Pour eux qui n'avaient aucun contact avec la société en général, les chasser de la vallée équivalait à les condamner à mort.
Le souvenir du visage de la fille empreint de honte me faisait ressentir la douloureuse solitude des femmes. Même si elle avait été violée, à partir de l’instant où elle avait cédé, le poids de l’homme s’était-il installé à demeure tout au fond de son corps ?
Il me semblait qu’ils avaient tous les deux en commun cet air de chien battu, ce qui ne les empêchait pas de faire preuve d’une incroyable intrépidité vis-à-vis des femmes.
On dit que le projet de budget du plan des travaux intègre les indemnités des victimes en fonction de la puissance maximale en kilowatts du barrage. En somme, la mort est une réalité prise en compte dès le début. Ceux qui travaillent dans un tel contexte semblent s’efforcer de devenir insensibles à la mort d’autrui. Dans la pratique, si l’on devait s’apitoyer à chaque décès, il n’y aurait pas de travail possible.
Les poitrines grondaient comme des soufflets de forge.
Je croyais qu’il y avait tapi au fond de moi quelque chose de mystérieux que je ne pouvais absolument pas contrôler. Une fois que la violence s’emparait de moi, elle s’exacerbait sans que je puisse l’arrêter, pour éclater soudain comme si une digue se rompait. Alors, mon corps se remplissait comme d’eau chaude d’un vif plaisir.
Quand j’avais frappé la tête de Chizuko avec la bûche, j’avais également été traversé par une onde de satisfaction. Au tribunal, ce qui avait posé problème, c’était que j’avais continué de frapper obstinément la tête de ma femme avec la bûche alors qu’elle était déjà morte. L’accusation avait insisté en disant que c’était à cause d’une cruauté intrinsèque dissimulée au fond de moi, ce à quoi la défense avait rétorqué qu’il s’agissait plutôt d’une sorte d’état d’aliénation mental dans lequel m’avait plongé la confusion provoquée par la vision de l’adultère de ma femme, et le verdict avait tenu compte de cette appréciation.
Ma condamnation avait donc été très légère pour un homicide, mais j’étais secrètement d’accord au sujet de cette cruauté sur laquelle avait insisté l’accusation.
On dit que le projet de budget du plan des travaux intègre les indemnités des victimes en fonction de la puissance maximale en kilowatts du barrage . En somme la mort est une réalité prise en compte dès le début . Ceux qui travaillent dans un tel contexte semblent s'efforcer de devenir insensibles à la mort d'autrui. Dans la pratique , si l'on devait s 'apitoyer à chaque décès, il n'y aurait plus de travail possible .
"Au fond de la vallée, deux mondes s'étaient constitués. Sans s'influencer l'un l'autre, à l'intérieur d'une frontière abstraite, ils semblaient mener chacun sa vie de manière indépendante." (p. 105)
Mais ils continuaient de nous transpercer du regard en silence, le visage parfaitement immobile. Ensuite, brusquement, le vieillard secoua violemment la fille par l'épaule.
Elle releva la tête. La pluie roulait de ses cheveux vers ses joues et coulait dans son cou. Elle avait le visage blême, les lèvres bleuies. J'eus instinctivement le souffle coupé devant ses traits nettement dessinés. Son visages aux cheveux collés des joues vers la bouche était d'une beauté incroyable, presque insoutenable.
Les yeux de la fille, comme si on l'y poussait, commencèrent à se déplacer sur nos visages. La pluie tombait dru et bruyamment rejaillissait aussi en vapeur blanche sur sa tête et ses épaules.
Soudain, ses yeux s'arrêtèrent sur un point. Sa main dont on voyait la peau en transparence du tissu détrempé s'éleva lentement pour indiquer une direction.
« Puissiez-vous vivre des jours paisibles …. »