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Critiques filtrées sur 2 étoiles  
SUR LES TRACES MAUDITES DU GÉNÉRAL SUTTER

Nous sommes peu après le mitan du XIXè siècle, vers le nord-est de l'actuelle Californie. Ici, c'est la mine de charbon ou le fantasme malfaisant de l'Or qui s'offre, durement, sans concession, à ceux qui veulent survivre. Jeunes ou vieux. Femmes ou hommes. Mais presque exclusivement au blancs, en ce qui concerne le précieux métal.
Deux toutes jeunes filles d'origines chinoises viennent de découvrir le corps sans vie de celui qui fut, pour le meilleur et souvent pour le pire, leur père, "Ba". L'aînée se prénomme Lucy, sa puînée Sam. En ce jour fatal qui fait d'elles des orphelines - "Ma", leur mère, est décédée trois ans auparavant, laissant son aînée bien plus inconsolable que la cadette, on découvrira bien plus tard pour quelle funeste raison. Quoi qu'il en soit et tradition oblige, les deux fillettes doivent absolument trouver - Voler ? Emprunter ? Mandier ? - deux pièces d'argent afin que le mort puisse payer son passage vers l'au-delà. Et ce dernier a absolument tout bu, comme à son accoutumée, avant de rejoindre le sombre pays des ombres.  

C'est donc dans ce cadre franchement pas idyllique ni même mythique que nous découvrons ces deux jeunes adolescentes - encore que la seconde, qui se prend pour un garçon, soit encore une enfant -.
Entre misère, tristesse, déréliction, abandon, racisme et mort nous allons suivre Lucy - surtout elle, d'ailleurs - et Sam après qu'elles seront parvenues à mettre la main, un peu accidentellement, sur les fameuses pièces. S'ensuivra une longue et macabre déambulation sous l'implacable soleil californien, en compagnie des coyotes et des restes funestes des antiques troupeaux de bisons, décimés par la folie de l'homme blanc. Enfin, c'est le moment de mettre en terre les restes, expression O! combien exacte en l'occurrence, tant le corps du malheureux Ba est dans un état de décomposition avancée à force de pérégrination sans but ni fin visible. L'errance prend ainsi doublement fin, entre inhumation dans un lieu jugé ad hoc et rencontre opportune d'un pistard que les deux jeunettes s'apprêtaient à voler, le pensant mort. Il leur indiquera la présence proche d'une ville, Sweetwater, où elle pourrait reprendre pied avec la civilisation. C'est là que nous les laisserons, dans un premier temps, Lucy s'y installant, Sam finissant par disparaître sans qu'on sache où ni pourquoi. 

Quelle ne fut pas ma déception à la lecture de cet ouvrage à l'avant-propos pourtant plus qu'alléchant : l'histoire de deux jeunes filles, premières nées américaines d'un couple de migrants chinois dont il n'est souvent rien raconté d'autres que des clichés, racontée par une migrante chinoise contemporaine, bien intégrée dans la société américaine actuelle mais sans doute très à même de mieux ressentir la vie rude de ces ancêtres-là. Que n'a-t-on vu ou lu sur ces "coolies", destinés tout d'abord à la pose, dans des conditions bien souvent terribles, des rails du futur chemin de fer transcontinental étasunien. Que la "légende dorée" du far-west nous fait bien souvent retrouver dans les rôles subalternes de restaurateurs, d'épiciers ou de propriétaires de laveries, ou encore dans de mystérieuses et dangereuses confréries, entretenant encore un peu plus l'imagerie autour de ces gens vivant bien souvent en communauté très fermées au sein des villes-champignon des grandes heures du mythe américain. Hélas, cette thématique est à peine entretenue. Tout juste comprend-on que ces migrants avaient interdiction de s'approprier des concessions minières sous le prétexte fallacieux qu'ils n'étaient pas nés sur le sol américain, que le racisme les suivait partout, même chez celles ou ceux semblant ne pas attacher de vraie importance à leurs différences, à la couleur de leur peau. En réalité, C Pam Zhang s'attache surtout à décrire un quasi huis-clos familial, remontant, en milieu d'ouvrage, le fil du temps - sans doute les deux chapitres, assez brefs, les meilleurs de l'ensemble de ce roman -, pour mieux revenir au temps présent du livre, aux retrouvailles de deux soeurs devenues presque adultes, de leur nouveau grand projet, etc. 

C'était donc avec un grand plaisir et une vraie envie que je recevais, il y a bientôt un mois, cette Masse Critique spéciale, organisée par notre indispensable site de lecture(s) et de lecteurs en ligne, Babelio.com, avec l'aimable complicité des vénérables et belles éditions du Seuil, que je remercie chaleureusement, malgré tout. Hélas, passé l'enthousiasme des premières pages, l'histoire s'enlise très vite, n'avance qu'à force de répétitions, de dialogues plus ou moins crédibles, de retours permanents sur le passé proche, sans que cela donne matière à approfondir le présent, ou si peu. Pire : il y a ce style moitié prétentieux, moitié laborieux, une succession de phrases dignes d'une sous-Marguerite Duras - d'avance pardon pour les admirateurs, j'ai énormément de peine avec le style durassien -, brisé, haché menu, épuisant, à d'autres, très différentes, à la syntaxe alambiquée, parfois à la limite de l'incompréhensible. Il y a ces tics de langage, tels que ces reprises incessantes, sans permettre au lecteur lambda de les comprendre, de mots de conversation chinoise de la vie quotidienne, ou que l'on ne peut que supposer tels. Ô! Bien entendu, on finit par deviner le sens de quelques-uns, mais cela aurait-il été si embarrassant d'en faire des renvois en bas de page ou dans un petit lexique en fin d'ouvrage ? Sans même prendre en considération que le lecteur est justifié à se demander le sens profond de leurs répétitions épisodiques (en dehors de marques éparses d'affection entre parents et enfants). 

Alors, Très vite, l'ennui s'est installé, au point qu'à plusieurs reprises, j'ai vraiment failli abandonner aux alentours des premières cent pages. Fort judicieusement, au moment où le récit est sur le point de s'enliser totalement, C Pam Zhang nous fait remonter le cours du temps, avant la naissance des deux jeunes filles et il faut bien admettre que la seconde partie du livre, et plus encore, l'assez convaincante - mais très brève - troisième partie m'ont évité le pire - si tant est que cela soit une catastrophe d'abandonner un ouvrage avant sa fin -. On y comprendra comment leurs parents se sont rencontrés, qui ils étaient alors vraiment, etc. Certes, c'est bien plus classique mais, n'eut été ce style inutilement ampoulé, ces descriptions paradoxalement très minces, sans relief et sans grand intérêt - les amateurs de "nature writing" en seront désespérément pour leurs frais -, une psychologie générale des personnages manquant drastiquement de finesse et de profondeur, au point qu'à aucun moment l'on ne parvient à se sentir vraiment proches d'eux, à les sentir vivre, à l'exception notoire du père, dans la troisième partie, la plus originale au fond. La plus inattendue de ce point de vue, puisque c'est alors un mort qui parle ! On achève finalement l'ouvrage comme on l'a débuté, au fil d'une quatrième et ultime partie passablement ennuyeuse, toujours aussi péniblement écrite, en compagnie de personnages, nouveaux pour deux d'entre eux, auxquels ont peine toujours autant à croire. 

Au bout du bout, on peine à dire si l'on avait à faire à une saga familiale (sans doute un peu), à un roman à thèse dénonçant le racisme anti-chinois des blancs américains (si c'est effectivement un sujet évoqué, c'est tout de même très loin d'être le seul fil rouge), à un roman d'aventure (si oui, alors quelle aventure bien médiocrement contée), à un roman initiatique (certes, certes), à un peu de tout cela, mais sans que l'autrice parvienne jamais à vraiment se décider ? Toutes ces thématiques, tous ces genres sont abordés, ainsi que la mort omniprésente, la violence du temps et des hommes entre eux, les rêveries des jeunes filles en fleur, l'importance de l'attachement culturel, la naissance d'une nouvelle nation sur un flot de mensonges, de vilenies et même de meurtres, l'environnement saccagé, les secrets de famille, le goût du lucre, même l'assignation au sexe est plus ou moins abordé. Mais voilà, tout n'est ici qu'effleurement, surface, superficialité, rien n'accroche jamais en profondeur, tout n'est que survol fastidieux, lassant.

Des romans mondes, capables d'emporter tant de sujets à la fois, il en existe, assurément. Mais c'est une entreprise difficile, compliquée, qu'à mon grand regret cette jeune autrice peine, c'est un euphémisme, à réussir. Sans doute ai-je trop espéré découvrir dans de l'or dans les collines une jeune Cormac McCarthy chinoise, vibrer avec un texte digne des aventures vécues et narrées jadis par l'immense Jack London, d'un mythique (quoique très imaginaire sous sa plume) Général Sutter dans L'or de Blaise Cendrars ou encore découvrir la face sombre de la colonisation de l'Amérique comme dans les nouvelles terribles, subtiles et profondes de Dorothy Johnson. Rien de tout cela ici, que de l'ennui et le gris anthracite du charbon que ces colons chinois seront parfois amenés à exploiter pour survivre, l'or leur étant iniquement refusé par les "locaux", charbon recouvre de sa couleur funeste et monotone ces pages globalement assommantes. Quel dommage ! 

À noter la très belle photo de couverture qui... ne rend absolument pas compte de ce que l'on trouve à l'intérieur. Les quelques chevaux (et mules) croisés ici sont des animaux de bât plutôt malheureux et franchement pas sauvages, pauvres bêtes bien éloignées de tout farwest mythologique. 
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J'ai eu beaucoup de mal avec ce roman. L'histoire est très intéressante, certes. Deux filles d'origine chinoise traversent l'ouest américain pour enterrer leur père. Elles sont confrontées à la violence, le racisme, le sexisme. Les thèmes sont évocateurs et bien traités mais quelle lourdeur dans le style. Je n'ai pas accroché du tout avec l'écriture de l'autrice. Elle passe parfois d'une idée à l'autre. C'est dommage car elle fait perdre le fil de l'intrigue. Bref, c'est une vraie déception pour moi.
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Malheureusement, j'ai eu énormément de mal à lire ce roman auquel je n'ai pas du tout accroché ... Je ne peux pas dire que je n'aime pas le style de l'auteur parce que le roman est très bien écrit mais rien que les 100 premières pages qui parle du père mort des deux héroïnes pour trouver un endroit digne pour l'enterrer j'ai trouvé cela assez glauque ... Il y a beaucoup trop de narration, trop de descriptions et du coup je me suis perdue dans ma lecture pour finalement ne pas réussir à rentrer dedans.
J'ai bien compris la volonté de l'auteur était de pointer les minorités à cette période de la conquête de l'ouest et de la recherche de l'or, des difficultés de l'intégration.
Dommage, je suis déçue de ne pas avoir accroché parce que je trouvais le thème plutôt intérressant ...
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