Ce roman, au travers de l'histoire d'un attaché parlementaire au service d'un parti en pleine déconfiture et de celui d'une jeune femme ayant acquis une solide expérience en matière de dépannage/piratage informatique, traite de l'engagement dérisoire pour une cause politique perdue et de la contribution tout aussi dérisoire d'une femme en lutte contre la puissance aveugle et tentaculaire d'internet.
Alice Zeniter nous a gratifié en 2017 d'un grand roman ("
L'art de perdre" --réédité dans la collection "J'ai lu") ; elle nous avait déjà démontré son très solide savoir-faire en matière d'écriture et de construction romanesque : non seulement elle capte rapidement l'attention de son lecteur et le conduit à s'interroger avec elle sur le monde dans lequel nous vivons, mais, de surcroît, elle manie fort bien la langue française. S'il n'avait pas été signé, je doute que beaucoup de lecteurs auraient attribué ce roman à
Alice Zeniter, tant il est différent de "
L'art de perdre".
Cela dit, bien qu'ayant entraperçu dans ce nouveau roman avec un mélange de curiosité et de crainte ce que le monde d'internet peut contenir de fascinant, de diabolique et de dangereux et bien qu'ayant moi-même une minuscule et obsolète expérience du codage accompagnée d'une très vague connaissance des méthodes et pratiques des hackeurs, je crains que le vocabulaire anglo-américain décrivant les diverses spécialités de ces 'geeks' cambrioleurs, 'nolifes' terroristes, informaticiens maîtres-chanteurs et autres empêcheurs de tourner en rond au mieux mette en garde contre le piratage et la pandémie virale ceux qui ne se servent d'internet que pour consulter leur messagerie et, au pire, les conduise à se priver de fréquenter ce fabuleux nouveau continent à la fois source d'info/désin-formation et caisse à outils-services du quotidien.
Il est donc probable que la plupart des lecteurs de ma génération (celle des boomers) parcourront avec aisance et quelque plaisir les chapitres consacrés à la vie politique récente mais qu'ils seront rebutés et effrayés par la description de la 'sombritude' de l'internet clandestin.
Malgré cet obstacle, le livre a le mérite de défendre la cause de l'être humain dans le monde moderne (notamment celle des femmes), la dignité du combat pour la liberté de pensée, l'apport essentiel du sens critique et celui de la goutte d'eau de l'action individuelle dans le mouvement de l'océan collectif.