Écrit-on de la même façon quand on nous a révélé qu'on était un des auteurs majeurs de son époque ? Car c'est tout de même de ça dont il s'agit quand on a reçu le prix Nobel de littérature... J'ai sans doute déjà lu le livre d'un auteur déjà Nobelisé mais je ne m'étais pourtant jamais posé cette question. Je découvre
Vargas Llosa par ce livre de 2015 (5 ans après le Nobel) et je me demande s'il ressemble au reste de son oeuvre.
J'aime essayer de saisir l'âme littéraire d'un continent (une certaine pudeur dans les sentiments chez beaucoup d'auteurs asiatiques par exemple). Je n'ai pas forcément beaucoup de connaissance de la littérature sud-américaine (
Garcia Marques, Coelho, Sepulveda pour citer les plus connus) mais j'ai pu constater une plus grande liberté dans l'évocation de la sexualité, une plus grande exubérance, un côté multicolore qui colle bien au multiculturalisme de ces pays.
Ces caractéristiques se retrouvent chez
Vargas Llosa, mais le thème comme le style m'ont paru fort convenus, en tout cas dans les trois premiers quarts du livre. le thème et le traitement m'ont d'ailleurs fait penser au
Journal d'un enlèvement de
Garcia Marquez, qui est sans doute le livre que j'ai le moins aimé de l'auteur. La réalité politique de leurs pays ne peut laisser insensibles les grands auteurs sud-américains.
Vargas Llosa évoque ici avec justesse et sévérité les années Fujimori où l'association terrorisme-pouvoir dictatorial rend la vie quotidienne très difficile à supporter par la population. Les deux "ennemis politiques" se nourrissent l'un l'autre, la dictature trouvant sa justification dans la lutte contre le terrorisme. Ce qui est un peu gênant, c'est que le portrait de ces "années noires" se termine par l'évocation d'un nouveau président et d'un pays apparemment apaisé... alors qu'on sait que la corruption a continué à miner le pouvoir en place, même à l'heure actuelle.
Le côté faits divers lubrique d'une bonne partie du roman m'a laissé assez indifférent, mais le style adopté dans le chapitre Un tourbillon, vers la fin du livre, m'a beaucoup plus intéressé et m'incite à retenter bientôt l'expérience
Vargas Llosa. Tout l'intérêt du livre réside pour moi dans la façon de brosser le portrait de la société depuis les classes les plus favorisés jusqu'aux personnes les plus démunies. L'auteur prend souvent des contre pieds, faisant se relever de leur fange des personnages qu'on l'avait vu juger durement quelques pages auparavant. le message en filigrane que rien n'est aussi simple et limpide qu'il ne paraît, qu'il faut se méfier des apparences et ne pas juger trop vite et trop sévèrement les gens est finalement assez bien amené et l'on passe finalement un moment agréable. J'irais sans faute découvrir les oeuvres qui l'ont rendu célèbre, plutôt que celles qu'il a écrite une fois la célébrité acquise !