Pour
les loups chantants, il vous faut : des loups, de la neige, beaucoup de neige, des personnages emmitouflés dans des peaux de rennes, un traîneau.
Nous voilà partis dans un road trip glagla, au coeur d'un désert de neige et de glace. Quelle idée, franchement. C'est à cause de Kira, dont le corps se pare peu à peu de glace. Ciel, c'est la marque du Dieu Korrochun ! Alors Kira doit faire ses bagages, jetée dehors par le chaman du village. Son frère Yuri l'accompagne, c'est toujours mieux de mourir à deux que tout seul. Et puis Anastasia, aussi, l'amie, infirmière, qui se fiche de Korrochun comme d'une guigne, parce que ça, ce n'est pas l'histoire d'une malédiction, mais bien une maladie curable. Alors en route, vers l'hôpital le plus proche.
C'est à dire à plusieurs jours de marche dans le désert de neige. Et accessoirement, percer la muraille protectrice autour du village, un blizzard épouvantable, censé protéger le village des loups chantants. Parce qu'elles attirent les humains ces bêtes-là. C'est ce qui s'est passé avec l'amoureuse de Yuri, Asya. Depuis qu'elle a écouté les loups, Yuri est désespéré, et il se dit que tiens, peut-être, sur la route avec Kira, il parviendra à retrouver Asya ?
Un voyage donc. Ou plutôt un traversée du désert.
Physique, d'abord.
Aurélie Wellenstein sait vraiment bien dépeindre des univers hostiles, a priori exempts de toute magie, de tout espoir, et pas vraiment des lieux de fantasy. Et pourtant, qu'il soit désert de sable, de neige ou d'eau, c'est toujours dans des environnements immenses et hostiles qu'elle nous emmène. Ici, désert de neige, à perte de vue. C'est blanc, partout. Enfin, pas tant que ça, c'est aussi gris, irisé, transparent, beige... Quelques nuances de couleurs. Et donc un univers dur, dans lequel mettre un pied devant l'autre est un enfer. L'écriture reflète cette marche pénible. Les phrases sont assez courtes, juxtaposées les unes après les autres. Elles miment l'avancée des personnages.
Et un voyage intime, psychologique, aussi. Les personnages font leur propre traversée du désert. Ils sont trois, mais désespérément seuls, perturbés par leurs doutes, leurs peurs. Et leur but personnel. A priori, guider Kira jusqu'à l'hôpital. Mais Yuri... Asya le hante, toujours; et
les loups chantants ne cessent de l'attirer. Anastasia est partagée, entre manifestations de magie et sa nature cartésienne. Son statut d'amie aussi... Et Kira, sur le fil entre maudite et malade.
Bref, chacun se débat avec ses propres pensées qui tournent en rond, sans fin, à l'image de ce désert interminable.
J'ai bien aimé d'ailleurs le visage d'Asya, personnage absent mais si présent, à chaque page, comme un fantôme. L'hésitation entre fantastique et fantasy est intéressante, j'ai aimé la manière dont l'autrice quitte l'un pour résolument plonger dans la seconde. Avec des petites touches horrifiques parsemées finement.
Et puis on retrouve les valeurs de l'autrice dans ce roman : son lien avec le règne animal, qui offre une parfaite symbiose avec Yuri; et malgré la noirceur du roman, toujours une touche d'optimisme : par l'amitié, la persévérance, le courage, ou encore l'amour salvateur...
En bref, ce n'est pas mon préféré d'
Aurélie Wellenstein. J'ai un peu peiné parfois à la lecture, comme les personnages dans ce blizzard. Une page après l'autre. A la fin, ras le bol de la neige. Malgré tout, j'admire sa façon de dépeindre ces lieux, et ses romans sont toujours remplis d'interrogations et de réflexions intéressantes.
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