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Citations sur Les mots et les femmes : Essai d'approche sociolingui.. (23)

La création linguistique fait sans cesse usage de processus analogiques, d'où les néologismes auxquels les puristes font la chasse ou encore les créations spontanées des enfants et de la langue populaire, qui souvent d'ailleurs ne respectent pas l'étymologie savante (voir l'américain 'peacenik', militant pour la paix, sur 'beatnik', lui-même formé sur 'spoutnik'). Rien ne s'oppose à la création d'un mot nouveau, qu'il soit d'étymologie savante ou populaire, lorsqu'il y a un besoin à combler. Simplement, en France, il faut la bénédiction de l'Académie et du Haut-Comité de la langue française.
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Mais la principale dissymétrie provient, bien entendu, de la valeur générique du mot homme. On peut s’interroger à ce propos sur l’évolution dans les langues romanes du latin homo qui désignait l’espèce humaine et non le mâle (qui se disait vir). L’homme a détourné à son profit le mot qui désignait l’espèce. On peut considérer que cette identification, qui existe dans de nombreuses langues (exceptions : russe muscina, « mâle », celov’ek; « être humain »; allemand Mann et Mensch, entre autres), entre le mâle et l’espèce, est à la fois le résultat d’une mentalité sexiste et le moyen par lequel elle survit. De même que l’accusé est coupable jusqu’à preuve du contraire, l’être humain est un homme jusqu’à preuve qu’il est une femme.
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La lutte pour l’égalité, pour la liberté, pour l’identité culturelle, implique, pour les femmes comme pour tous les groupes opprimés, minoritaires, marginaux, déviants, la lutte pour le droit à l’expression, à la parole, pour le droit de se définir, de se nommer, au lieu d’être nommé, donc une lutte contre la langue du mépris.
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Le rapport de l'individu à la langue passe par son rapport à la société. (...) Ce livre constitue donc une approche sociolinguistique de la condition féminine. (...) Quelle image de la femme nous renvoie la langue? Dans quelle mesure reflète-t-elle le statut de la femme dans la société?
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Déjà, en 1867, Stuart Mill, ardent défenseur des droits des femmes, préconisait l’emploi de person à la place de man dans tous les textes officiels (Groult, 1977, p. 96). Le problème se pose avec la même acuité dans toutes les langues qui ne font pas la distinction homo/vir. L’emploi d’un même mot pour désigner à la fois l’espèce humaine et le mâle de l’espèce a quelque chose de paradoxal. Comment un mot peut-il à la fois inclure et exclure le sexe féminin? On dira bien sûr que l’emploi du masculin générique n’est qu’une convention grammaticale, mais ça n’est pas aussi évident que ça en a l’air. Cet emploi contient une ambiguïté latente car on a toute latitude pour interpréter homme comme incluant ou excluant les femmes selon les préférences de l’énonciateur et de l’auditeur.
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Ainsi, c’est en se donnant un nom qui ne soit pas le reflet de son statut dans la société que la femme peut conquérir son identité sociale et son identité tout court. Pour l’instant, elle n’a pas de nom, et donc pas de voix.
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« Il n’y a pas maintenant d’hommes faisant de la lingerie ou de femmes faisant des travaux de terrassement mais, si ces occupations entraient dans nos mœurs, les formes linger et terrassière seraient immédiatement comprises » (Durand, 1936).
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La disparition de certaines catégories grammaticales procède assurément de changements de conceptions. L’opposition d’un genre animé : le masculin-féminin et d’un genre inanimé, le neutre, a dû être chose fondamentale dans le monde indo-européen. Déjà pour les Romains, elle ne jouait pas de rôle, et l’opposition grammaticale du masculin-féminin et du neutre n’était liée de manière précise à aucune notion. En laissant tomber le neutre, le roman s’est débarrassé d’une catégorie qui depuis longtemps ne signifiait plus rien. Mais la répartition des noms entre le masculin et le féminin, qui, la plupart du temps, n’a plus de sens, a persisté, et elle ne semble pas à la veille de disparaître malgré le fait que, en général, elle n’a aucun sens » (in Esquisse de la langue latine, cité par Cohen, 1950).
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De même, le mot femme est manifestement chargé de connotations divergentes, conflictuelles, selon qu’il est prononcé comme un terme de mépris (« Ah! les femmes! »), d’adoration féminolâtre (le mot est de Benoîte Groult) ou par les féministes, qui cherchent à redonner au mot son vrai sens, processus inséparable de l’élaboration de l’identité, sociale et linguistique, de la femme. Les mots ne sont jamais neutres ou innocents. Ils veulent dire ce qu’on veut leur faire dire. Qu’est-ce qui fait qu’un mot est péjoratif? uniquement l’intention du locuteur, laquelle repose sur un consensus social. N’importe quel mot peut être proféré ou ressenti comme une injure. Ainsi, il y a eu une époque où l’on ne devait pas appeler une femme une femme, ni une fille une fille; il fallait dire une dame ou une demoiselle. C’est justement le mot dame qui est ressenti aujourd’hui comme injurieux par nombre de femmes.
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Le dictionnaire est une création idéologique. Il reflète la société et l’idéologie dominante. En tant qu’autorité indiscutable, en tant qu’outil culturel, le dictionnaire joue un rôle de fixation et de conservation, non seulement de la langue mais aussi des mentalités et de l’idéologie.
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