Simone Weil veut montrer que la défense des droits de l'homme, l'homme en tant que personne ayant des droits, est certes important, mais que c'est une erreur de penser que ces droits sont sacrés, que la personne humaine est sacrée, au-dessus de tout. Ce qui est sacré, ayant bien plus de valeur, transcende l'individu, c'est justement ce qui le dépasse, qui transcende l'individu, qui n'est pas propre à sa personne, ce qui est au contraire impersonnel : l'humanité, la justice, la liberté…
Ce qui veut dire qu'éveiller les gens au respect de ces grandes valeurs aura beaucoup plus d'effet, de bonnes répercussions sur la société, que de les appeler à respecter les droits de chacun.
Ce petit essai, écrit l'année de sa mort, parmi les Écrits de Londres, peut tout d'abord être aisément rapproché de
l'Homme révolté, d'
Albert Camus, publié en 51, huit ans plus tard, dans lequel il pose que la révolte de l'esclave intervient au moment où l'homme est prêt à sacrifier sa vie, sa personne, pour défendre ce qu'il estime le dépasser, ce qui fait l'humain, sa dignité. Ainsi, l'esclave peut accepter de voir ses droits bafoués, mais pas l'essence de ce qui fait de lui un être humain. Mais la pensée de
Simone Weil prend une autre direction. Là où Camus interroge les limites de la révolte,
Simone Weil cherche à définir cette essence de l'humain, ce sacré, tout en l'insérant dans les conflits sociaux, la vie quotidienne, la défense des faibles… Elle compare les effets de la défense des droits de la personne et ceux de la défense de valeurs. Les grandes valeurs ont une valeur d'autorité qui l'emportent largement. Ces valeurs essentielles peuvent être vues comme valeurs humanistes ou comme vertus chrétiennes. Car c'est bien ce qui transcende l'être humain, l'amène à dépasser son état d'individu animal, qui intéresse
Simone Weil.
On voit dans les luttes récentes contre le racisme (mais également contre les politiques des grandes entreprises), que l'existence d'un droit ne suffit pas à en garantir le respect au sein d'une société. C'est bien la défense de valeurs supérieures qui amène à faire émerger aux yeux de toute une société, l'ampleur et la légitimité d'un problème. La lutte pour la sauvegarde de l'environnement constate depuis des années l'échec de ses combats ponctuels, se heurtant à la plus grande machine qu'est l'économie. L'écologie gagne du terrain depuis qu'elle porte des valeurs universelles de respect de la nature, respect de la vie animale, pour lesquelles des individus sont prêts au sacrifice, à l'image de
Greta Thunberg.
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