qui me pousse à ces courses à travers le monde ?" se demandait-il.Il ne savait pas.Après réflexion, il avait l'impression qu'ailleurs se trouvait quelque chose (ou quelqu'un) qui le rapprochait de la réponse et qui apaisait ses souffrances.

( p.395)
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Le russe était la langue de sa mère. Sa première langue à lui.il qualifiait en russe les choses qui arrivaient.Les sentiments.Il pleurait et rêvait en russe.(...)
Sa mère lui récitait des poèmes en français, couramment mais avec un accent.Pouchkine et Lermontov aussi.Et puis il entendait du polonais dans la cour et dans la rue.

( p.361)
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(**À propos d' " Éducation européenne)

Les communistes n'ont jamais publié ce livre en Pologne.Les partisans étaient trop " politiquement impropres", même si l'auteur avait fait en sorte que cela ne se voie pas.Il aimait raconter que les Polonais se reconnaissaient tellement dans cette histoire qu'ils le soupçonnaient d'avoir volé le manuscrit à un de leurs compatriotes aviateurs.

( p.299)
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