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Critique de elea2020


Fêtes galantes :
L'inspiration de Fêtes galantes semble liée en grande partie au XVIIe siècle, le décor en est tiré : parcs, bosquets, grottes de rocaille, masques déambulant dans l'ombre discrète. La lumière et les couleurs sont en demi-teintes, comme pour s'accorder avec l'indécision et l'indéfini des sentiments, les aveux qui se reprennent, les compliments précieux et déclarations littéraires. Paul Verlaine n'y parle pas en son nom propre, il joue à la mascarade, il se fait l'auteur de bergeries et d'épigrammes élégants. L'ambiance y est plaisante quoique un peu fausse ou forcée, elle s'accorde bien avec les tableaux de Watteau, qui sont du reste une référence explicite de Verlaine (ainsi pour Clair de lune, le poème qui ouvre ce recueil de 22 poèmes).

J'ai trouvé ce recueil intéressant, mais les poèmes ne me parlent pas vraiment, je dirais qu'ils ont du charme, et j'aime assez l'évocation de ces fêtes en aquarelles, avec couples, belles demoiselles et petits animaux, collations sur l'herbe, statues d'Eros... Je suis contente d'y voir comme un clin d'oeil l'ironie du poète.

La Bonne chanson :
J'ai aimé ce recueil plein d'espoir et de fantaisie : il est vrai que le lecteur n'est pas habitué à ce Verlaine-là, tendre et sincère, et cela correspond à un moment de sa vie qui n'est sans doute plus jamais revenu, où il rencontrait Mathilde Mauté, et rêvait d'une vie à deux, paisible et simple, de deux âmes synchrones, de promenades et d'agréables discussions, d'amour enfin, qu'il a cru vraiment avoir trouvé. Dans ces 21 poèmes, il évoque le fil d'une rencontre, de l'espoir qui l'a habité, puis de la reconnaissance envers Elle, et envers son destin, qui a permis que ses espoirs trouvent une réponse. Il y envisage le mariage (poème 19), et soupire de bonheur de trouver une direction à sa vie, vers un printemps et un été radieux.

Je me suis prise à me demander s'il avait idéalisé tout cela, en tout cas, les poèmes parlent haut et clair pour lui, et ancrent les sentiments du poète dans un présent souriant, qui pourrait être partout et nulle part, n'étant pas tributaire d'un lieu précis, mais plutôt déployant un verger d'arbres en fleurs directement né du coeur et de l'idéal de l'homme Verlaine. Celui-ci décrit encore le monde environnant : les paysages vus d'un train bruyant, ou encore le chemin qu'il parcourt en ville, dans la boue et la noirceur, mais tout cela est adouci par l'image et les mots de l'aimée. Ce mince recueil est un état de grâce en vers...

Romances sans paroles :
Ce troisième recueil clôt ce cycle sur l'amour : jeux, espoir, et maintenant désillusion, nostalgie, spleen... Verlaine revient à une forme de distance ironique, ne serait-ce que dans le choix des titres, mais il s'y livre à des effets rythmiques accomplis, des jeux de sonorités, nous y trouvons nombre de poèmes connus et délicieux, pleins d'âme et de légèreté. On y trouve notamment de ces fameux "vers impairs", souvent heptasyllabes, qui donnent un air de chanson à ses poèmes, et déséquilibrent la structure pour lui faire gagner encore en musicalité.

C'est celui que j'ai préféré des trois, et en regardant la date, les références des lieux... Eh oui, il était en pleine fugue avec Rimbaud, en Belgique et à Londres. Alors oui, la demoiselle de ses rêves devient une femme-enfant qui ne comprend rien, mais le chant du poète se fait à la fois léger et grave, et dessine des aquarelles dans les nuages.

Ecrits sur Rimbaud :
On trouve ici 51 pages d'écrits divers de Verlaine sur Rimbaud, souvent des préfaces des éditions d'oeuvres complètes de ce dernier. J'y note que, quelle qu'ait été la relation entre les deux hommes, il est touchant de constater l'admiration qu'avait Verlaine pour le poète, et la fidélité dont il a fait preuve, même alors qu'il n'en avait plus aucune nouvelle, et ne savait pas s'il était vivant ou mort. le dossier est complété par des lettres ou extraits de lettres, et par trois poèmes de Verlaine sur Rimbaud.

Les textes de préface apportent des précisions intéressantes sur la personnalité de Rimbaud, les scandales qu'il a parfois causés, la réception de ses oeuvres, ainsi que des analyses de Verlaine, qui insère les textes des poèmes de Rimbaud, dont le "Sonnet des voyelles", "Le Bateau ivre", dont Verlaine fait grand cas. Selon lui, Rimbaud touche à la perfection dans plusieurs de ses premières poésies, mais surtout dans Illuminations et dans Une Saison en enfer. Enfin, il se désole de ce qu'il ait abandonné subitement l'écriture, pour vivre à sa façon, le reconnaissant cependant fondamentalement libre.
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