AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet
Citations sur Les mains vides (76)

Ce jour-là aussi, la ville attendit vainement la pluie. Quelques nuages prometteurs avaient pourtant fait leur entrée vers dix heures du matin en direction du duomo, mais bien vite ils s’étaient dissipés sous la chape de plomb. Le soleil avait alors recommencé à chauffer les immeubles comme un feu doux sous un bouilli, et Soneri s’était remis patiemment à transpirer dans sa chemise de lin. Juvara souffrait davantage et s’était fait toiser quand il avait tenté de rallumer le climatiseur en panne : après la pluie manquée, plus d’illusions possibles, la canicule tendrait son piège et la chaussée collerait sous les gaz d’échappement des automobilistes et les voitures brûlantes. Le commissaire ouvrit la fenêtre et reçut au visage un souffle de vache. Au même moment, une patrouille démarra en trombe et d’autres agents s’agitèrent au milieu des vrombissements et des crissements de pneus. L’orage tant attendu n’éclatait pas au ciel, et Soneri trouva que la couleur des uniformes ne différait pas tant de la couleur du temps.
« Qu’est-ce qui se passe ? » demanda-t-il.
Sans lui répondre, Juvara monta le son de la radio, et la voix excitée de Pasquariello, le commandant du 17, fit irruption dans les bureaux de la Police judiciaire.
« Un braquage, traduisit-il. Quatre individus ont attaqué la Caisse d’Épargne à la seringue. »
Le compte-rendu des faits, transmis par les voix essoufflées des agents, retint toute leur attention. Ils demandaient du renfort pour bloquer les issues. Deux braqueurs avaient pris la fuite à moto et deux autres avaient couru chacun de leur côté. On aurait du mal à les pister en roulant dans les rues de la vieille ville. Dans la cour, deux patrouilles revenues pour des contrôles redémarrèrent : la tempête n’avait pas l’air de vouloir se calmer, et l’on risquerait le tonnerre et des éclairs si les revolvers prenaient la parole.
« Rixe via Trento 13, devant le bar, annonça cette fois Pasquariello. Ça se bat à coups de bouteille, ils sont une quinzaine ! » hurla-t-il aux voitures de la zone.
« On demande du renfort aux pandores ? » intervint alors la voix rauque du vice-questeur. Sa question fut couverte par le halètement d’un agent occupé à poursuivre les braqueurs, qui avait du mal à parler: « On vient d’en repérer un… il se barre en direction de la barrière Repubblica… il est à pied. » Après avoir pris une longue pause pour reprendre son souffle, il tenta de décrire le fuyard : « Il a un tee-shirt bleu ciel avec un jean… des baskets blanches. » On l’entendait perdre le type au piétinement de ses semelles réglementaires, et Soneri imagina avec un certain malaise sa course-poursuite en pleine canicule, ébloui par la réverbération des trottoirs où les crachats s’évaporaient au soleil et où les crottes de chiens se desséchaient sans engraisser la terre.
La ville donnait l’impression d’être soudainement secouée par un tremblement de terre. Via Langhirano, un fou menaçait les passants d’un couteau.
« L’été, la ménagerie est ouverte », ronchonna Soneri en faisant allusion aux déséquilibrés qui sillonnaient la ville désertée au mois d’août.
Commenter  J’apprécie          00
- Un conseil, reprit sérieusementcGerlanda, ne jouez pas les Don Quichotte. Que vous le vouliez ou non, vous faites partie de la police et la police a toujours été du côté des puissants. Depuis quand la police change le monde ? Dites plutôt qu'elle a empêché que ça change !
Commenter  J’apprécie          00
- Et c'était qui, sa clientèle ?
- Une clientèle insoupçonnable, des personnages en vue dont on ne met pas en doute la réputation : politiques, industriels, avocats, médecins...
- La classe dirigeante", commenta Soneri avec sarcasme.
Commenter  J’apprécie          00
Ne restait qu'une banderole en lambeaux accrochée entre deux balcons du premier étage, qui disait : NON A UNE VILLE DE PROPRIETAIRES, et Roger revint encore une fois à l'esprit de Soneri. Aujourd'hui, c'étaient les gens comme lui qui possédaient la ville. Des gens qui travaillaient dans l'ombre en manoeuvrant sans rien produire et en multipliant l'argent par l'argent. Des notables de la lettre de change vivant des besoins ou des vanités.
Commenter  J’apprécie          00
Ils liquident tout parce qu'ils ont flairé l'affaire immobilière dans le secteur de la Forneria. Ils se foutent complètement de l'activité de l'usine, c'est pour cela qu'ils l'ont laissé partir à vau-l'eau, expliqua-t-elle ensuite calmement.
- Tu vois ? Aujourd'hui, au lieu de produire, ils spéculent. Mais pour vendre leurs appartements, il faut bien que les entreprises continuent d'exister et de créer des revenus !
- Mais ils s'en foutent ! Ils pensent d'abord à eux, pas aux autres. Une fois qu'on est riche, on le reste. Les affaires se jouent sur le moment, pas sur du long terme.
Commenter  J’apprécie          00
Aujourd'hui, il y avait quatre cents travailleurs licenciés devant la Questure, et personne ne les a suivis. A une époque, tout le monde se serait mobilisé, mais aujourd'hui, la ville n'est plus qu'un bloc d'indifférence où tout un tas de gens s'agitent, obsédés par la rage de s'affirmer.
Commenter  J’apprécie          00
- Ce n'est même pas ça qui me dérange. C'est de tout accepter sans aucun sens critique et sans jamais protester, même à voix basse. C'est ça, la barbarie. Vingt ans plus tôt, on aurait renvoyé une assiette pareille et le restaurant n'aurait pas tenu trois mois. Alors qu'aujourd'hui il est à la mode : plumés et contents.
- On n'est plus des paysans, on n'a plus besoin d'autant de calories !
- Dommage. On perd la valeur des choses.
Commenter  J’apprécie          00
"Quel foutage de gueule, bougonna Soneri. Prix exorbitants et portions ridicules.
- De toute façon, les gens sont trop gros, dit Angela pour leur défense.
- Ils ont compris qu'il suffisait d'une belle présentation pour faire accepter les arnaques avec le sourire, résuma le commissaire avec cynisme.
Commenter  J’apprécie          00
Il faut aussi comprendre s'il s'est fait racketter ou si on l'a fait chanter.
- Mais personne ne paie de pizzo (1) à Parme, signala l'inspecteur.
- Je ne parle pas de pizzo organisé. Très souvent, les racketteurs qui officient dans le Sud continuent de pister leurs victimes même si elles ont implanté leurs activités à mille kilomètres de distance.
(1) Somme d'argent exigée régulièrement par les organisations mafieuses en échange de leur "protection".
Commenter  J’apprécie          00
Il songea alors à la fragilité des nouvelles recrues élevées dans les villes par des mères anxieuses et la compara à la rudesse de son éducation paysanne.
Commenter  J’apprécie          00






    Lecteurs (188) Voir plus



    Quiz Voir plus

    Retrouvez le bon adjectif dans le titre - (6 - polars et thrillers )

    Roger-Jon Ellory : " **** le silence"

    seul
    profond
    terrible
    intense

    20 questions
    2873 lecteurs ont répondu
    Thèmes : littérature , thriller , romans policiers et polarsCréer un quiz sur ce livre

    {* *}