Alice Zeniter, je l'ai rencontrée ce mois ci à Tunis, où elle était invitée à parler de son livre, l"art de perdre". D'autres critiques, avant et après la mienne, en retraceront le fil. Je n'avais pas encore lu le roman, je ne connaissais d'elle que "
sombre dimanche" et "
juste avant l'oubli" et j'avais aimé. Cette femme lumineuse, brillante, modeste et tellement accessible nous a subjugués. Malgré un thème aussi intime (son histoire familiale) et un cadre encore si sensible (les relation entre France et Algérie) elle sait ne pas prendre parti. J'ai appris la genèse de son livre, les années de gestation, la masse d'informations collectées. Elle nous a dit avoir lu des traités de botanique sur la culture de l'olive, les maladies, le développement, la récolte, des documents administratifs par centaines, avoir interviewé des heures pour retracer ces pans de sa propre histoire. Elle s'est enflammée à propos de l'intégration, des appellations "deuxième" ou troisième" générations, de l'obsession quasi maladive à propos des "musulmans de France", rappelant avec beaucoup d'émotion qu'entre sa grand mère, analphabète, son père qui a tant lutté pour acquérir cette langue française et elle même, écrivain, il s'est déroulé bientôt un siècle. Comment exiger alors une intégration accélérée quand le temps de l'homme est, de ce point de vue, incompressible ? Bien sûr, depuis cette rencontre j'ai lu le livre et je glisse entre ses pages un petit mot que cette formidable auteur m'a offert.